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A Arras, "L'Envol" accompagne les décrocheurs pour "repenser l’avenir plus sereinement"

Avec son nouveau spectacle, "Le Ciel n'a jamais été aussi proche de ton cœur" présenté à partir de mercredi à Arras, L'Envol, "centre d'art et de transformation sociale", concrétise son projet de réinsertion des jeunes "décrocheurs", qu'il souhaite voir essaimer au-delà du Pas-de-Calais.

"On va commencer par le Charleston". Sur le plateau, à l'heure des répétitions, ils sont six jeunes adultes sortis du système scolaire sans projet professionnel et dont le parcours personnel est souvent émaillé de ruptures familiales ou de procédures judiciaires.

De cette marginalisation, les encadrants de L'Envol, tous artistes professionnels, font un atout pour leur spectacle, afin de rendre à ces jeunes leur confiance en eux.

"D'habitude, partout où ils vont, on leur dit +ta vie pourrie, tu la laisses à la porte et tu viens travailler+", explique à l'AFP Perrine Fovez, metteuse en scène. "Ici, notre manière de fonctionner, c’est exactement l’inverse. Je veux absolument qu'ils viennent avec leur sac de problèmes, qu’importe le poids qu’il fait".

-"Société contre moi"-

Esther, 21 ans, sortira du dispositif fin novembre, après avoir pris part aux huit représentations. Victime d'une agression sexuelle il y a quelques années et après avoir déposé trois plaintes, elle était "accablée de problèmes juridiques" quand elle a rejoint la structure.

Mais elle considère cette expérience "comme un tremplin". Si elle n'a pas changé le cours de la procédure judiciaire, elle lui a "appris le contact avec les autres" et changé son regard sur "la société".

"J'ai toujours pensé que la société était contre moi", confie-t-elle. "Mais, à travers tout ce qui compose L'Envol, les financements de l'Etat, de la région, les intermittents, la société m'aide à évoluer depuis sept mois. Je ne pensais pas dire ça un jour".

- "Outils d’émancipation" -

Le dispositif, intitulé "Classe départ", et L'Envol, association qui l'englobe, ont été conçus par Bruno Lajara, comme des "outils d’émancipation et de lutte contre le repli sur soi".

"C’est comme si on faisait +reset+ ici. On dit +OK, tu as ta vie, tu as eu tes problèmes mais ici, tu es dans un sas, et ce sas va te permettre de repenser l’avenir un peu plus sereinement+", détaille celui qui est également directeur du théâtre L'Escapade, à Hénin-Beaumont.

Son objectif est de former "des citoyens" en leur "réapprenant à marcher, à parler, à écrire, à exprimer". Et ça marche : 75% des jeunes sortis des Classes départ (cinq à Arras depuis 2016, une à Béthune depuis 2018) enchaînent sur un travail ou une formation.

Le dispositif repose sur trois volets : un projet artistique donc mais aussi un "chantier citoyen" et la construction d'un "projet de vie". Le tout dans le cadre d'un contrat de service civique qui offre des avantages, dont une indemnité de 473 euros par mois, mais impose aussi de respecter certaines règles.

L'ensemble est "hyper bien pensé", juge Julia, 24 ans, sortie en juin de la Classe départ de Béthune. "Ça nous aide à avoir un cadre. Comme on est en service civique, on a des obligations via notre employeur et, pour se remettre dans la société, c'est important".

Lundi, une nouvelle Classe départ a ouvert dans l'agglomération lyonnaise et Bruno Lajara ne compte pas s'arrêter là. "Le but c’est d’ouvrir dans trois autres régions sur trois ans et aussi" outre-mer.

Dans cette démarche, il pourra compter sur le soutien financier et technique de la fondation "La France s'engage", présidée par François Hollande, qui a sélectionné L'Envol parmi ses 12 lauréats 2019.

"La meilleure façon de développer L'Envol, c’est de garder l’esprit d'une petite structure mais avec plus de moyens pour essaimer", a déclaré à l'AFP l'ancien président de la République. "C’est le contrat qu’on a passé entre la fondation et l'association pour qu'il y ait d'autres petites structures qui se créent sur ce modèle".

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