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De l'usine à l'Olympia, le parcours hors du commun d'Yves Jamait

Enfant, Yves Jamait s'imaginait déjà sur scène. "Mais dans le milieu d'où je viens, ça ne devait rester qu'un rêve", se remémore le chanteur musicien compositeur, qui s'affirme en résonance avec les "gilets jaunes" avant un concert à Albi.

Deux disques d'or, des centaines de milliers d'albums vendus et des salles pleines à l'Olympia, au Grand Rex, la Cigale... Le rêve est devenu réalité, sur le tard.

"J'ai commencé à travailler à 15 ans, comme apprenti cuisinier". Il sera également aide charcutier, animalier de laboratoire ou ouvrier dans le bâtiment, entre autres.

"Tous ces petits boulots où on est au plus bas de l'échelle", dit le Dijonnais de 58 ans aux cheveux grisonnants mais porté par une énergie débordante.

Le déclic pour changer de vie intervient dès l'adolescence.

"J'étais cuisinier dans une colonie de vacances et je partageais ma chambre avec un musicien" qui l'ouvre à un univers musical différent "de Johnny et Michel Sardou" et lui apprend deux accords de guitare.

A la même époque, il découvre Maxime Le Forestier, qui devient l’un de ses artistes de référence et dont les textes, un "dictionnaire" inépuisable, lui inspirent ses premières rimes.

A partir de ce moment-là, plus rien n'arrêtera l'histoire d'amour entre Yves Jamait et les mots, la musique. Même s'il attendra la quarantaine pour se lancer.

- Mots et maux -

Ce sont des rencontres, de bonnes étoiles, qui le poussent à sauter le pas, créer un groupe, et tourner définitivement la page des boulots alimentaires.

Sur scène, loin des plateaux télé, des ondes radio ou des réseaux sociaux, le public est conquis et ne le lâchera plus au fil de ses sept albums.

Avec une profondeur bouleversante, Yves Jamait chante la rudesse de l’existence, la violence sociale, l'amour décliné à l'infini, enveloppant toujours ses mots -et maux- de tendresse et poésie.

"Je crois qu'on a seulement conscience du froid quand on a ressenti le chaud. Si je veux faire rire, il faut que je fasse pleurer, et vice versa, j'aime bien jouer avec ça", s'amuse le chanteur pour qui la "vie est une tragédie" au cours de laquelle il faut savoir provoquer le destin pour trouver sa voie.

Sa voix à lui, dans nombre de ses chansons, résonne étrangement aujourd'hui avec celle des "gilets jaunes", même s'il dit n'avoir "pas eu le courage d'aller risquer de (s)e faire enlever un œil ou une main" aux manifestations.

"Le matin, quand je me réveille/ J'ai du mal à quitter Morphée/ Pour aller justifier la paye/ Que mon patron peut s'octroyer/ Ça n'est pas vraiment que je tienne/ A continuer de l'engraisser/ Mais aussi petite soit la mienne (de paye)/ J'en ai besoin pour bouffer", chantait-il dans "Y en a qui" en 2003.

"Ça m'a scié de constater l'étonnement des gens" face à la naissance de ce mouvement en novembre dernier, "mais ils vivent où? Sur Mars?, s'indigne-t-il, assurant être "profondément avec les gilets jaunes".

Dans la salle comble du Grand théâtre d'Albi (Tarn), où il a ouvert mardi la 23e édition du festival Pause Guitare Sud de France, les spectateurs sont conquis.

De sa voix rocailleuse, le chanteur les hypnotise avec "Dimanche (caresse-moi)", la chanson phare de son premier album.

Dans son dernier album, "Mon totem", Yves Jamait reste un indigné, mais invite son public à un voyage plus introspectif, dans les profondeurs de ses nuits d'enfance, dans ses blessures et errances, rendant un hommage à ceux qui comptent: "ma tribu, mon totem".

"Je fais toujours mes albums comme si ça allait être le dernier. J'ai encore beaucoup de choses à dire, mais à l'aube de la soixantaine, on peut être coupé dans l'élan par la vie", sourit-il.

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