Accueil Actu

La biodiversité, un tout relié comme les mailles d'un pull

Derrière le mot obscur de "biodiversité" se cache tout simplement "la partie vivante de la nature", explique le biologiste Gilles Boeuf, qui décrit un système interconnecté comme les mailles d'un pull.

"Tout se tient" alors "arrêtons de croire qu'il y a un humain et à côté une nature", poursuit l'ex-président du Muséum d'histoire naturelle, à la veille de la présentation par Nicolas Hulot de pistes pour protéger ce monde du vivant.

Q: Qu'est-ce que la biodiversité ?

R: "C'est la partie vivante de la nature. D'ailleurs souvent, je dis +le vivant+: vous, moi, vos bactéries, toutes les cellules qui nous entourent. On connaît environ 2 millions d'espèces vivantes aujourd'hui, tout compris: les bactéries, les micro-algues, les levures, les champignons, les plantes et les animaux. Et on sait qu'il y en probablement dix fois plus, on ne connaît qu'une mince fraction de ce qui existe.

Quand la Terre s'est créée, il y a eu une nature, des tremblements de terre et des volcans, du vent, un océan. Et la biodiversité, c'est quand la première cellule vivante apparaît dans l'océan ancestral.

La biodiversité a toujours été faite d'espèces qui apparaissaient et qui disparaissaient mais le problème actuel, c'est que ça va trop vite. Il y a eu des grandes crises à certains moments avec des événements extérieurs terribles, comme d'énormes volcans. Mais aujourd'hui, c'est l'humain: c'est la première fois qu'une espèce parmi les 2 millions est responsable".

Q: A quoi ça sert, la biodiversité ?

R: "Je répondrais par une boutade: et nous, on sert à quoi ? Ça sert simplement à organiser le système Terre. Et à nourrir les humains. Il y a une valeur fantastique là-dedans, mais on ne la reconnaît pas. Si la biodiversité se dégrade trop, on partira avec, et notre économie aussi. L'agriculture est impensable sans biodiversité, la santé publique est impensable sans biodiversité.

Mon maître (le biologiste) Robert Barbault disait +vous faites un beau pull over au tricot puis vous coupez une maille et vous commencez à tirer sur un bout de fil de laine+. Tout va partir, je ne sais pas ce qui partira en premier ou en dernier, mais tout se tient. Ça veut dire que si telle espèce disparaît, il y aura forcément un impact sur le reste".

Q: Comment faire passer le message ?

R: "L'éducation est importante. Comment être capable de toucher chaque individu, pour qu'il réfléchisse à ça, que si le tissu vivant se désagrège, il partira avec. On ne peut pas y échapper, on est dans le vivant, on en fait partie, arrêtons de croire qu'il y a un humain et à côté une nature. Ce qui est grave aujourd'hui, c'est l'enseignement qu'on fait aux enfants, et le mode de vie qui les coupe de cette nature biologique. Les gens ont peur d'aller faire un tour dans l'herbe aujourd'hui, c'est fou ! Dans les grandes villes du monde, on va oublier ces relations avec la nature, et il faut le rappeler en permanence. Il ne faut pas non plus faire de catastrophisme, parce que les gens en ont marre, et on s'adresse à des jeunes qui ne sont pas responsables de la situation actuelle".

À lire aussi

Sélectionné pour vous