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Débarquement en Provence: le rôle central des bataillons d'Afrique

Tirailleurs sénégalais et algériens, goumiers et tabors marocains, pieds-noirs, marsouins du Pacifique et des Antilles: les bataillons venus d’Afrique et de l'empire colonial ont joué un rôle crucial lors du débarquement en Provence en août 1944.

- Une armée reconstituée en Afrique -

L'armée française, éclatée après la débâcle de 40, se reconstitue en Afrique dans les mois qui suivent le débarquement anglo-américain en Afrique du nord de novembre 1942.

Les Forces françaises libres (FFL), qui comptent dans leur rang un fort pourcentage de coloniaux, essentiellement d'Afrique noire, fusionnent avec l'Armée d'Afrique (en Algérie, en Tunisie et au Maroc) restée jusque là fidèle à Vichy. S'y ajoutent des évadés de France.

Dirigée par le général de Lattre de Tassigny sous le nom d'armée B (avant de devenir la 1ère armée), elle est composée de cinq divisions d'infanterie et deux divisions blindées, équipées par les Américains à partir du printemps 1943.

C'est "une armée profondement originale comme la France n'en a jamais connue, une armée qui compte moitié d'Européens et moitié de musulmans et de coloniaux", écrit Philippe Masson dans son "Histoire de l'armée française de 1914 à nos jours".

Fin 1944, elle compte près de 600.000 hommes, dont deux-tiers venus d'Afrique du Nord, parmi lesquels 176.000 "Européens" et 233.000 "musulmans", selon la dénomination de l'époque.

- Un rôle déterminant -

Après que certaines de ses unités se sont illustrées pendant la campagne d'Italie, l'armée B joue un rôle essentiel lors du débarquement en Provence.

Alors que seuls quelques hommes du commando Kieffer étaient engagés au

côté des troupes américaines, britanniques et canadiennes lors du débarquement en Normandie du 6 juin 1944, elle est la première à participer, sous les couleurs françaises, à une opération d'envergure menée par les Alliés.

Le 15 août, peu après minuit, les premiers soldats français des commandos d'Afrique escaladent la falaise du Cap Nègre, tandis que le groupe naval d'assaut français est décimé à la pointe de l'Esquillon (ouest de Cannes), minée.

Le lendemain, l'armée B débarque à Cavalaire. "Sur les navires, éclate la +Marseillaise+ la plus poignante qu'on ait jamais entendue", écrira de Lattre.

La majorité des plus de 250.000 hommes qui participent à la libération de la Provence sous les couleurs de la France foulent la terre de la métropole pour la première fois.

Avec plusieurs jours d'avance sur le calendrier prévu, ils libèrent Toulon, le 27 août, et Marseille le lendemain, avant de remonter la vallée du Rhône et de faire la jonction avec la 2ème Division blindée venue de Normandie, le 12 septembre en Bourgogne.

- Des "indigènes" longtemps oubliés -

"Sans son empire, la France ne serait qu'un pays libéré. Grâce à son empire, la France est un pays vainqueur", lance le député de Guyane Gaston Monnerville au lendemain de la victoire contre l'Allemagne.

Les troupes coloniales de l'Empire français ont payé un lourd tribut: de 1940 à 1945, 55.000 soldats tunisiens, marocains, algériens et africains de l'Afrique occidentale française (AOF) et de l'Afrique équatoriale française (AEF) sont morts.

Leur histoire a pourtant longtemps été occultée -- les troupes africaines ayant été retirées du terrain dès l'hiver 44-45 -- et ces soldats "indigènes" moins bien traités que leurs frères d'armes.

En 1959 au moment de la décolonisation, un décret gèle le montant des pensions des ressortissants des anciennes colonies ayant servi dans l'administration ou l'armée française.

En 2002, le gouvernement français débloque partiellement la revalorisation de la pension de ces soldats "oubliés". Mais celle-ci, calculée en fonction du niveau de vie du pays de résidence, reste inférieure à celle des combattants français.

Il faudra encore huit ans pour que le président Nicolas Sarkozy annonce l'alignement des pensions de tous les anciens combattants quels que soient leur nationalité et leur lieu de résidence.

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