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Nantes commémore 100 ans de jazz en Europe

Nantes commémore le centenaire du premier concert de jazz sur le sol européen, donné chez elle le 12 février 1918 par l'orchestre du 369e régiment d'infanterie américain, les Harlem Hellfighters, et son chef, le lieutenant James Reese Europe, auquel un hommage militaire sera rendu lundi.

Cette cérémonie d'hommage, suivie du dévoilement d'une plaque commémorative, se tiendront en présence de Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des Armées, et de trois petites-filles de l'ex-"roi du jazz" James Reese Europe, avant que ne soit joué un "concert du siècle", exactement 100 ans jour pour jour après celui donné au Théâtre Graslin de Nantes.

Le jazz, qui s'appelait encore "jass", a fait irruption en France après l'entrée en guerre des États-Unis en avril 1917 et l'arrivée sur son sol du corps expéditionnaire américain, dès le 26 juin, dans le port de Saint-Nazaire.

Musicien de renom, surnommé le "roi du jazz", le lieutenant James Reese Europe a déjà 14 ans de carrière derrière lui quand il débarque le 1er janvier 1918 à Brest avec l'orchestre qu'il a mis sur pied, composé de quarante musiciens "parmi les meilleurs de l'époque", explique Matthieu Jouan, commissaire général des commémorations "100 Ans Jazz".

Né en Alabama en 1880, star du fox-trot et du ragtime, James Reese Europe crée en 1910 le premier syndicat de musiciens Afro-Américains, le Clef Club, et son orchestre symphonique de 125 musiciens sera le premier orchestre noir américain à jouer, deux ans plus tard, sur la scène du Carnegie Hall, à New York.

En France, le lieutenant Reese Europe est "le premier officier Afro-Américain à commander des troupes dans un assaut de guerre", indique M. Jouan.

- Actes de bravoure -

Intégré au 369e régiment d'infanterie, l'un des quatre régiments de soldats noirs américains victimes de ségrégation ayant combattu sous commandement français, l'orchestre de big-band alterne montées au front et concerts, pour distraire les troupes à l'arrière.

Le premier concert public du "Hell Fighters Band" est donné le 12 février 1918, au Théâtre Graslin, lors d'une soirée de gala organisée par le maire de Nantes, Paul Bellamy. Aucune photographie, mais un programme et des articles de presse attestent de ce premier concert et de cette musique "qui a renversé la France". "Ça a été ensuite la folie générale partout où il est passé", à Tours, Aix-les-Bains ou Paris, selon Matthieu Jouan.

Le 369e régiment accomplira plusieurs actes de bravoure. Il a notamment reçu la Croix de guerre et 171 de ses hommes ont été décorés de la Légion d'honneur pour avoir libéré le village de Séchault, dans les Ardennes, en septembre 1918, où un monument leur est dédié.

Blessé, James Reese Europe composera l'un de ses plus célèbres morceaux, "One Patrol in no man's land", sur son lit d'hôpital. Il connaîtra une fin tragique: rentré du front en héros, il meurt lors d'une tournée, le 9 mai 1919, d'un coup de couteau fatal porté au cou par un batteur de son orchestre.

"La presse américaine titre +Le roi du jazz est mort+. C'est le premier Afro-Américain à avoir des funérailles publiques à New York", raconte Matthieu Jouan. "En 1919, James Reese Europe meurt et trois jeunes explosent: Duke Ellington, Louis Armstrong, Sidney Bechet. Il est oublié pendant près d'un siècle", ajoute le commissaire de "100 Ans Jazz".

Cette commémoration, labellisée par la Mission du centenaire de la Première Guerre mondiale, proposera jusqu'au 11 mars concerts, conférences, et une exposition, "La guerre du jazz".

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