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Procès de Buizingen: Infrabel craint de devoir changer complètement le réseau ferré belge

Le tribunal correctionnel de Bruxelles prononcera ce vendredi à 14h00 son jugement concernant Infrabel, prévenue pour défaut de prévoyance et de précaution ayant conduit à la collision de deux trains de voyageurs à Buizingen, le 15 février 2010.

Le gestionnaire du réseau de chemins de fer belge avait fait appel de sa condamnation en première instance par le tribunal de police, qui l'avait condamné pour avoir eu une part de responsabilité dans ce grave accident à une amende pénale de 550.000 euros.

Mais le problème n’est pas tant l’argent que les conséquences du premier jugement, notamment l’obligation pour Infrabel de prévoir toute une série d’imprévus et l’interdiction de croisement sur les voies de chemin de fer. Impossible selon Me Laurent Kennes, l’avocat d’Infrabel, au micro de Hanan Harrouch dans le RTL INFO 13H.

"Nous avons un système qui n’est pas comme le système hollandais. Avec plein d’endroits où il y a des croisements de trains. On ne sait pas changer du jour au lendemain tout le système ferroviaire. Deuxièmement, il y avait la question des aiguillages de protection. C’est-à-dire de systématiquement prévoir que quand 2 trains risquent de se croiser, qu’on mette les aiguillages pour dévier le train qui éventuellement passerait au feu rouge. Si on fait ça, non seulement il faut le prévoir sur tout le réseau, mais le train est dévié et arrive aussi sur un autre train. Donc c’est déplacer le problème. Ce n’est pas le solutionner."

Trois "erreurs" qu'Infrabel conteste

La procureure a requis cette fois une amende d'un montant de 540.000 euros à l'encontre d'Infrabel, lors des débats devant le tribunal correctionnel en novembre dernier.

Elle a pointé du doigt trois erreurs qui ont été commises par le gestionnaire du réseau ferroviaire, notamment le fait qu'il aurait dû conserver le système de communication IOT à la gare de Hal. Ce système permet un rappel du signalement via une communication entre le superviseur et le conducteur du train. Il avait été démonté lors de travaux sur les voies et non réhabilité ensuite.

À cela, Me Laurent Kennes a répondu que le système IOT a été démonté en 1997 et qu'Infrabel n'a été créée qu'en 2005, ce qui fait qu'il peut difficilement lui être reproché de ne pas avoir agi pour une décision prise avant sa création. "De plus, le système IOT n'est pas une aide à la conduite. C'est un signal qui sert à dire au conducteur que tout le monde est monté dans le train. C'est un signal à quai mais qui n'est pas un signal de départ", a-t-il dit.

La procureure a également évoqué le fait que les aiguillages auraient pu être mis en position de sécurité mais aussi qu'Infrabel ne s'est pas suffisamment coordonnée avec la SNCB, opérateur du réseau, pour la mise en service du système de freinage TBL1+.

Pour Me Kennes, ce fait ne peut être reproché à sa cliente, qui "s'est montrée pro-active concernant le système TBL1+". Rien ne permet de prouver que l'infrastructure ferroviaire est en cause dans l'accident, selon lui.

Aucun expert n'a pointé du doigt un des faits reprochés à Infrabel

"Quant au problème de croisement des trains - qui empêche de placer les aiguillages en position de sécurité -, les experts n'en parlent pas, la commission d'enquête parlementaire sur l'accident n'en parle pas, seul le tribunal de police parle de 'choix désastreux'", a répondu l'avocat. "Personne ne conseille de placer les aiguillages en protection, ni les experts ni l'Organisme d'enquête. Il s'agit juste d'une réflexion et comme on se dit qu'Infrabel n'y a pas pensé, alors c'est une faute. Non! ", s'est exclamé l'avocat.

Me François Koning, également conseil d'Infrabel, a rappelé que l'automotrice de tête du train L ne possédait que le système "gong-sifflet" pour rappeler le signalement au conducteur dans sa cabine, alors qu'une automotrice possédant un système de rappel plus performant, appelé " Mémor", se trouvait en milieu de convoi.

Me Koning a encore insisté sur le dépassement du feu rouge par le conducteur du train L, comme l'ont attesté les experts, et sur le fait que celui-ci avait déjà commis une telle erreur quelques mois avant la catastrophe de Buizingen, parlant donc d'une "accumulation d'erreurs" de la SNCB.

Rappel des faits

En décembre 2019, le tribunal de police de Bruxelles a condamné la SNCB, opérateur du réseau ferroviaire belge, et Infrabel, gestionnaire du réseau, à des amendes pénales de 550.000 euros pour avoir commis de graves fautes en matière de sécurité, ayant conduit à la collision de deux trains à Buizingen, en février 2010.

Le tribunal a également établi que le conducteur du train L. - celui qui n'a pas respecté sa trajectoire - avait manqué d'attention et outrepassé un feu rouge, endossant également une part de responsabilité, bien que moins importante. Après avoir appliqué le principe de décumul des responsabilités, le tribunal n'a pas prononcé de peine à l'égard du conducteur, étant employé par la SNCB, personne morale qui a commis une faute plus grave.

Seule Infrabel a ensuite interjeté appel du jugement.

Le 15 février 2010 à 08h28, un train local (train L) Louvain-Braine-le-Comte a percuté un train InterCity (train IC) Quiévrain-Liège-Guillemins, à hauteur de Buizingen, dans l'entité de Hal (Brabant flamand). La collision a fait dix-neuf morts, une trentaine de blessés graves et une centaine de blessés légers.

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