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Face au coronavirus, les centres équestres dans la tourmente

Les humains peuvent être confinés, pas les chevaux. Face à la fermeture au public et au chômage technique d'employés, les 6.000 clubs hippiques de France s'organisent pour sortir, coûte que coûte, les 400.000 chevaux qu'ils hébergent.

Hélène Mennessier, vétérinaire équin dans l'Oise, le dit à l'AFP sans détour: "C'est inhumain de laisser un cheval dans un box 24 heures sur 24!" Pour sa santé, le cheval doit "être en mouvement au minimum une heure par jour", affirme-t-elle, assurant "traiter les urgences et la continuité des soins" avec des équipes réduites en cette période de confinement.

Sans activité, un cheval risque "des blessures s'il n'a pas l'habitude d'être enfermé dans un box, voire des fractures de bassin ou de fémur" et "là il n'y a rien à faire à part l'euthanasie", met-elle en garde.

Président de l'Union française des maréchaux-ferrants, Jean-François Craipeau, rappelle, lui, qu'on "ne peut pas stopper la pousse de la corne". Il recommande de déferrer les chevaux si les clubs sont fermés 45 jours, précisant que "les artisans continuent d'exercer tout en se protégeant" et que les urgences sont assurées.

A Ajaccio Equitation, premier centre équestre de Corse, "on a une jument pleine en ce moment, on l'a montrée au vétérinaire par visioconférence et ça fonctionne plutôt bien", explique à l'AFP Lorraine Poirot, la gérante.

Avec ses quatre employés, dont un en chômage technique, elle gère quotidiennement 79 chevaux, répartis sur huit hectares de pâturage, depuis le début du confinement.

"Pour les poneys et les chevaux d'école, c'est les vacances au pré mais les chevaux en pension -- une quarantaine -- doivent travailler et comme les propriétaires ont interdiction de venir, c'est à nous de le faire. Ce sont des athlètes qui risquent une perte musculaire avec l'activité réduite", explique-t-elle.

Lorraine passe donc ses journées à cheval. "Aujourd'hui, 14 chevaux devaient travailler une heure chacun et on était deux", détaille-t-elle.

- "Du mal à se relever" -

Espigat, magnifique étalon de 10 ans, à la robe baie (marron) et à la crinière noire, est monté par Jeanne, monitrice, et galope dans une carrière étrangement calme. Posé au bout des pistes de l'aéroport d'Ajaccio, à proximité d'une quatre voies habituellement très fréquentée, le club a retrouvé une quiétude inhabituelle.

Déplacements latéraux aux trois allures: pas, trot et galop. "L'idée est de faire un peu d'étirement au cheval, de le muscler un peu", glisse la monitrice qui, en temps normal, enseigne aux jeunes du club.

Pour rassurer et maintenir un lien avec les propriétaires, leur cheval "est filmé au travail et photographié, puis les images envoyées" par internet.

Les équidés doivent aussi être nourris quotidiennement: "12 sacs de 20 kg de grains par jour et 400 à 500 kg de foin quotidien".

Mais Lorraine craint surtout pour la survie de son entreprise: "Economiquement, ça n'est pas viable du tout. Même fermé, on a des sorties financières énormes et on est largement en négatif avec l'arrêt des cours".

Une inquiétude partagée par Serge Lecomte, président de la Fédération française d'équitation, troisième discipline sportive en France. "Beaucoup de clubs sont à la limite budgétaire et certains auront du mal à se relever", confie-t-il à l'AFP.

"C'est la même chose pour la Fédération" qui a "déjà perdu près de trois millions de recettes en une semaine et demi avec la suppression des compétitions car c'est la pleine saison", relève-t-il.

D'ici au mois de juin, une vingtaine de millions d'euros auraient dû normalement entrer dans les caisses. "Il va falloir faire sans", note-t-il, ajoutant "attendre les aides de l'Etat, comme tout le monde".

L'équitation, "premier employeur sportif privé (...) a une vraie économie, elle anime la ruralité et induit des activités périphériques de fabricants, de marchands de vêtements, etc", insiste-t-il.

La France compte 1,2 million de chevaux. Certains participent à l'effort contre le coronavirus au sein de la police montée et de la Garde républicaine qui vérifient le respect du confinement notamment à Paris et sur les plages marseillaises.

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