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Yvette Horner, reine de l'accordéon et des bals populaires

"L'accordéon, c'est ma religion", disait Yvette Horner, décédée lundi, musicienne aussi virtuose qu'enthousiaste qui a toute sa vie défendu avec passion le piano à bretelles, capable de "tout jouer".

"Je ne veux pas être compartimentée dans un style. Le paso-doble, le bal musette. Non, non et non", aimait rappeler la reine du musette, ex-mascotte du Tour de France devenue à la fin des années 1980 la plus branchée des accordéonistes.

"J'ai accompagné Boy George comme des chanteuses d'opéra. J'ai enregistré avec Charlie McCoy, avec l'orchestre à cordes de l'Opéra. J'ai fait aussi des récitals de piano", soulignait-elle. "J'ai le même frisson avec certaines mélodies de rock stars qu'avec la quatrième symphonie de Beethoven. Je suis éclectique".

Yvette Horner, née à Tarbes (Hautes-Pyrénées) le 22 septembre 1922, affirmait avoir été "élevée à coups de biberons et de symphonies". Ses parents dirigent un théâtre, elle s'intéresse à la musique. Dès l'âge de quatre ans, elle étudie le piano, à Tarbes puis à Toulouse, avant d'être contrainte par sa mère de se mettre à l'accordéon car "il y a beaucoup de premiers prix de piano, jamais d'accordéon". Yvette Horner affirme en avoir pleuré "pendant trois ans".

Très douée et très volontaire, elle décide de décrocher la Coupe du monde d'accordéon. Après des mois de travail acharné, elle est la première femme à remporter cette distinction prestigieuse, en 1948.

Montée à Paris, la jeune Yvette --1,55 mètre, chevelure de jais--, donne des récitals dans des cabarets et des brasseries.

- Mascotte du Tour de France -

C'est le Tour de France, dont elle sera la mascotte pendant onze ans, qui la rendra vraiment populaire. Juchée sur le toit d'une traction avant Citroën noire, en robe multicolore et sombrero mexicain, Yvette Horner joue sans relâche, encouragée par les "vas-y Vévette" affectueux qui fusent du public. A l'étape aussi, ses mélodies détendent les coureurs fatigués.

Mais "La java bleue", "Le petit vin blanc", "Le dénicheur", "Perles de cristal" et autres succès de guinguette ne suffisent pas au bonheur de cette passionnée qui "écoute" et "analyse toutes les musiques" et n'hésite pas à jouer avec le pianiste classique Samson François.

En 1977, surmontant sa phobie de l'avion, elle se rend à Nashville, aux Etats-Unis, où elle joue avec le roi de la country Charlie McCoy.

A la fin des années 1980, la France redécouvre "Vévette", relookée par le couturier Jean Paul Gaultier --devenu un ami. Alors qu'elle vient de perdre son mari, elle adopte une crinière rousse flamboyante et des tenues simili-panthère ou cloutées, parfois somptueuses, souvent extravagantes.

Dirigée par Quincy Jones en 1989, elle joue David Bowie ou Michael Jackson et se produit aussi bien aux Francofolies de La Rochelle qu'au Casino de Paris, où elle s'essaie au rap.

Elle incarne une fée dans "Casse-Noisette" monté par Maurice Béjart (1999), et fait vibrer plus de 100.000 personnes sur la pelouse de Reuilly au côté de Jimmy Sommerville pour la Nuit Europride en 1997.

Des collaborations tous azimuts qu'elle poursuit jusqu'à la fin de sa vie, pour ses propres albums --le dernier "Yvette Hors normes" en 2012-- comme ceux d'autres artistes tel Julien Doré en 2011. Elle avait donné son dernier concert en avril 2011.

L'accordéoniste a vendu plus de 30 millions de disques. Elle restait fidèle à elle-même: allergique à la prétention, toujours aussi perfectionniste et passionnée. "La musique, c'est ma vie", disait-elle et un accordéon, "c'est quinze kilos dans les bras, quinze kilos de bonheur".

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