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"Folia", une folie hip-hop et baroque de Merzouki lance les Nuits de Fourvière

Depuis 20 ans et son "Récital" qui a fait le tour du monde, Mourad Merzouki fait dialoguer hip-hop et musique classique. Dans "Folia", qui fait l'ouverture des Nuits de Fourvière vendredi soir, le chorégraphe lyonnais joue avec les tarentelles italiennes.

Il explore l'univers baroque depuis 2014 et une commande du réseau culturel Banlieues d'Europe passée au Centre chorégraphique national de Créteil, qu'il dirige. Il s'agissait de créer un spectacle pour des danseurs et danseuses de hip-hop de plusieurs pays et après les avoir auditionnés, Merzouki se demandait comment les "bousculer".

Il rencontre alors Franck-Emmanuel Comte, chef de file du Concert de l'Hostel Dieu, ensemble lyonnais spécialisé dans le répertoire du 18e siècle. De leur collaboration naissent "7steps" et la curiosité du chorégraphe pour les tarentelles, ces danses et musiques traditionnelles du sud de l'Italie.

Pour préparer sa "Folia", à l'image des compositeurs baroques qui puisaient leur inspiration dans les ritournelles populaires, il est allé voir - sur les conseils du directeur des Nuits de Fourvière Dominique Delorme - "La Notte della Taranta" qui a lieu chaque été à Melpignano dans les Pouilles.

Une nuit durant, des milliers de personnes de tous âges y pratiquent la "pizzica", une tarentelle aux rythmes endiablés, associée depuis des siècles à un rituel de guérison des morsures d'araignées.

Merzouki dit avoir retrouvé des aspects du hip-hop "dans ces corps qui se meuvent jusqu'à l'épuisement". S'il ne voyait pas comment adapter ce folklore, il en a échantillonné les partitions, en y mêlant de l'électronique, pour composer une nouvelle bande-son avec Franck-Emmanuel Comte.

- Folie de l'Homme -

"Folia" rassemble 17 danseurs et danseuses - du classique sur pointes au hip hop en passant par la danse contemporaine - aux côtés de sept musiciens et d'une soprano derrière un voile. Avec toujours la même volonté de "créer des dialogues entre ces mondes et ces techniques".

Une ligne que Merzouki, 44 ans, poursuit depuis la première création de sa compagnie Käfig en 1998, "Récital", où six danseurs de hip-hop se frottaient aux sonorités du violon et du "talk box", appareil qui permet au musicien de faire prononcer des syllabes à son instrument. Dans "Boxe Boxe" (2010), il explorait les rapports entre le combat et la danse sur une musique jouée en live par le Quatuor Debussy, ensemble lyonnais à cordes.

Sur la scène du Grand théâtre de Fourvière, le spectacle s'ouvre sur le cosmos et un jeu de ballons-astres. La Terre finit par éclater mais la troupe s'accroche à un dernier lopin (gonflable)... "Ce n'est pas un spectacle écolo", souligne Merzouki, mais la folie de "Folia" est aussi "celle de l'Homme face au monde qui l'entoure". Elle s'exprime dans des mouvements proches de la transe, où l'on retrouve la tarentelle.

Quatre des artistes sont issus du centre chorégraphique Pôle Pik, fondé en 2009 à Bron, en banlieue lyonnaise, par Mourad Merzouki. "Ce sera leur première scène, et pas des moindres. C'est un pari mais si on ne leur donne pas l'opportunité de s'exposer, elle n'arrivera jamais", estime celui qui a découvert le hip-hop à la fin des années 1980 à la MJC de Saint-Priest avec son ami Kader Attou, qui dirige aujourd'hui le CCN de La Rochelle.

Malgré la polémique suscitée par le projet en 2015, il reste favorable à la création d'un diplôme d’État et a mis sur pied à Bron un programme de formation, Campus, pour "outiller" ceux qui aspirent à vivre de la discipline. Convaincu que "si le hip-hop a acquis sa force et sa singularité dans la rue, il a aussi sa place dans les théâtres".

Après les Nuits de Fourvière, "Folia" doit tourner en Espagne et Merzouki reviendra à Lyon en septembre pour la Biennale de la Danse avec une autre création, "Vertikal".

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