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"Elephant Man" sur les planches, avec un duo de monstres sacrés

C'est un monstre sans maquillage, ni prothèse qu'invite à découvrir la pièce-événement de la rentrée parisienne, "Elephant Man", réflexion sur la monstruosité, la norme et le regard de l'autre, réunissant deux bêtes de scène, Joeystarr et Béatrice Dalle.

Pour leur première collaboration sur les planches, l'ancien couple à la ville s'est coulé dans le texte du dramaturge américain Bernard Pomerance (publié en 1977), mis en scène par David Bobée, pour qui Béatrice Dalle avait joué Lucrèce Borgia en 2014.

"Adapter et mettre en scène +Elephant man+ aujourd’hui, c’est tendre un miroir à notre époque, à ses dysfonctionnements, à ses violences symboliques", souligne le metteur en scène dans les notes d'intention.

"Les monstres (puisque par étymologie ce sont ceux que l’on +montre+) disent toujours quelque chose de leur époque, de son regard sur le monde et sur elle-même", affirme encore David Bobée, par ailleurs directeur du centre dramatique national de Normandie-Rouen.

D'abord caché sous des amas de couvertures, "son monstre" est joué par un Joeystarr à contre-emploi: fragile, hagard, claudiquant... Reste sa voix, vibrante, parfois rugissante.

Comme une manière de rappeler que la monstruosité est surtout dans le regard de l'autre, l'ancien rappeur de NTM n'a pas du tout le visage déformé, comme l'"Elephant man" de David Lynch au cinéma, et apparait souvent torse nu sur scène.

D'abord bête de foire, humilié et battu, son personnage, John Merrick, va être placé à l'hôpital par les soins du Dr Frederick Treves (interprété par Christophe Grégoire). Ce dernier va le soigner, tenter de l'entourer sans toujours admettre qu'il est un humain comme les autres.

L'entrée en scène à quasiment la moitié de la pièce de Béatrice Dalle, alias Madame Kendal, ajoute une dose de complexité... et de sensualité à ce conte cruel sur la différence. Ce personnage va s'éprendre de l'homme-éléphant, condamné à une mort inéluctable.

La deuxième partie de la pièce joue clairement sur la dynamique des anciens amants terribles que furent Joeystarr et Béatrice Dalle, pourtant accompagnés sur scène par une petite dizaine d'acteurs.

Le décor froid, évoquant à la fois l'univers hospitalier et carcéral confère une atmosphère atemporelle à la pièce, très éloignée du film éponyme de David Lynch, nommé huit fois aux Oscars, qui s'inscrit dans le Londres quasi-gothique de la fin du 19e siècle.

Reste une réplique fameuse revisitée par Joeystarr, rugissant et criant son désespoir dans une scène riche en émotion. La pièce se joue aux Folies-Bergère jusqu'au 20 octobre.

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