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Pablo Milanes, voix de la révolution cubaine, avant de s'en éloigner

Le chanteur et compositeur cubain, Pablo Milanés, décédé mardi à Madrid à l'âge de 79 ans, avait soutenu la révolution de Fidel Castro à ses débuts, avant de s'en éloigner tout en maintenant par sa musique un lien indéfectible avec son public à Cuba.

Lors d'un concert particulièrement émouvant à La Havane en juin, les quelque 10.000 spectateurs avaient repris en choeur l'un après l'autre ses plus grands succès, tels que "Yolanda" et "Vivir".

Après trois ans sans venir à Cuba, le chanteur à la santé fragile et qui se déplaçait avec difficulté, avait renoué avec son public pour ce récital qui avait eu aussi un goût d'adieu.

"J'ai toujours dit que vous étiez mon meilleur public (...) mais vous êtes vraiment allés trop loin", avait lancé "Pablito", comme il était connu à Cuba, devant des milliers de lampes de téléphones portables allumées pour accompagner ses chansons.

A l'annonce de son décès, ses fans lui ont rendu hommage sur les réseaux sociaux. "Tu feras toujours partie de la bande sonore de ma vie!! Bon voyage génie", a ainsi écrit un admirateur sur Twitter.

Né le 24 février 1943 à Bayamo, dans l'est de Cuba, avant que sa famille ne déménage à La Havane, Pablo Milanés avait commencé sa carrière dans les années 1960.

D'abord adepte du genre "feeling", un style musical aux thématiques romantiques influencé par le jazz nord-américain, le jeune chanteur se tourne ensuite vers la chanson à texte.

Il rejoint ensuite Silvio Rodriguez dans les débuts de la Nueva Trova, ce genre musical fondé sur des textes poétiques et engagés surgi dans la foulée de la révolution cubaine de 1959 et du mouvement mondial de la "folk-music".

- "Ile infinie et terre ferme" -

Admirateur de l'idéal révolutionnaire, il connaît des désillusions, notamment après son passage à 23 ans dans une "Unité militaire d'aide à la production" (UMAP), camp de travail pour homosexuels, religieux et autres Cubains considérés comme déviants.

Après les manifestations historiques de juillet 2021 à Cuba, où des milliers de personnes étaient descendus dans les rues aux cris de "Nous avons faim", "Liberté" et "A bas la dictature", Pablo Milanés avait vivement critiqué le gouvernement.

"Il est irresponsable et absurde de blâmer et de réprimer un peuple qui a fait des sacrifices et tout donné pendant des décennies pour soutenir un régime qui, au final, ne fait que l'emprisonner", avait-il déploré.

Pablo Milanés a enregistré des dizaines d'albums, créé des musiques de films et mis de nombreux poèmes en musique.

Ce grand admirateur du compositeur français Michel Legrand (1932-2019) -- il racontait avoir vu une quinzaine de fois le film "Les parapluies de Cherbourg" (1964) -- a reçu deux Grammys latinos en 2006 (meilleur album) et en 2015 (Prix d'excellence musicale).

Marié cinq fois et père de sept enfants, il vivait depuis 2017 à Madrid où il était soigné pour une maladie "onco-hématologique".

Il avait une voix "d'île infinie et de terre ferme (...) douce et en même temps puissante", disait de lui José Maria Vitier, pianiste, compositeur et son proche collaborateur.

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