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Zombies, fantômes... A Cannes, les films de genre hantent le tapis rouge

Des zombies, des fantômes, des récits futuristes et dystopiques: de Jim Jarmusch à la Franco-Sénégalaise Mati Diop, le cinéma de genre vient hanter cette année le Festival de Cannes, avec du fantastique revisité par le cinéma d'auteur.

"Il y a une certaine prédominance du cinéma de genre" - terme regroupant films fantastiques, d'horreur, d'anticipation etc. - même si cela est "parfois masqué, pas toujours au premier plan, mais resurgissant quand on ne l'attend pas", avait prévenu Thierry Frémaux, lors de l'annonce de la sélection, soulignant que les auteurs avaient besoin de "se régénérer" avec ce type de cinéma.

Dès le film d'ouverture, le ton était donné: "The Dead don't die" de Jim Jarmusch propose un voyage au pays des zombies, dans lequel une communauté se retrouve attaquée par des morts sortis de leurs tombes. Un récit ultra-référencé, portant aussi un message politique sur la surconsommation et la catastrophe écologique qui guette.

A Cannes, le cinéaste américain n'a d'ailleurs pas manqué de rendre hommage à l'une des références du genre, George Romero, auteur de "La Nuit des morts-vivants". Une source d'inspiration car il a "véritablement changé l'idée que l'on se fait des zombies et des monstres", qui deviennent avec lui une menace venant "de l'intérieur" de la société, a-t-il dit.

Dans la sélection parallèle de la Quinzaine des réalisateurs qui, elle, mettait à l'honneur dès le premier jour le maître de l'horreur et du fantastique John Carpenter, les zombies ont été également présents, mais d'une manière totalement différente dans "Zombi Child" de Bertrand Bonello.

Revenant aux origines du mot, le film raconte en parallèle l'histoire d'un homme "zombifié" à Haïti, selon les croyances vaudoues, c'est-à-dire un mort victime d'un sortilège l'ayant ramené à la vie, et de sa petite-fille, hantée par cette histoire 55 ans plus tard, en région parisienne.

Les fantômes, eux aussi, ont été convoqués, notammentdans "Atlantique" de Mati Diop, une fable à Dakar à la fois politique et onirique, dans laquelle les migrants morts en mer reviennent hanter les vivants. Un film sur "l'envoûtement et sur l'idée que les fantômes prennent naissance en nous", selon sa réalisatrice.

- "liberté" -

Le fantastique a "toujours été un genre qui marchait par cycles", explique Frank Lafond, auteur d'un dictionnaire du cinéma fantastique et de science-fiction. "A certaines périodes, il y a quelque chose dans la société qui fait que ce genre là rencontre un écho chez le spectateur", avec "une possibilité de discours politique".

Le fantastique est également "un bon moyen pour des réalisateurs qui sont plutôt dans le film d'auteur d'acquérir une sorte de liberté, à la fois thématique et formelle", poursuit-il.

Des récits d'anticipation dans des mondes qui n'ont rien d'utopiques sont aussi venus envahir le tapis rouge, tel celui décrit par l'Autrichienne Jessica Hausner dans "Little Joe", dans lequel la manipulation génétique a pris le dessus.

Ou celui que décrivent les Brésiliens Kleber Mendonça Filho et Juliano Dornelles dans "Bacurau", mélange de western, survival et fantastique, dans lequel un village est mystérieusement rayé de la carte.

Le polar et le film de gangsters ne sont pas en reste, avec notamment "Le Lac des oies sauvages" du Chinois Diao Yinan et "Les Siffleurs" du Roumain Corneliu Porumboiu, qui revisitent les classiques du genre avec des trouvailles de mise en scène.

Ou encore le thriller dans "Parasite" du Sud-coréen Bong Joon-ho, qui mêle drame réaliste, comédie et "thriller horrifique", selon ses mots.

"Cette incursion du genre dans les films, c'est quelque chose qui a à voir avec le cinéma et la création aujourd'hui", souligne Philippe Rouyer, critique au magazine de cinéma Positif.

"Il y a des gens qui font partie du cinéma d'auteur qui vont utiliser le genre d'une manière ou d'une autre pour nourrir leur création. C'est une très bonne nouvelle", poursuit-il. "Toutes les pudeurs aujourd'hui sont tombées".

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