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Abattoir de Mauléon: six mois avec sursis requis contre l'ex-directeur

Six mois de prison avec sursis ont été requis mardi au tribunal correctionnel de Pau contre l'ex-directeur de l'abattoir de Mauléon (Pyrénées-Atlantiques), deux ans et demi après la diffusion d'images choc de mauvais traitements envers les animaux.

La peine requise correspond aux accusations de "tromperie sur la nature, la qualité, l'origine ou la quantité" de la viande, un délit passible de deux ans de prison et 300.000 euros d'amende.

La maltraitance animale, dont répondait l'ex-directeur avec trois employés, n'est punie que d'amendes, que le parquet a réclamées à des degrés divers de quelques centaines d'euros contre les quatre hommes.

Un total de 50.000 euros d'amendes a été requis contre l'abattoir en tant que personne morale.

"Ce n'est pas le procès d'Alès, il ne s'agit pas d'actes de cruauté", a affirmé Orlane Yaouanq pour le ministère public, en référence au procès concernant les abattoirs d'Alès et du Vigan (Gard) ayant entraîné l'an dernier une condamnation à huit mois de prison avec sursis pour actes de cruauté.

"Il n'y aurait pas le délit de tromperie, nous serions devant le tribunal de police. Il n'y a pas eu de volonté délibérée de causer des souffrances aux animaux. Cela ne veut pas dire qu'ils n'ont pas souffert", a-t-elle encore affirmé.

Trois employés, l'ex-directeur et l'établissement en tant que personne morale, étaient jugés pour "mauvais traitements infligés sans nécessité à un animal domestique", une accusation qu'ils ont âprement contestée lors des deux jours d'audience.

- "Cadence" subie -

L'affaire avait éclaté en mars 2016 avec la diffusion de vidéos prises en secret à l'abattoir de Mauléon, des images difficilement soutenables montrant des animaux mal étourdis, des moutons saignés encore conscients, voire un agneau écartelé vivant.

Devant une salle comble, remplie d'amis, de familles et d'éleveurs, les employés ont plaidé un manque de personnel, du matériel défaillant et des consignes parfois peu strictes de leur direction.

"La cadence, on la subissait", avait affirmé lundi l'un d'eux, en évoquant les lourds horaires d'une période -avant Pâques- particulièrement chargée.

La direction avait contesté ces accusations, évoquant une situation de "petit" abattoir et la difficulté à trouver du personnel qualifié dans un pays où il n'existe pas de formation spécifique.

"C'est le procès non pas de la difficulté mais de l'impossibilité de recruter du personnel qualifié. Cet abattoir fonctionne la majorité du temps de manière normale, il ne faut pas perdre de vue cela. Il ne doit pas devenir le bouc émissaire de tous les abattoirs de France", a plaidé aussi Me Denise Pombeilh, avocate de l'ex-directeur et de l'établissement.

"Ces images, on nous dit c'est comme ça que ça se passe toute l'année, sauf qu'il y a une opération derrière qui arrive à la période des Rameaux où il y a beaucoup de bêtes et 3 personnels manquants", a-t-elle ajouté.

"On n'est pas au fin fond d'une ferme familiale, on est dans un process. La chaîne mécanique qui avance inexorablement et qu'ils sont incapables d'arrêter", a lancé Me Antoine Tugas, avocat de trois des quatre salariés.

Dix parties civiles, dont L214, la SPA ou la Fondation Brigitte Bardot, ont demandé une condamnation et des amendes allant d'un euro symbolique à 5.000 euros solidaires pour les quatre salariés prévenus.

L'abattoir de Mauléon traite 30.000 tonnes de viande par an et emploie 35 salariés. Son agrément sanitaire avait été suspendu pendant deux mois après les révélations, le 29 mars 2016.

Avec les vidéos de L214, "on a pu avoir un œil sur ce qui se passait dans les abattoirs", a plaidé Christophe Arcaute pour l'association Animal Cross.

Durant le procès, les services vétérinaires, qui ne sont pas en cause dans l'affaire, ont été poussés dans leurs retranchements pour tenter d'expliquer les près de 200 infractions constatées sans fermeture de l'abattoir.

"Oui, potentiellement on avait les moyens d'intervenir, mais je n'avais pas de documents officiels pour m'y appuyer", s'est justifié Philippe Barret, chef de service "abattoirs et sous-produits" de la direction vétérinaire départementale.

Le jugement est attendu le 29 octobre.

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