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Fêtes sous restrictions: quel sera l'impact sur notre mental?

Depuis le comité de concertation de vendredi, c'est sûr: les fêtes de fin d'année n'auront pas la même saveur que d'habitude. La règle de ne pouvoir inviter qu'une seule personne dans son foyer reste d'application. La bulle sociale est légèrement élargie pour les personnes isolées. Les Belges qui vivent seuls pourront inviter deux personnes en même temps le jour de Noël ou la veille.

Cette situation pose question en matière de santé mentale. Notre présentatrice Salima Belabbas a interrogé le psychologue Jean Van Hemelrijck en direct dans le RTL INFO 19H à ce sujet.

Salima Belabbas: Est-ce qu'il faut craindre des conséquences durables pour la santé mentale?

Jean Van Hemelrijck: Absolument. D'abord ce n'est pas du tout sûr que les gens vont respecter à la lettre. Donc il va y avoir toutes ces contorsions qui vont produire de l'inquiétude et de l'angoisse dans le court terme. L'idée fondamentale, c'est que les fêtes ont une fonction extraordinairement importante pour toutes les familles. Quelles que soient nos croyances et nos habitudes. Le fait de nous priver de cela va produire une certaine forme de tristesse. Il y a des gens qui vont tomber dedans. Et vous savez, quand un homme est désespéré, soit il se laisse aller à son désespoir, ou alors éventuellement il rebondit en étant en colère, en rage, et en exportant son désespoir. Donc il y a une forte crainte qu'on peut avoir sur le principe même de santé mentale d'une nation.

Salima Belabbas: Est-ce qu'il y a des ressources qu'on peut mobiliser pour ne pas sombrer?

Jean Van Hemelrijck: Il faut surtout expliquer aux politiciens qu'ils doivent nous permettre l'émotion. Si vous regardez bien ce qui se passe hier, c'est qu'on essaie de résorber l'émotion par la raison. On explique, on convoque la morale. Mais il faut que les gens puissent exprimer leur détresse, leur colère, leur désarroi. Il ne faut pas toujours leur faire la morale de la mort. Parce qu'on est tout le temps en train de nous bombarder la mort. On a compris que le covid est dangereux, on le sait, on a compris. Il faut faire une place à cette émotion. Il faut que les hommes puissent la partager, l'exprimer, la reconnaître, la valider. La faire vivre, de manière à ce qu'elle ne reste pas à l'intérieur de nous et à ce qu'on la mette dehors. Que ce soit sous forme de chant, de cri… C'est pour ça que, quelque part, c'est désespérant que les artistes n'aient pas accès à leur profession, car ce sont de grands thérapeutes sociaux, qui nous aident à transformer nos désespoirs en créativité. Donc oui, il faut absolument exporter cela par la parole, par le geste, par le cri, par la danse, par le sourire, par le rire, par l'amour. Par toutes les formes que nous avons toujours utilisées pour essayer de vivre mieux.

Salima Belabbas: Des fêtes en ligne, est-ce que ça a du sens?

Jean Van Hemelrijck: Pas grand-chose, non. Ça permet d'assurer le lien, mais une fête c'est un rituel de retrouvailles. Où on a besoin de sentir le corps des autres. La main des autres. De pouvoir prendre les corps dans les mains. De pouvoir s'embrasser. De pouvoir rire ensemble, boire ensemble. De pouvoir dire des bêtises. De pouvoir se rappeler tous ceux qu'on a aimé et qui ne sont plus là. De pouvoir faire des projets, puisque vous savez que nous sommes des êtres de paroles. Nous pensons que la parole a une vertu. Puisqu'on se dit tous les matins bonjour, toutes les nuits bonsoir ou bonne nuit, bonne année, bonne santé… On croit que la parole a une vertu thérapeutique. Mais il faut que l'autre à qui on s'adresse soit là, soit devant nous. Qu'il soit partenaire de notre parole. Et donc des fêtes virtuelles, ça va produire aussi beaucoup de frustrations, beaucoup de regrets. Et tout le monde se dira au bout du compte que c'est mieux que rien. Mais le mieux que rien va nous accompagner un moment avec une amertume au fond de la gorge et une certaine forme de colère.

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