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L'ex-patron de l'Institut Montaigne condamné pour avoir drogué une ex-collaboratrice, le motif sexuel retenu

L'ancien tout-puissant directeur de l'Institut Montaigne Laurent Bigorgne a été condamné jeudi à Paris à douze mois d'emprisonnement avec sursis pour avoir drogué à son insu une ex-collaboratrice lors d'une soirée en février dernier, le tribunal correctionnel retenant l'intention sexuelle.

Cet homme de réseaux proche d'Emmanuel Macron, qui avait démissionné du cercle de réflexion libéral après la révélation des faits, est également condamné à 2.000 euros d'amende.

Sa condamnation ne sera toutefois pas inscrite à son casier judiciaire, "au regard des activités passées et de l'avenir professionnel qui reste sérieusement envisageable" pour Laurent Bigorgne, a indiqué le tribunal.

Absent au délibéré, l'ex-patron de l'Institut Montaigne a annoncé par la voix de son avocat Sébastien Schapira qu'il allait "immédiatement" faire appel de cette "décision incohérente".

Le parquet avait requis le 10 novembre dix-huit mois d'emprisonnement avec sursis et une obligation de soins à l'encontre de Laurent Bigorgne pour administration de substance nuisible par une personne agissant sous l'emprise manifeste de produits stupéfiants.

Cette qualification, qui ne retenait pas le motif sexuel, était contestée depuis le début de l'affaire par la partie civile.

En rendant son délibéré, le tribunal a requalifié les faits et considéré qu'en versant de la MDMA, une drogue de synthèse, dans le verre de sa collaboratrice Sophie Conrad, Laurent Bigorgne avait voulu "commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle".

"C'est une reconnaissance de ce qui s'est passé et des faits, et une reconnaissance complète", a salué Sophie Conrad.

Arrivée à l'Institut Montaigne en 2020 et responsable du pôle Politiques publiques, elle avait déposé plainte dans la nuit du 22 au 23 février 2022, après un dîner au domicile de Laurent Bigorgne, qui était son supérieur et l'ex-mari de sa sœur.

Après avoir bu une demi-coupe de champagne, "le monde a changé, les murs tournaient", avait-elle décrit.

Elle était parvenue à quitter les lieux pour se rendre à l'hôpital.

Une expertise a révélé qu'elle avait absorbé de la MDMA, une drogue de la famille des amphétamines aussi appelée ecstasy.

- "Aucune faveur" -

Placé en garde à vue, Laurent Bigorgne avait rapidement reconnu avoir pris ce soir-là de la cocaïne et versé de la MDMA dans le verre de Sophie Conrad, mais a toujours contesté une intention sexuelle.

A la barre, il avait expliqué son acte "infâme, odieux et lâche" par son espoir que Sophie Conrad "entende" et "écoute" sa "grave dérive" de toxicomane, affirmant consommer jusqu'à "quatre grammes par jour" de cocaïne.

Mais "je n'ai jamais touché Sophie, je n'aurais jamais, jamais abusé d'elle", avait assuré Laurent Bigorgne.

Dans son jugement, le tribunal a considéré que le patron de l'Institut Montaigne, qui ne pouvait "ignorer le caractère sexuellement désinhibant d'une telle drogue", ne pouvait "sérieusement invoquer le fait que l'administration de MDMA était destinée à discuter, alors que (...) il n'y avait aucune difficulté sur ce plan dans les relations entre les deux protagonistes".

"L'intention sexuelle était avérée", s'est réjoui l'avocat de Sophie Conrad, Arié Alimi. "C'était un long combat, et c'est un combat pour toutes les victimes de violences sexuelles que d'obtenir une reconnaissance (du motif sexuel, NDLR)".

"Le ministère public a tout fait pour éviter cette qualification", a accusé Me Alimi.

Le conseil de Sophie Conrad avait multiplié les procédures pour élargir les charges visant Laurent Bigorgne et obtenir le dépaysement de l'enquête, estimant que le parquet de Paris avait mené des investigations partiales.

Arié Alimi a notamment déposé une plainte avec constitution de partie civile pour "tentative de viol". Une procédure qui sera retirée si la cour d'appel confirme la condamnation de Laurent Bigorgne et retient l'intention sexuelle, a indiqué Me Alimi.

"Le tribunal, manifestement, n'a pas résisté à cette parole militante qui a reconstruit la vérité", a déclaré Me Sébastien Schapira.

Laurent Bigorgne "n'a fait l'objet d'aucun passe-droit, d'aucune faveur", a ajouté son avocat. "C'est une procédure qui s'est déroulée avec beaucoup de sévérité et beaucoup de rigueur".

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