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Banksy: street art, mystère et marque de fabrique

Ses oeuvres disséminées sur les murs, de Londres à Gaza, font les délices d'Instagram et des passionnés de street art. Tout en dispensant un message politique, l'artiste Banksy, qui vient de sévir à Paris, fascine en entretenant le mystère sur sa personne et en ayant construit sa mythologie.

"En fait, ce n'est pas très important que ce soit réellement de lui ou pas, le tout c'est que l'effet Banksy fonctionne", observe l'historien de l'art Paul Ardenne, interrogé après l'"apparition" à Paris de plusieurs oeuvres du plus célèbre street artist, mais aussi du plus secret.

L'identité de Banksy est un mystère bien gardé depuis ses débuts dans les années 90. De lui, on connait sa nationalité (britannique), sa ville d'origine (Bristol où il a crée un parc d'attraction parodique), sa page Instagram et son site internet où il met en ligne ses oeuvres, sans plus de commentaires.

En revanche, personne ne connaît sa véritable identité ou n'a vu en photo l'artiste qui donne des interviews au compte-gouttes. Des rumeurs persistantes affirment qu'il ferait partie du groupe Massive Attack, également originaire de Bristol, mais sans que cela ait été prouvé.

"C'est la marque de fabrique de Banksy. Au-delà du ressort marketing, c'est aussi une façon de dire +regardez ! Avec une touche d'anonymat, comme par hasard ça vous intéresse plus+", souligne Magda Danysz, spécialiste du street art.

"Il y a cette fascination de faire tomber un masque mais on serait très déçus si on avait sa photo. En fait, on n'a pas envie de savoir, c'est comme une bonne recette" avec un ingrédient mystère, glisse la galeriste qui travaille entre Paris et Shanghai.

N'empêche, quand une oeuvre de Banksy apparaît sur un mur, la nouvelle se répand comme une traînée de poudre sur les réseaux sociaux transformant les fans en chasseurs au trésor, comme à New York en octobre 2013 où il a dessiné presque une oeuvre par jour pendant un mois.

- Du Bataclan à porte de la Chapelle -

Comme d'autres street artists, Banksy procède souvent par "phases d'invasion" en disséminant plusieurs oeuvres dans une même ville, avec une attention spécifique portée au lieu et à sa symbolique.

Dans la capitale française, c'est sur une porte arrière du Bataclan, cible d'un attentat en novembre 2015, qu'il a dessiné une silhouette au visage triste. Porte de la Chapelle, où campaient pendant des mois de nombreux migrants, il a dessiné une fillette tentant de recouvrir une croix gammée avec de la peinture rose. Une oeuvre qui a depuis été dégradée.

"Le génie de Banksy, c'est qu'il intervient pile au moment où on a eu le phénomène du (navire humanitaire) Aquarius, pile à un enjeu politique crucial pour l'Europe. Donc, comme toujours, au bon endroit et au bon moment. C'est ce qui est assez fou dans son travail", estime Nicolas Laugero-Lasserre, collectionneur de street art, à l'origine du musée "Art 42" dans le nord de Paris.

Un enthousiasme que ne partage pas Paul Ardenne, dénonçant un "discours mielleux". "Ce genre de +tag+ sur la poussée des extrêmes, la progression de l'extrême droite, des radicalismes néo-nazis, il y en a partout", lance-t-il. "Vous avez tous les clichés: l'enfant, la pureté, les grands méchants blancs..."

D'autres rappellent encore que ce style facilement reconnaissable est aussi ce qui fait la patte de Banksy et permet de distiller ses messages à visée politique.

Concernant les oeuvres parisiennes, "il a peut-être envoyé des assistants. Il y a peut-être des gens qui font les oeuvres à sa place et ça lui convient" comme ça, estime Magda Danysz, mettant l'accent sur la démarche artistique hors des sentiers battus.

"Au bout du compte, ce qui est intéressant c'est que l'on va regarder ces dessins beaucoup plus que s'ils étaient d'un artiste lambda", conclut Paul Ardenne.

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