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"Construire plus, mieux et moins cher": une nouvelle loi pour un objectif ancien

"Construire plus, mieux et moins cher pour provoquer un choc d'offre": c'est l'objectif du gouvernement avec son projet de loi Logement, qui réorganise le secteur HLM et comporte une série de mesures techniques en faveur du bâtiment.

Présenté mercredi en Conseil des ministres, ce texte baptisé Élan (Evolution du logement et aménagement numérique), dont les mesures avaient fait l'objet d'une consultation au Sénat en décembre et janvier, sera débattu au Parlement à partir du mois de juin.

"Dans cette loi il y a surtout une évolution du modèle économique du logement social", estime Jean-Claude Driant, professeur à l'École d'urbanisme de Paris et spécialiste des politiques du logement. "Le reste, ce sont des mesures qui vont dans le bon sens pour faciliter la construction mais dont il ne faut pas attendre monts et merveilles", dit-il.

Ce projet de loi s'inscrit "dans une dynamique qui existe depuis une dizaine d'années", estime M. Driant. Ainsi, au ministère du Logement, Benoist Apparu (2009-2012) "voulait libérer l'urbanisme", Cécile Duflot (2012-2014) a facilité les ventes de foncier public, rappelle-t-il.

Même "le grand slogan +construire plus, mieux, moins cher+ n'a rien de nouveau", dit-il. "On avance plutôt lentement, dans une direction sans doute vertueuse, pour libérer les forces", mais sur le secteur, "le choc d'offre est une illusion car les effets de la politique publique n'apparaissent qu'au bout de pas mal d'années d'un effort constant".

Pour "construire plus", outre l'abattement fiscal - inscrit en loi de Finances 2018 - consenti aux particuliers qui cèdent d'ici fin 2020 un terrain où seront bâtis des logements, le projet de loi Elan doit faciliter les cessions de foncier public avec "décote" - à des prix inférieurs à leur valeur.

Créées par la loi Duflot du 18 janvier 2013, ces opérations se sont avérées "complexes" à mener pour un résultat encore décevant, estimait la Cour des comptes en janvier: sur les 110.000 mises en chantier de logements espérées sur 2012-2016, seules 6.700 ont été lancées.

- Réorganisation d'ampleur du logement social -

Toujours pour soutenir la construction, déjà dynamique avec 418.900 logements neufs mis en chantier en 2017, Elan comporte des mesures techniques saluées par les professionnels, promoteurs et entreprises du bâtiment, comme la création d'outils facilitant les opérations d'aménagement urbain.

Aussi très attendus par le secteur: l'encadrement des recours contre les permis de construire qui devront être jugés en 10 mois par les tribunaux, l'assouplissement des normes d'accessibilité aux handicapés, la transformation de bureaux en logements facilitée.

Toujours dans le but affiché de "construire plus", le texte prévoit de modifier les règles de la commande publique, ce qui inquiète en revanche les architectes.

Craignant de voir produire des "logements au rabais" qui feront "les quartiers dégradés de demain", quelque 200 architectes dont Jean Nouvel, Christian de Portzamparc ou Rudy Ricciotti ont écrit à Emmanuel Macron tandis qu'une pétition recueillait 5.400 signatures d'architectes, parlementaires, élus locaux et présidents d'écoles d'architecture.

Celle-ci demande le maintien des concours d'architecture dans la construction de logements sociaux et de la loi MOP encadrant les relations entre acteurs publics et architectes.

Toujours dans le logement social, une réorganisation d'ampleur est à l'ordre du jour pour les bailleurs sociaux, qui se sont vu imposer 1,7 milliard d'euros de baisses de loyers et de hausses de prélèvements en 2018. Ceux gérant moins de 15.000 logements devront se regrouper d'ici 2021, afin de mieux gérer et restructurer leur patrimoine.

La vente de logements HLM -à l'unité, à leur occupant, ou en bloc, à un autre bailleur- sera également facilitée, tandis que la situation des locataires sera réexaminée tous les 6 ans: ceux dont les revenus sont supérieurs aux plafonds devront payer un "surloyer".

Dans le secteur privé, Elan crée des sanctions à l'encontre des plateformes de locations touristiques de courte durée (Airbnb, Abritel...) dans l'illégalité, et renforce celles visant les loueurs particuliers.

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