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Cinéma d'animation: encore trop peu de femmes au générique

Moins nombreuses, moins payées et avec moins d'accès aux métiers techniques: comme dans le reste du cinéma, la parité est loin d'être acquise pour les femmes dans l'animation, même si le vent du changement souffle, comme le montre la charte pour la diversité signée au Festival d'Annecy.

En pleine vague MeToo, les femmes ont été sur le devant de la scène à Annecy, avec l'organisation lundi des deuxièmes Rencontres internationales des femmes dans l'animation, initiées par les associations Women in Animation et Les Femmes s'animent.

"On se rend compte cette année, avec tout ce qui s'est passé, qu'une page a été tournée", a déclaré à l'AFP Corinne Kouper, présidente et fondatrice des Femmes s'animent. "Il y a une prise de conscience qui s'opère".

Dans la foulée du Festival de Cannes, Annecy a signé mardi une charte en faveur de la parité dans les festivals de cinéma, initiée par le collectif français 5050 pour 2020.

Sur les 740 films primés à Annecy depuis 1960, seuls 20% ont été réalisés ou co-réalisés par des femmes. Et cette année, seulement 20% des longs métrages en sélection officielle sont féminins.

"Les choses changent", mais "elles n'évoluent pas aussi vite qu'on voudrait", souligne le directeur artistique du festival, le Canadien Marcel Jean.

"Ce qui est fou, c'est que quand on regarde ce qui se passe aux Etats-Unis, beaucoup de personnes en situation de pouvoir dans les grands studios sont des femmes", ajoute-t-il. "C'est du côté de la réalisation que les femmes sont encore très rares".

- 6% de réalisatrices -

Le chemin semble en effet encore long. En France, selon une étude publiée cette semaine par 5050 pour 2020, seules dix femmes ont réalisé des longs métrages d'animation entre 2003 et 2017, soit 6% de réalisatrices.

Un chiffre bien en deçà de celui du cinéma français en général (23% de réalisatrices entre 2006 et 2016).

Encore plus parlant, sur 8% de longs métrages réalisés par des femmes entre 2003 et 2017, seuls 2% l'ont été par une ou plusieurs femmes sans co-réalisateur masculin.

La situation semble cependant s'améliorer: en 2017, sur cinq films d'animation agréés par le Centre national du cinéma (CNC), deux sont entièrement réalisés par des femmes, et un en association avec un homme.

"D'après les études, dans les écoles il y a presque la parité, parfois plus de filles. Et après dans le milieu ça s'étiole, et elles sont de moins en moins nombreuses", relève Eléa Gobbé-Mévelec, co-réalisatrice avec Zabou Breitman des "Hirondelles de Kaboul", qui devrait sortir début 2019.

- Différences de budget -

Sous-représentées dans les métiers techniques, de chef animateur à infographiste effets visuels en passant par storyboarder, les femmes doivent également faire face à des inégalités salariales: pour les emplois permanents (CDI ou CDD), la différence de salaire annuel brut moyen est de 5% pour les cadres - qui sont à 63% des hommes - et de 10% pour les non cadres, selon des chiffres Audiens cités par 5050 pour 2020.

Les budgets moyens des films réalisés par des femmes sont aussi moins élevés (4 millions contre 6,9 millions).

"Si sur un long métrage à un million d'euros, on commence à consentir à prendre une femme réalisatrice, on va avoir plus de difficultés à faire confiance à une femme sur un film à 10 millions", déplore Corinne Kouper.

Pour la réalisatrice irlandaise Nora Twomey, en compétition à Annecy avec "Parvana, une enfance en Afghanistan", nommé aux Oscars, "c'est tragique que l'on doive (...) pointer du doigt continuellement le fait qu'il y ait une telle inégalité".

"C'est la responsabilité de tous dans le secteur de s'assurer que les femmes sont soutenues pendant toute leur carrière", estime la réalisatrice de 46 ans.

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