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A Wall Street, le grand retour des montagnes russes

La Bourse de New York, après avoir longtemps navigué sur des eaux calmes et prospères, s'est soudainement retrouvée en 2018 face à une houle beaucoup plus agitée déstabilisant des investisseurs qui avaient perdu l'habitude d'une telle volatilité.

Par six fois cette année, l'indice boursier considéré comme le plus représentatif par les courtiers, le S&P 500, a fluctué de plus de 4% au cours d'une même séance, ce qu'il n'avait plus fait depuis 2011.

Il vient d'encaisser sa pire séance jamais enregistrée à la veille d'un Noël (-2,71%), suivie de sa meilleure séance depuis 2009 (+4,96%).

Wall Street a aussi été saisie en février par de fortes turbulences qui ont piégé ceux qui avaient misé sur la persistance d'une faible volatilité, un marché florissant jusqu'alors puisque l'indice la représentant, le VIX, était resté quasiment atone depuis l'été 2015. Deux fonds indiciels basés sur l'évolution de la volatilité à la Bourse de New York, gérés par les banques Crédit Suisse et Nomura, ont à l'époque dû fermer boutique.

Toutefois, nuancent plusieurs observateurs de longue date, cette volatilité accrue n'est qu'un retour à la normalité après deux années particulièrement tranquilles.

Le nombre de séances enregistrant une amplitude d'au moins 2% a certes augmenté en moyenne cette année (37) et est au-dessus de la moyenne depuis 2009 (32). Mais il reste en dessous de la moyenne historique (43,4 depuis 1962), souligne Howard Silverblatt, spécialiste des indices boursiers pour la société S&P Dow Jones Indices.

- Courtage automatisé -

Perplexité face à la politique monétaire de la banque centrale américaine, inquiétude face à la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis, désarroi face aux décisions et prises de parole intempestives de Donald Trump, crainte d'un ralentissement de la croissance mondiale: les sources d'incertitudes ne manquent pas.

Mais dans le même temps les Américains continuent à consommer en masse et les statistiques sur l'emploi sont au beau fixe.

"Le marché est dans un mécanisme permanent de réajustement et prend en compte toutes les informations à sa disposition", rappelle Quincy Krosby, en charge de la stratégie des marchés pour Prudential Financial.

"Depuis plusieurs mois la question est de savoir si les prix des actions ne sont pas trop élevés par rapport aux résultats des entreprises attendus en 2019", souligne-t-elle. "La croissance va-t-elle juste ralentir ou stagner complètement?" Le marché hésite, faisant brutalement vaciller les indices.

Les fluctuations sont dans une certaine mesure amplifiées par la montée en puissance du courtage automatisé, certains fonds étant programmés pour intégrer quasi instantanément les nouveaux éléments susceptibles d'influer le cours d'une action, ou pour suivre la tendance.

- Anticipation d'une crise -

Voir la Bourse plonger alors que l'économie se porte plutôt bien actuellement et que les entreprises cotées devraient, sur l'ensemble de l'année, profiter de la plus forte hausse de leurs bénéfices depuis 2010 (+20,3% selon le cabinet Factset) peut paraître étonnant.

Mais les mois à venir s'annoncent plus brumeux.

"Habituellement les économistes n'ont de la visibilité que sur les dix à douze prochains mois et le marché des actions commence à se replier six mois avant une récession", remarque Frances McDonald, stratégiste macro-économique chez Gestion d'actifs Manuvie.

"Mais là, on sait déjà que trois éléments auront un impact certain en 2020: le resserrement de la politique monétaire de la banque centrale, qui met en général un an et demi à deux ans à vraiment se transmettre à l'économie, la fin de l'impact positif de la réforme fiscale, et les effets de la guerre commerciale", ajoute-t-elle.

Cette anticipation d'une période difficile crée de la volatilité. Mais, note également la spécialiste, "la volatilité, c'est de l'opportunité".

Elle oblige les investisseurs à ajuster leur stratégie, à ne plus se contenter de placer leur argent dans un fonds reflétant un indice et permet à certains d'entre eux de tirer leur épingle du jeu.

"La volatilité n'est pas mauvaise pour le marché, c'est juste un symptôme de l'incertitude", abonde Brian Battle de Performance Trust Capital Partners. "Les investisseurs doivent être capables de conserver leurs positions à long terme et de résister à leurs émotions."

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