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Ehpad: les soignants confinés avec les seniors, un exemple à suivre?

Alors que le nombre de victimes du Covid-19 s'accroît dans les Ehpad, des soignants ont décidé de rester confinés 24h sur 24 avec les résidents: un choix radical pour protéger les seniors. A généraliser? Les avis divergent.

Halte au coronavirus! Pendant 15 jours, à partir du 18 mars, personne n'est entré ni sorti de l'établissement Vilanova de Corbas, près de Lyon, où 29 volontaires sont demeurés nuit et jour avec les 108 résidents jusque-là préservés de l'épidémie. Depuis, d'autres ont pris la relève jusqu'au 8 avril.

Cette décision "était pour moi une évidence" après avoir vu ce qui s'était passé en Chine puis en Italie, explique à l'AFP Valérie Martin, la directrice de cet établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.

"C'était un challenge de confiner du personnel non testé mais tous avaient auparavant pris de strictes précautions. C'était un risque calculé".

Finalement, "on travaille plus sereinement. On ne s’occupe plus des plannings; tout le monde est là !". "Et chaque minute est consacrée aux résidents", se félicite la directrice.

- "nouvelle jeunesse" -

Même sentiment "d'évidence" pour Isabelle Feuillet, l'une des aide-soignantes qui n'a pas hésité à se confiner dans l'établissement. "Ca fait partie de mon travail. Et l'équipe est très soudée".

De leur côté, "les résidents sont contents de nous savoir avec eux. Ils sont beaucoup plus ouverts, plus attentifs".

Certains "ont retrouvé une nouvelle jeunesse, quitté leur fauteuil roulant pour se promener avec un déambulateur dans le couloir!", raconte-t-elle.

"De nous voir là tout le temps, ça a diminué leur angoisse" d'être coupé de leurs familles, renchérit la directrice. "Pour l'instant, on a réussi, mais l'objectif n'est pas de tenir pendant toute la pandémie", prévient-elle.

De même, la moitié du personnel d'un Ehpad de Mansle (Charente) a choisi de rester 24h sur 24 avec les 59 personnes âgées, jusqu'ici préservées du virus, pour éviter tout contact extérieur et espérer ainsi "passer au travers de la crise".

Les 18 volontaires sont aide-soignants, agents d'entretien, cuisiniers, responsables administratifs.

Néanmoins, chez les résidents, "les réactions sont ambivalentes", reconnaît Pascal Ramirez, directeur de l'établissement.

- "pas tenable" -

Certes, "ils sont rassurés qu'on soit à leurs côtés". En même temps, "ils comprennent du coup que ça se passe vraiment mal à l'extérieur".

Et "ça fait remonter des angoisses, des souvenirs, notamment de la Seconde guerre mondiale pour ceux qui l'ont connue".

Dans l'Essonne, les employés de la résidence Hippolyte-Panhard au Coudray-Montceaux ont eux aussi décidé de rester dormir sur place pour garantir la sécurité des seniors.

Alors, solution miracle ou fausse bonne idée? "Ce n'est pas nécessaire si on prend des mesures de précaution strictes", assure à l'AFP Jean-Michel Calut, médecin correspondant de l'Ehpad Louis-Pasteur de Lempdes (Puy-de-Dôme), qui déplore pourtant sept décès depuis le 23 mars.

Lui-même se change quand il travaille dans cet Ehpad de 77 lits, prend une douche... Et les sept médecins qui y interviennent se consacrent uniquement à l'Ehpad quand ils sont d'astreinte.

Le confinement volontaire, "c'est la volonté personnelle d'un groupe. Je la comprends, mais est-ce une bonne idée quand le personnel doit se reposer", s'interroge le Dr Calut.

Lorsque les soignants "travaillent 12 heures d'affilée, s'ils doivent en plus rester la nuit, ils sont usés, malgré toute leur bonne volonté. Sur le long cours, ce n'est pas tenable".

Même scepticisme chez le directeur des Ehpad de Sillingy et Cervens (Haute-Savoie): "c'est une idée très généreuse, et qui force l'admiration, mais ça me fait très peur quant à l'épuisement des personnels", souligne Éric Lacoudre.

"Combien de temps vont-ils rester enfermés? 4, 5, 6, 7 semaines? Et après le déconfinement?" si le virus traîne encore autour...

A ce jour, les directives du ministère de la Santé n'évoquent pas "de notion de confinement total des personnels" qui relève "d’une décision interne à la structure".

Pour la première fois jeudi soir, le directeur général de la Santé Jérôme Salomon a donné une première évaluation du nombre de morts du coronavirus dans les EHPAD, avançant le chiffre de 884 décès.

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