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Aluminium dans les vaccins: une question explosive

L'aluminium des vaccins est l'ingrédient qui met le feu au débat: les anti-vaccins le jugent toxique mais cette théorie n'est pas prouvée scientifiquement et la communauté médicale la rejette.

Les adjuvants des vaccins, dont l'aluminium, "ne présentent aucun danger", a assuré la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, fin octobre à l'Assemblée nationale, lors du débat sur le passage à onze vaccins obligatoires pour les enfants.

"C'est un sujet hautement polémique", reconnaît Liliane Grangeot-Keros, de l'Académie nationale de pharmacie.

Certains vaccins contiennent des adjuvants, substances utilisées pour accroître leur efficacité en augmentant la réponse immunitaire. Les sels d'aluminium sont le plus ancien adjuvant utilisé (depuis les années 1920).

L'aluminium est présent dans de nombreux vaccins: parmi les onze qui seront bientôt obligatoires pour les enfants, tous en contiennent, à l'exception du ROR (rougeole-oreillons-rubéole).

La communauté scientifique insiste sur le fait qu'aucune étude n'a prouvé que l'aluminium des vaccins pouvait être toxique, en 90 ans d'utilisation et avec des centaines de millions de doses injectées dans le monde.

Mais il est pourtant dans le viseur d'associations qui le jugent dangereux et mettent en avant les travaux du professeur Romain Gherardi, chef de service à l'hôpital Henri-Mondor (Créteil).

Ce dernier estime que les particules d'aluminium pourraient être à l'origine, chez des personnes génétiquement prédisposées, d'une série de symptômes (fatigue extrême, douleurs, troubles cognitifs...) constitutifs d'une maladie jusqu'alors inconnue, la myofasciite à macrophages. En cause, le "burn out immunitaire" que provoquerait l'aluminium chez ces personnes.

Une avocate, Jacqueline Bergel, qui dit représenter 3.000 personnes, a déposé le 14 novembre une requête au Conseil d'Etat pour interpeller la ministre de la Santé sur l'aluminium dans les vaccins.

- 'Continuer les études' -

"De plus en plus d'éléments montrent qu'il y a de quoi être inquiet au sujet de l'aluminium", assure à l'AFP Didier Lambert, le président d'E3M. Cette association milite pour la remise à disposition de vaccins sans aluminium et pour la reconnaissance d'un lien entre la vaccination et certains troubles.

A l'inverse, l'Inserm souligne qu'"au vu des données disponibles à ce jour (...), l'innocuité des sels d'aluminium contenus dans les vaccins ne peut être remise en cause".

"Avant de dire que l'aluminium est toxique, il faut faire très attention", argumente Liliane Grangeot-Keros.

"De l'aluminium, il y en a partout: dans l'eau, l'air, les aliments, les cosmétiques comme les anti-transpirants. On en trouve dans l'organisme, dans le foie, les reins, le sang ou le cerveau", rappelle-t-elle.

Selon Mme Grangeot-Keros, il peut exister des "intoxications chroniques". Chez les insuffisants rénaux par exemple, l'aluminium présent dans le liquide de dialyse peut provoquer des encéphalopathies (ensemble de problèmes neurologiques). Elles disparaissent toutefois après une greffe car l'aluminium est éliminé par les reins.

En revanche, Mme Grangeot-Keros souligne qu'"aucun lien de causalité n'a pu être établi à ce jour" entre l'aluminium des vaccins et la myofasciite à macrophages.

"D'autant que ces symptômes peu spécifiques paraissent limités dans le temps (non identifiés avant 1990, aucun nouveau cas depuis 2015) et dans l'espace (la France a cumulé la quasi-totalité des cas décrits dans le monde)", selon elle.

Des arguments qui ne convainquent pas les opposants. "On ne peut pas obliger les gens à utiliser des vaccins qui contiennent de l'aluminium sans investiguer sur leur innocuité", plaide Didier Lambert.

La cour administrative d'appel de Nantes vient d'ailleurs d'apporter de l'eau au moulin des anti-aluminium: elle a condamné l'Etat à verser 190.000 euros à une secrétaire médicale qui a présenté des troubles physiques après une vaccination obligatoire contre l'hépatite B en 1994.

Face aux doutes d'une partie de la population, Liliane Grangeot-Keros juge qu'"il faut continuer les études expérimentales et épidémiologiques" sur l'aluminium des vaccins. "Mais il faut qu'elles soient extrêmement rigoureuses", ajoute-t-elle aussitôt.

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