Accueil Actu

Arnaud Kasper, l'homme qui sculpte les chevaux

Zingaro, Ourasi, Bold Eagle... Le sculpteur Arnaud Kasper donne naissance dans la chaleur et le bruit à des chevaux de légende, des oeuvres en bronze sorties de la Fonderie Chapon de Bobigny (Seine-Saint-Denis) en banlieue parisienne.

"Attention, la coulée c'est 1.100 degrés ! C'est comme le magma d'un volcan. Elle donne naissance à mes oeuvres", crie Arnaud Kasper dans la Fonderie poussiéreuse où règne le grondement des machines.

Il retouche un "Cheval des Lumières", un bronze toisant plus de 3 mètres. Il a déjà réalisé ce majestueux cheval noir cabré pour le château d'Asnières-sur-Seine en 2011.

Arnaud Kasper est un sculpteur-peintre français "né artiste" dit-il en 1962, d'un père architecte et d'une mère peintre. Enfant sensible, il passe toutes ses vacances à L'Île-d'Yeu. Il arpente les plages et dessine le monde marin.

Formé à l'Ecole nationale des arts appliqués Olivier-de-Serres à Paris, c'est en 1993 lorsqu'il participe à sa première transatlantique, "confronté à la pollution des océans", qu'il a "une révélation". "Je serai sculpteur", dit-il, "pour faire passer des messages". Avec une de ses premières oeuvres "L'homme poisson", il nous "alerte sur les catastrophes écologiques".

En 1999, il change de cap et réalise sa première sculpture équestre, Zingaro, le cheval de Bartabas qui a donné le nom à la compagnie équestre de l'écuyer. "C'est le début de mon histoire avec le cheval", raconte le cinquantenaire à la ligne svelte qui ne mange que du bio.

"Je sculpterai toujours les chevaux" affirme-t-il avec un large sourire entouré d'un soupçon de barbe grise.

Son aventure devient hippique lorsqu'en 2007, il réalise le Trophée du Prix d'Amérique, une tête de cheval en bronze qu'il remet à Pierre Levesque victorieux au sulky d'Offshore Dream.

En 2014, il remporte l'appel d'offres de la Société Letrot et rend hommage au légendaire Ourasi avec son sosie en bronze. "J'ai gagné car j'ai eu l'idée de faire Ourasi sur un socle pyramidal avec ses victoires gravées pour en faire un roi", se souvient humblement l'homme discret, tout de noir vêtu.

Philippe Renouf, le lad d'Ourasi qui avait conseillé Kasper pour certains détails, comme la taille des oreilles du trotteur mort à 32 ans, avait confié à l'AFP avoir été "bluffé par la ressemblance avec son cheval".

- "Pas de l'art commercial" -

Cavalier, il vit au milieu d'une multitude de sculptures dans son atelier à Asnières-Sur-Seine, un ancien hangar à calèches.

Un petit modèle du champion trotteur Bold Eagle, l'icône de Vincennes a trouvé, lui, une douzaine d'acquéreurs, dont Pierre Pilarski, le propriétaire de "l'aigle audacieux".

Kasper travaille à l'instinct. Il met ses tripes et son âme, comme pour son oeuvre fétiche le "Cheval des Lumières", en référence au Siècle des Lumières.

"J'invente une beauté fidèle à la morphologie du cheval. Je fais aussi passer des messages avec mes sculptures temporelles, inscrites dans une réalité, une actualité", explique-t-il s'attachant aux moindres détails : veines saillantes, poitrail musculeux, crinière effilée...

"Le cheval cabré est fier, à la fois roturier et bourgeois, raffiné, sportif, élégant, courageux et guerrier. C'est le reflet des traits de caractère de l'homme", commente-t-il.

Au fond de l'atelier, une immense Gorgone au corps élancé de femme avec une tête de Licorne et la queue d'un cheval, est à l'état embryonnaire, en polystyrène.

"C'est une oeuvre intellectuelle qui fait référence à la relation entre l'homme et le cheval. J'ai choisi de sculpter une femme car 80 % des cavaliers sont des cavalières", relève-t-il, témoin de son temps.

La Gorgone verra le jour dans moins d'un an à la Fonderie Chapon, créée en 1988 Par Eric Jacot, après avoir subi plusieurs transformations, de la statue de cire à celle de bronze et plusieurs coulées avec du métal en fusion.

"Arnaud c'est un phénomène, créatif et inventif. Aujourd'hui beaucoup d'artistes réalisent des oeuvres tape à l'oeil en résine après avoir fait leurs modèles sur ordinateur. Pas lui ! lance Eric Jacot. Il se réjouit que son ami "ne fasse pas de l'art commercial". "Toutes ses pièces sortent de ses mains, il les fait naître!"

À lire aussi

Sélectionné pour vous