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Est-ce normal qu'un footballeur pro paie "moins de cotisations sociales qu'un éboueur": "La cohésion sociale que nous créons n’a pas de prix"

À quelques jours du coup d'envoi de la Coupe du Monde en Russie, un débat émerge dans notre pays. En Belgique, les footballeurs professionnels paient "moins de cotisations sociales qu'un éboueur" alors qu'en général, leurs salaires sont nettement plus élevés.

Est-ce normal ou peut-on parler de scandale ? Comment justifie-t-on cet avantage ? Pourquoi ne pas soumettre les footballeurs au même régime que toute la population belge ?

Sur le plateau de "C'est pas tous les jours dimanche" diffusée sur RTL TVI, invités et chroniqueurs ont exprimé leur point de vue quant à cet avantage qui suscite de nombreuses critiques. 


"Les temps ont beaucoup changé"

Pour Roel Deseyn, député fédéral et conseiller communal à Courtrai - CD&V, il est inconcevable de conserver un tel système. Selon lui, cette différence de traitement relève de l'inégalité. "Les temps ont beaucoup changé. On demande des efforts de presque tout le monde. On peut faire des efforts en tant qu’autorités publiques pour certains secteurs mais être si généreux, ce n’est plus de nos temps. Le système des cotisations sociales extrêmement basses a été conçu dans les années 70 dans un tout autre contexte, dans un temps où les primes étaient plutôt en nature", affirme-t-il. 

Aujourd'hui, le salaire fictif d'un joueur professionnel est estimé à 2.281 euros. Les cotisations dont ces joueurs sont redevables sont plafonnées à 868 euros par mois. Pourtant, le salaire fictif est environ 10 fois moins élevé que le salaire moyen, d'où la volonté de certains politiques d'augmenter le montant de leurs cotisations sociales. 

"Avec un salaire moyen, en première division de quelques 330.000 euros par an brut, je pense qu’il y a encore un peu de marges pour payer correctement les cotisations sociales. C’est ce que l’on attend de tous les Belges d’ailleurs", assure Roel Deseyn. 


"La cohésion sociale que nous créons n’a pas de prix"

Face à lui, Pierre François, administrateur-délégué de la Pro League, justifie un tel système. "Je représente un secteur qui a pour particularité de ne pas connaître de délocalisation, de ne distribuer aucun dividende. Enfin, nous sommes dans un secteur qui ne se résume pas à une activité économique", note-t-il. 

Pour argumenter de tels propos, Pierre François s'appuie sur un rapport réalisé par le consultant belge Deloitte. "Deloitte, a sorti un rapport qui met en évidence qui ne créons 3239 emplois et que nous avons la charge de 11.000 jeunes. Cette cohésion sociale que nous créons n’a pas de prix", précise-t-il sur le plateau de l'émission dominicale".


La Belgique a-t-elle les moyens de revenir sur ce système? 

Le journaliste Christophe Giltay revient sur les tenants et aboutissants d'un tel système. "La problématique de fond est surtout dans la concurrence avec les autres pays. Est-ce qu’on a les moyens dans un pays comme la Belgique de continuer à avoir un championnat de division 1 de bon niveau. Si on applique les mêmes règles de cotisations sociales ou d’impôts aux joueurs, ils vont aller jouer ailleurs. Derrière tout ça, il y sans doute un peu d’hypocrisie et de cynisme. On se voile un peu la face parce qu’on se doute bien que si ce système existe c’est parce qu’il y a d’autres causes", explique-t-il. 

L'administrateur-délégué de la Pro League Pierre François se dit prêt à "ouvrir le dialogue" tout en sachant que le débat est très sensible. "Il fut un temps où les hommes politiques se bousculaient pour se montrer accompagnant les club de football professionnels. Je l’ai vécu. Aujourd’hui, j’ai le sentiment, surtout du côté du nord du pays, que les choses sont inversées et qu’il devient plus populaire de vouloir s’en prendre à ce secteur en mettant en évidence des salaires qui sont la partie supérieure d’un iceberg. Il y a dans toutes les fédérations de tels salaires pour attirer. Je suis prêt à ouvrir le dialogue et justifier ce que nous donnons et ce que nous justifions pouvoir recevoir", conclut-il. 

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