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"Revenge porn": 2 ans de prison avec sursis pour l'ancien patron

Quand Magalie a annoncé à son ancien patron la fin de leur relation, il a envoyé des photos d'elle nue à ses collègues, ses proches, l'école de ses enfants. L'homme a été condamné lundi à Paris à deux ans de prison avec sursis, pour cette affaire de "revenge porn".

"Je suis détruite de l'intérieur", raconte à l'AFP Magalie (le prénom a été changé), devant la salle d'audience. "Et lui, il a rebondi sans aucune difficulté", poursuit cette femme d'une quarantaine d'années à l'air fatigué. Son ancien patron, âgé de 47 ans, est depuis quelques mois directeur général d'un grand groupe d'ingénierie.

L'homme n'est pas venu au délibéré. Peut-être redoutait-il une lourde peine, car le parquet avait requis contre lui trente mois de prison avec sursis, lors du procès en janvier.

Magalie, elle, était bien au tribunal lundi avec son mari qui la soutient depuis le début de l'affaire.

En juin 2019, cette directrice des ressources humaines d'une entreprise de conseil en ingénierie vient d'accepter un poste dans un autre groupe, quand un appel anonyme et trois emails annoncent sa relation adultère avec son patron, de 2017 à 2019, à son mari - qu'elle avait déjà mis au courant - et à son entourage.

Puis entre septembre et novembre, près de 2.000 personnes ont reçu des mails, assure l'avocat de la plaignante, Vincent de La Morandière.

Il y avait des photos d'elle dénudée. Certains messages racontant l'adultère étaient soi-disant écrits par les deux filles de 8 et 10 ans de Magalie et de son mari. D'autres mails accusaient le mari de Magalie d'avoir un comportement violent avec les enfants.

Les emails ont été envoyés aux anciens et aux nouveaux collègues de la DRH, mais aussi aux parents d'élèves de l'école des enfants, au catéchisme, etc.

- "Décharge électrique" -

"Il a voulu me détruire personnellement et professionnellement", dit à l'AFP la victime après le délibéré. "Ça a été insupportable pour cet homme tout puissant d'avoir une femme qui a lui dit +non+. C'est d'ailleurs quand j'ai dit +non, c'est fini+ que tout a commencé".

"Chaque nouvel email faisait l'effet d'une décharge électrique. C'était de la torture", décrit-elle.

Pendant six semaines, jusqu'à trois emails étaient envoyés chaque jour, assure Magalie.

Lors du procès, l'homme avait invoqué une crise de folie dépressive suite à la rupture. "C'était plus fort que moi", avait-il déclaré. "Ce qui m'aidait à tenir, c'est qu'elle partage ma douleur".

L'ancien patron a été jugé pour avoir volé son téléphone, pour usurpation d'identité, violation de correspondance, etc.

Magalie voulait, elle, être reconnue comme victime de harcèlement. "En tant que DRH, je connais très bien la définition juridique du harcèlement. Toutes les caractéristiques sont là, c'est évident".

Le tribunal a cependant rejeté cette requalification. "Voilà ce qui se passe pour la journée des droits des femmes", a-t-elle critiqué.

Elle réfléchit avec son avocat à entamer une nouvelle procédure. Avant cela, une audience sur les dommages et intérêts va se tenir en mai.

Ce "combat", Magalie a voulu le mener pour que "d'autres femmes ne soient pas victimes de cette violence abjecte" et aussi "pour retrouver (sa) dignité en tant que victime, relever la tête".

"Des femmes seraient allées jusqu’au suicide face à cette violence", a ajouté son mari. Magalie dit "tenir le coup" grâce au soutien de ce dernier et celui de son employeur actuel.

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