Accueil Actu

A Saint-Omer, le théâtre à l'italienne renaît après 45 ans de sommeil

Pendant 45 ans, nombre d'habitants de Saint-Omer (Pas-de-Calais) ont oublié que se nichait, au coeur de l'hôtel de ville, un théâtre du XIXe siècle. Sa réouverture parie aujourd'hui sur l'attractivité culturelle de la région.

Baptisé "Le Moulin à café", en référence à sa forme cubique coiffée d'un dôme, le bâtiment de style néoclassique trône depuis 1840 sur la place centrale de la sous-préfecture.

Machinerie ancienne, étagement en balcons, fauteuils en velours: à l'intérieur, le décor reprend les codes du théâtre à l'italienne. Du plancher incliné aux dorures du plafond, d'où pend un imposant lustre à pampilles.

Classé monument historique, le théâtre avait fermé ses portes en 1973, ne répondant plus aux normes de sécurité. Une décision "difficile car c'est un lieu de vie très fort qui a disparu brutalement. Tous les Audomarois y ont "des souvenirs émus", rappelle à l'AFP le maire de Saint-Omer, François Decoster.

Si les spectacles ont déserté l'édifice, il avait continué de vivre en accueillant les services municipaux. Mais dès les années 1970, les projets de réouverture successifs butent sur des questions de cofinancement, le plongeant dans un long sommeil.

"La ville ne pouvait pas porter seule un tel projet", confirme Philippe Queste, responsable du label Pays d'art et d'histoire.

- Offre culturelle -

Au terme de décennies de tâtonnements, la solution est finalement trouvée en 2014: la réouverture doit s'accompagner d'une offre culturelle à l'échelle du territoire.

"Jusque-là, les lieux et les actions culturels étaient séparés. Il fallait une coordination la plus poussée possible de l'action culturelle qui s'adresse à tous les habitants de l'agglomération", explique M. Decoster, également vice-président de la région Hauts-de-France délégué à la culture.

Petite ville de 14.000 habitants, Saint-Omer a ainsi vu la naissance d'un festival de jazz en 2014 et le développement de son conservatoire en 2015. Les responsables locaux misent sur cette transformation pour façonner l'attractivité culturelle de cette zone à dominante industrielle et rurale.

"Nous ne sommes pas allés demander des sous, on a proposé une adhésion à un projet dans lequel les cofinanceurs se sont naturellement retrouvés", souligne M. Decoster.

- "Attraction de l'époque" -

Au yeux des habitants, le théâtre conserve une dimension émotionnelle. Une association - Les amis du théâtre de Saint-Omer - a même vu le jour en 2012 pour accompagner sa renaissance.

"Beaucoup associent ce théâtre à leur jeunesse", confie à l'AFP son président, François Mulet. "C'était l'attraction de l'époque, lorsque les grandes vedettes, comme Luis Mariano, venaient s'y produire."

La population a d'ailleurs contribué aux efforts de financement: aux investissements publics et privés se sont ajoutés près de 100.000 euros de mécénat populaire, pour un coût total de 7 millions d'euros.

Outre les difficultés usuelles, le chantier a fait face à un défi: allier moderne et ancien.

"L'architecte a ajouté des éléments scénographiques d'aujourd'hui, tout en les cachant pour respecter le patrimoine", explique Frédéric Domenge, directeur de la Barcarolle, établissement public de coopération culturelle.

Régies son et vidéo, console lumière et caméra se sont discrètement greffées à cette salle de 364 places.

Preuve de l'effervescence autour de cette réouverture, les 2.000 billets des deux premières visites publiques, samedi et dimanche à l'occasion des Journées du Patrimoine, se sont arrachés en quelques jours.

Le 11 janvier, "Le Cid" de Corneille inaugurera la reprise des représentations. 46 ans jour pour jour après la fermeture du théâtre… avec la même pièce.

"C'est un clin d'oeil, mais ce sera une version revisitée", note, amusé, Frédéric Domenge.

À lire aussi

Sélectionné pour vous