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Une pluie de bombes américaines s'abattait sur Namur il y a 75 ans: Danillo a vécu cet enfer qui a tué 330 habitants

Ce 18 août est un jour spécial pour Namur. Il y a 75 ans jour pour jour, un bombardement américain s'abattait sur la ville, encore aux mains des Nazis. L'objectif: détruire un pont ferroviaire. Mais les bombardiers ont complètement raté leur cible et 330 personnes ont été tuées. Nous avons rencontré Danillo. Il avait 21 ans à l'époque. Il nous décrit un drame "indescriptible".

Revenons 75 ans en arrière, jour pour jour. Depuis le débarquement de Normandie, les troupes alliées ne cessent de progresser sur le territoire français. Mais en ce 18 août 1944, Namur, sa citadelle, ses ruelles, son beffroi et ses forts sont encore aux mains des Nazis.

Le soleil brille. Les Namurois mènent une vie presque normale malgré la pauvreté et la présence des soldats allemands. Mais en fin d'après-midi, vers 18h, une sirène retentit. Les habitants en ont l'habitude: elle se déclenche à chaque fois qu'un avion survole la ville. Ils ne s'inquiètent donc pas.


La cible des bombardiers n'est pas l'Allemagne

Mais cette fois, les bombardiers américains ne se rendent pas en Allemagne. Leur cible est toute proche: le pont ferroviaire du Luxembourg qui enjambe la Meuse. Les Américains veulent le détruire pour couper la route aux troupes allemandes.

De 18h06 à 18h27, 213 bombes sont larguées sur Namur. Pas une seule n'atteint son objectif. Après cette pluie meurtrière, le pont est toujours là. La ville, elle, est en ruines. Plus de 600 immeubles sont détruits. La place d'Armes est ravagée. Le bilan humain est lourd: au moins 330 personnes ont trouvé la mort alors que des centaines d'autres sont blessées.

La Ville de Namur est meurtrie, détruite suite à une erreur... par ceux qui la libéreront trois semaines plus tard.

Des morts, des morts et des morts

Nous avons rencontré Danillo Buda, un rescapé de la guerre. Il avait 21 ans lors du bombardement de Namur. Apprenti coiffeur, il s'occupait d'une dame lorsque les explosions ont commencé. "J'étais en train de coiffer une dame. j'ai été projeté de l'autre côté de la pièce. Quand je me suis relevé, j'ai entendu des hurlements. Il y avait des gens valides qui demandaient des secours", confie-t-il.

Danillo se rue dehors pour aider ceux qui peuvent encore l'être. Il découvre alors la désolation qui s'est emparée de la ville. "Je me suis précipité vers la place d'Armes, où j'ai vu un spectacle incroyable. Des morts, des morts et des morts. Imaginez-vous la place d'Armes, de tous les côtés, des quatre côtés de la place, jonchée de morts. Surtout des morceaux, des bras, des jambes... Je ne peux pas le décrire, c'est indescriptible", se rappelle-t-il.

Je suis arrivé avec une petite charrette avec des bras

Par chance, Danillo est indemne. Il propose son aide et se retrouve rapidement à charger des membres humains sur une charrette pour déblayer les rues avant de les ramener à l'école Saint-Aubain. "Je suis arrivé avec une petite charrette avec des bras, et il y avait déjà un monticule. C'était incroyable", explique ce témoin, qui a aujourd'hui 96 ans.


Un sujet tabou à l'époque

Malgré la gravité de l'erreur commise par les Alliés, le bombardement est longtemps resté un sujet tabou. "Parce que c'est un bombardement des Américains, un bombardement allié. Alors que les Américains étaient nos libérateurs. Donc est-ce qu'on peut leur en vouloir? C'est une question délicate. Je pense que beaucoup de gens ont eu peur de passer pour étant du côté des Nazis en critiquant cette erreur", explique Richard Dessart, membre de l'ASBL Namur Initiative Citoyenne.

"Je pense que le temps est passé, le tabou s'est un peu levé. Et il y a de moins en moins de personnes aujourd'hui qui ont connu ce bombardement-là. Passé ce souvenir-là, c'est important pour que les gens n'oublient pas ce qui était l'une des catastrophes les plus tragiques qu'a connues Namur", ajoute-t-il.


Une plaque en mémoire des victimes inaugurée il y a seulement 5 ans

Il a d'ailleurs fallu attendre 2014 pour qu'une plaque commémorative soit inaugurée en mémoire de ce tragique événement.

Une cérémonie est prévue ce dimanche:

  • 14h: visites guidées (sur réservation).
  • 16h15: inauguration de deux tables didactiques qui servent de relais de mémoire, elles sont placées devant la parcelle où reposent les victimes des bombardements.
  • 17h: cérémonie commémorative au cimetière de Namur.

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