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D'Akira à Zep: 50 ans de succès pour Jacques Glénat

L'éditeur de BD Jacques Glénat peut se targuer de n'avoir manqué aucun festival d'Angoulême. Mieux, il est le seul éditeur à avoir été récompensé par le prix du meilleur éditeur de BD décerné lors du 1er festival d'Angoulême en 1974.

L'éditeur, âgé de 66 ans, en rit encore. "C'est un prix qui n'a été donné qu'une fois car ça a fait tellement d'histoires avec les autres éditeurs que le festival a décidé de le supprimer", raconte-t-il. "Mais j'ai gardé le petit Alfred (l'ancêtre des Fauves, la récompense du festival ndlr)", ajoute-t-il malicieusement.

À l'époque, "le meilleur éditeur de BD" avait publié... trois albums. Aujourd'hui, la maison d'édition qui porte son nom est riche d'un catalogue d'environ 12.000 titres dont notamment les albums de "Titeuf" le garnement imaginé par Zep mais aussi ceux de l'Italien Milo Manara ou de la Japonaise Rumiko Takahashi qui vient de remporter le Grand prix de la ville d'Angoulême pour l'ensemble de son œuvre.

L'éditeur possède la licence Disney, une de ses plus grandes fiertés. "Je suis venu trouver les gens de Disney avec mes exemplaires du journal de Mickey de 1934... Ils ne savaient même pas que ça existait à l'époque... J'ai remporté le marché haut la main grâce à ma passion", se plaît-il à raconter.

Glénat, une des dernières grosses maisons d'édition indépendantes, est le 14e plus important éditeur français, selon le classement annuel de l'hebdomadaire professionnel Livres Hebdo. En 2018, le chiffre d'affaires de la maison a progressé de 7,3% dans un marché de l'édition en berne.

A Angoulême, Jacques Glénat célèbre avec fierté le 50e anniversaire de sa maison qui outre la BD s'est ouverte (un peu) aux livres sur la montagne, le vin, la mer, la gastronomie. "Mais le cœur du métier reste la BD", insiste-t-il.

- La faute de la grand-mère -

"Tout est de la faute de ma grand-mère", raconte l'éditeur aux cheveux blancs et les yeux pétillants derrière de fines lunettes.

La "faute" de la grand-mère est d'avoir abonné son petit-fils aux hebdomadaires de BD comme Le Journal de Mickey, Spirou, Vaillant, Pilote, le journal Tintin... "Pour moi ce rendez-vous hebdomadaire c'était un cadeau de Noël chaque semaine", se souvient-il.

"C'était une telle passion que je me suis mis à acheter les albums, puis à avoir envie d'en parler avec d'autres".

Grenoble où il vit et où se trouve toujours (dans un ancien couvent) le siège social de Glénat est trop petit pour partager cette passion dévorante. Fils de médecin, le jeune Jacques Glénat préfère Buck Danny aux études (après le bac, il hésite entre pharmacie, architecture et anglais) et se lance dans la création d'un fanzine pour "amateurs éclairés" baptisé "Schtroumpf" dont le premier numéro paraît en septembre 1969.

Le fanzine où l'on ne parle que de BD paraît sur un méchant papier ronéoté ("j'utilisais la ronéo de la fac la nuit pour imprimer mes ramettes de papier"). La fameuse grand-mère est bien sûr de la partie aidant à assembler les feuilles et à les agrafer puis à les mettre sous enveloppes. Le succès est au rendez-vous. Les abonnés se multiplient.

En 1974, il arrête définitivement ses études ("je ne poursuivais pas mes études, ce sont les études qui me poursuivaient") pour fonder (avec l'argent des parents et évidemment de la grand-mère) la "SARL Jacques Glénat" qui publie ses premiers albums de BD dont celle d'une certaine Claire Brétecher, alors jeune inconnue. "Je devenais éditeur sans le savoir", dit-il.

La suite c'est l'histoire d'une "success-story" à la française. Jacques Glénat prend régulièrement le train de nuit Grenoble-Paris pour apporter les paquets de BD dans des librairies parisiennes ("dont la librairie Dupuis boulevard Saint-Germain que j'ai rachetée plus tard", raconte-t-il avec gourmandise).

Les albums se vendent comme des petits pains. Avant tout le monde, Jacques Glénat se rend au Japon, en 1989, où il achète "Dragon Ball" (30 millions de volumes vendus), avant "Akira" deux ans plus tard. La maison est devenue le premier diffuseur de manga en France et publie notamment "One Piece" le manga le plus populaire.

Jacques Glénat, toujours aussi passionné, ne compte pas lâcher son affaire même s'il prépare sa fille aînée Marion à lui succéder un jour.

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