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Notre enquête sur le BIO (2/5): qu'est-ce qui est vraiment bio dans le bio?

C'est la Semaine bio. Des événements sont organisés dans tout le pays pour faire découvrir un secteur en plein boom. Il y a en effet de plus en plus de consommateurs et de producteurs. Mais le bio suscite de nombreuses questions. La rédaction de RTLinfo.be y répond et vous éclaire à travers cinq reportages. Ce mardi, réponse à la question de base: ça veut dire quoi concrètement, faire du bio ? Et puis, un produit bio, c'est vraiment vraiment bio ou c'est juste un peu bio ?

Les scandales alimentaires à répétition, les révélations choquantes sur la production de certains aliments ou la fabrication de certains plats préparés, les résultats de plus en plus inquiétants de l'impact de certains produits de l'agriculture intensive (pesticides, etc.) sur notre santé, les conditions de l'élevage industriel de certains animaux, la menace globale qui pèse sur notre planète, etc. Les raisons qui poussent à acheter des produits bio ne manquent pas. En Belgique, les consommateurs (et, par ricochet, les producteurs) de ces produits plus sains sont chaque jour plus nombreux (voir chiffres plus bas). Vous êtes toutefois encore une très large majorité à ne jamais acheter bio ou seulement à de rares occasions. Les raisons ? Le prix, bien entendu. Mais aussi des interrogations. Parfois même de la méfiance. Derrière tous ces logos et étiquettes verts, qu'est-ce qu'il y a vraiment ? Est-ce que c'est vraiment sain et bio ? Est-ce que ce n'est pas une arnaque pour nous faire payer plus cher ? Notre journaliste Lucas Babillotte a enquêté.

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Qu'est-ce qui est vraiment bio dans le bio ?

Première garantie apportée par la certification européenne: l'absence d'OGM et de pesticides, ou presque. "Il existe effet une tolérance de contamination de 0,9 % d'ADN OGM sur l'ADN total de l'espèce concernée, mais il s'agit de contamination et non d'incorporation, souligne Emmeline Foubert, assistante qualité de Certisys qui est aujourd'hui le premier organisme de contrôle et de certification de produits bios en Belgique. Certains consommateurs anti-bio avancent qu'on peut ajouter des OGM ce qui est totalement faux. C'est juste que les acteurs du bio sont cernés par les cultures conventionnelles dont une bonne partie sont OGM, difficile dès lors d'empêcher toute contamination, bien malheureusement."



Il en est de même pour les pesticides dont la contamination n'est tolérable que si elle est inévitable et ne dépasse pas un seuil calculé en fonction du pesticide concerné. Si les contaminations résultent d'un manquement aux mesures de précaution, l'opérateur concerné sera sanctionné et le produit déclassé, même si la contamination ne dépasse pas les seuils établis.

Dans le détail, les produits frais tels que les pommes, les carottes, le lait, les œufs et les viandes sont donc, en théorie, à 99 % bio minimum. C'est du moins ce que garantit la règlementation européenne qui autorise une présence accidentelle à hauteur de 0,9 % d'OGM ou de dérivés d'OGM dans ces produits. Mais pour Emmeline Foubert, les produits frais sont, dans la pratique, 100 % bios: "Nous réalisons de nombreuses analyses et je n'ai jamais constaté une telle teneur dans un produit biologique, d'autant plus que les OGM sont tout simplement inexistants au niveau d'un certain nombre de productions telles que les pommes et les carottes".



Outre l'absence d'OGM et d'engrais chimiques, la certification bio garantit par ailleurs la culture en pleine terre pour les fruits et légumes et le respect du bien-être animal pour les viandes. Mais à cela s'ajoutent également des parcours extérieurs en pâturages ou prairies bios. Les animaux ne peuvent par ailleurs pas être abattus avant un certain âge et leur densité en bâtiment ou en pâturages ou prairies est limitée. L'âge d'abattage des poulets bios est par exemple de 81 jours minimum, contre 35 à 40 jours pour un poulet standard.

Côté alimentation, 95 % minimum des aliments doivent être biologiques (sans additifs chimiques, ni hormones ou stimulateurs de croissance) et provenir de l'exploitation elle-même ou de la région. "L'Europe tolère 5 % d'ingrédients "non-bio" car n'existant pas en bio tels que minéraux, vitamines, oligo-éléments, etc.", ajoute Emmeline Foubert.

Côté médicaments, les antibiotiques et vermifuges peuvent être employés pour soigner le ou les animaux atteints si et seulement si les médecines naturelles ne sont pas appropriées, les vaccins sont autorisés de même que tous les traitements obligatoires. "Mais les animaux qui ont fait l'objet de traitement doivent attendre 2 fois plus longtemps que les animaux conventionnels avant mise sur le marché afin d'assurer l'absence de résidus dans la viande et les animaux traités plus d'un certain nombre de fois sont déclassés", précise Emmeline Foubert. Une bête qui est écartée durant 2 semaines en agriculture conventionnelle sera donc écartée 4 semaines.


Existe-t-il plusieurs "bios" ?

La question peut paraître étonnante mais vaut le coup d’être posée. Si l’on oppose généralement l’agriculture conventionnelle avec l’agriculture bio, n’existe-t-il pas aussi plusieurs manières de produire bio ? Les organismes officiels nous ont répondu par la négative mais la vision d’Henri est différente. Ce producteur de fruits et légumes bio estime qu’il est tout à fait possible de produire du bio de façon intensive. "On commence à voir de plus en plus de producteurs qui vont se concentrer sur quelques cultures qu'ils vont écouler uniquement en grandes surfaces, constate-t-il. Or à notre niveau, il ne faut pas chercher à produire plus pour vendre en masse parce que sinon on va très vite entrer dans le jeu des grandes surfaces."

Le bio ne serait donc pas sans risque selon lui : "La certification du produit c'est indispensable, mais il faudrait aussi pouvoir certifier l'individu pour s'assurer qu'il ne fait pas de bio industriel. On peut faire des légumes bios chargés de nitrates en utilisant des fertilisants naturels. En mettant beaucoup d'azote organique on peut "polluer" un épinard, même s'il est bio."  Il y aurait donc bien plusieurs moyens de faire du "bio".




Et qu’en est-il des produits transformés ?


Outre la présence accidentelle autorisée – en quantité quasi nulle - d'OGM et de pesticides, un produit transformé considéré comme "bio" n'est pas toujours 100 % bio, mais il est au minimum constitué "à 95 % de produits bios". Le règlement européen définit en effet 5 % d'ingrédients non bios autorisés dans la préparation ou la transformation de produits bios "mais ils ne concernent que certains ingrédients et ne peuvent être employés que s'ils sont indisponibles en version biologique", souligne Emmeline Foubert.

Parmi eux figure notamment une série de 30 additifs ou auxiliaires chimiques autorisés (contre 330 dans l'agriculture conventionnelle) dont des colorants, des conservateurs, des antioxydants, des agents de texture ou encore des acidifiants. "C'est plus juste de parler de 95 % mais c'est plus parlant de parler de 100 %, pour Nadège De Bonte, en charge de la communication de Certisys. Si le consommateur entend que c'est 95 %, il pensera peut-être qu'on peut y trouver des pesticide ou des OGM ce qu'il est totalement faux. S'il veut aller plus loin, il découvrira que c'est 95 % + 5 % mais c'est plus un point de confusion qu'autre chose."  Les règles ne sont donc pas les mêmes pour les produits transformés (jus de fruits, fromages, yaourts, biscuits et pains, etc.).

Un produit constitué de moins de 95 % d'ingrédients bios pourra, par ailleurs, être déclaré "à base d'ingrédients bios" mais ne pourra être porteur de la certification officielle. Une soupe qui ne comporte par exemple que 5 % de haricots bios ne pourra donc pas être appelée "soupe bio" mais "soupe à base d'ingrédients bio".

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