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En Amazonie, les habitants de Porto Velho sont devenus des "fumeurs passifs"

Depuis des semaines, les habitants de Porto Velho, capitale de l'Etat amazonien de Rondônia, vivent plongés dans le brouillard: ce sont les fumées qui s'échappent de la vaste forêt en flammes et les conséquences sur la santé commencent à se faire sentir.

A l'hôpital pour enfants Cosme e Damião, plusieurs familles attendent de voir un médecin.

"La fumée peut être très agressive. Les plus affectés sont les enfants et les personnes âgées", explique à l'AFP Sergio Pereira, le directeur de cet établissement qui a vu sa fréquentation augmenter. "On reçoit généralement 240 patients par jour. A présent, on en reçoit plutôt 280".

"C'est quelque chose qui arrive (régulièrement) en cette période de saison sèche. On est tous, en quelque sorte, des fumeurs passifs. Mais cela affecte davantage certaines personnes que d'autres, notamment celles qui ont déjà des problèmes" respiratoires, ajoute-t-il.

Dans cette ville d'un demi-million d'habitants, les pathologies vont de la toux sèche aux irritations oculaires, en passant par des troubles respiratoires ou des fièvres pouvant dégénérer en pneumonie.

Dans un coin de la salle d'attente, la fille de quatre ans de Maiza Dantas est arrivée lundi matin avec les "voies respiratoires obstruées".

"Il y a un an et demi, elle a eu une pneumonie. Depuis, il y a des moments où elle ne se sent pas bien, mais jamais comme aujourd'hui, avec de la toux et de la fièvre", explique la mère, pendant que sa fille reçoit une perfusion de sérum.

- "Les poumons de tous" -

Dans cette ville située au bord du rio Madeira, le principal affluent du fleuve Amazone, les résidents des maisons de retraite souffrent aussi. Dans l'une d'elles, quatre personnes âgées ont dû être soignées pour des problèmes respiratoires.

Les autorités sanitaires de l'Etat de Rondônia n'ont pas répondu dans l'immédiat à la demande de l'AFP de chiffres globaux sur la hausse du nombre d'admissions.

A Porto Velho, où l'aéroport a dû fermer durant une heure et demie lundi matin en raison des fumées, l'émoi provoqué par l'aggravation des feux en Amazonie, une forêt vitale pour la planète, est également palpable.

Des centaines de personnes ont manifesté dimanche dans la ville contre le président Jair Bolsonaro, à qui beaucoup attribuent la responsabilité de ces incendies, à cause de ses politiques favorables à l'exploitation des ressources naturelles dans les aires protégées, notamment en Amazonie.

"L'oxygène produit ici va dans les poumons de tous", proclamait une des pancartes.

Situé dans le nord-ouest du Brésil, à la frontière de la Bolivie, l'Etat de Rondônia est, avec quelque 6.500 feux depuis janvier, le cinquième le plus touché par les incendies de forêt.

Au total, près de 80.000 feux de forêt ont été répertoriés au Brésil depuis le début de l'année -- un plus haut depuis 2013 -- dont plus de la moitié en Amazonie.

"Dans le Rondônia, il y a plusieurs réserves indigènes, certaines d'entre elles très riches en or et diamants. Cette année, nous avons vu beaucoup plus d'invasions de terres de la part de trafiquants de bois et d'orpailleurs. Un phénomène renforcé par le discours anti-indigènes de Bolsonaro et par la réduction du nombre d'organismes de contrôle", juge Ivanete Bandeira, coordinatrice de projet de l'ONG environnementale Kanindé.

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