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Devant son public parisien, Cantat dénonce les "censures"

C'est un Bertrand Cantat en voix et remonté contre les "censures", les "intimidations", les "journalistes" et "Bolloré", propriétaire de l'Oympia, qui a donné jeudi soir son unique concert parisien, précédé d'une manifestation d'une poignée de féministes.

Ce concert électrique et puissant a été donné dans un Zénith à moitié rempli (3.000 spectateurs environ), après l'annulation des deux concerts prévus en mai à l'Olympia, la salle craignant des "risques sérieux de troubles à l'ordre public".

L'ex-leader de Noir Désir, condamné pour la mort en 2003 de sa compagne Marie Trintignant, s'en est pris à la presse après seulement deux chansons.

"Merci à vous d'être là malgré tout", lâche-t-il, avant de s'en prendre à "ceux qui ne sont pas là pour des bonnes raisons". Visant les journalistes, le chanteur de 54 ans ajoute : "Vous avez quelque chose contre moi. Si certains sont en train de jubiler, il y a aucune limite à quel point je vous emmerde..."

Dès le morceau suivant, il attaque la famille "Bolloré", propriétaire de Vivendi et donc à la fois de Barclay, sa maison de disques, et de l'Olympia. Plus tard, il y revient : "Bolloré, que j'emmerde...", glisse-t-il sous les applaudissements, semblant rompre les ponts avec le producteur historique de Noir Désir.

- "Best of" Noir désir -

Ses gentillesses, il les réserve pour le public, où les femmes sont aussi nombreuses que les hommes : "Je vous aime, ça c'est sûr", dit-il avant d'ajouter plus tard : "Merci d'être là, malgré toutes les intimidations, toutes les censures, toute la saloperie depuis octobre...."

Cantat, reparti sur les routes depuis mars, pour la première fois sous son seul nom après le succès de la tournée en 2014 avec le groupe Détroit, vide son sac. Face à un public acquis à la cause d'un rockeur toujours aussi impressionnant sur scène, soutenu avec efficacité par cinq musiciens.

La seconde partie du show, aux airs de "best of" de Noir Désir ("Tostaky", "Ici Paris", "L'homme pressé", "Marlène", "Comme elle vient"), met la salle en ébullition. Et rend visiblement heureux un chanteur qui s'éclipse au bout de deux heures sur un énigmatique "Merci pour tellement d'années..."

Ce concert parisien constituait l'un des temps forts de cette tournée entamée en mars, marquée par des manifestations et annulations, notamment des concerts prévus en festivals.

Devant le Zénith, comme devant d'autres salles auparavant, des organisations de défense des droits des femmes avaient appelé à un rassemblement, qui n'a finalement réuni qu'une quinzaine de manifestants. Certains brandissaient des banderoles comme "Pas d'honneur pour les tueurs" ou "Marie Trintignant ne sera plus jamais applaudie", d'autres des photos de l'actrice morte sous les coups de son compagnon.

"On ne peut pas dissocier l'homme de l'artiste puisque l'oeuvre même d'un artiste, il y met de sa personne", a estimé Marion Georgel, une porte-parole de l'association.

- "On a le droit" -

"Il a le droit d'être là, et nous aussi on a le droit !", a pour sa part indiqué Gaëlle, 40 ans, une fan de longue date.

"Je pars du principe que le droit à l'oubli c'est important. C'est son métier de chanter, c'est ça qu'on oublie", renchérit Camille, 28 ans, pour qui le voir en concert "n'empêche pas d'être féministe".

"Je n'ai aucune raison juridique d'empêcher Bertrand Cantat de chanter", rappelait Daniel Colling, le patron du Zénith. Lequel, en tant que responsable du Printemps de Bourges, avait programmé le rappeur Orelsan en 2009 quand d'autres festivals y avaient renoncé suite à des textes jugés misogynes.

Libéré en 2007 après avoir purgé plus de la moitié de sa peine de huit ans, le chanteur bordelais a progressivement repris son activité artistique à partir de 2010.

Malgré le succès de la tournée avec Détroit il y a quatre ans, la sortie de son album solo, fin 2017, s'est faite sur fond de polémique, à la suite d'une couverture des Inrocks parue en pleine tempête Weinstein.

Une "une" dont Cantat s'est excusé sur Facebook. Dans ce message, il évoquait aussi son "droit à exercer (son) métier", tout en "renouvelant" sa "compassion" à la famille et aux proches de Marie" Trintignant.

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