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Tapie de retour devant les juges dans l'affaire de l'arbitrage

Diminué mais revendicatif, Bernard Tapie était de retour lundi devant la justice pour la reprise de son procès en appel dans l'affaire de l'arbitrage controversé qui lui avait attribué 403 millions d'euros en 2008, après une interruption de plus de six mois liée à son état de santé.

Entamés en octobre, les débats avaient été vite renvoyés au printemps à la suite d'une demande de la défense et d'une expertise ayant conclu que l'ancien ministre, qui souffre d'un cancer, n'était pas en état de comparaître.

L'ex-président de l'Olympique de Marseille, 78 ans, victime début avril d'un violent cambriolage à son domicile, est arrivé en début d'après-midi par une porte secondaire dans la salle d'audience, évitant les nombreuses caméras.

En costume sombre, les joues creusées sous son masque et le teint pâle, il souffre de problèmes "d'audition", selon son avocat, de "mémoire" dira-t-il la voix cassée. Mais pendant les cinq heures d'audience, il a multiplié exclamations et commentaires, demandant à plusieurs reprises à prendre la parole.

La cour d'appel a repris l'examen de ce dossier dans lequel Bernard Tapie et ses cinq coprévenus, dont le patron d'Orange Stéphane Richard, ont été relaxés en juillet 2019 par le tribunal correctionnel de Paris, avant que le parquet ne fasse appel.

Au centre des débats: un arbitrage rendu en 2008 et censé mettre un point final au vieux litige de l'homme d'affaires avec sa banque historique, le Crédit Lyonnais. Un tribunal arbitral avait alors conclu à une "faute" de l'ex-banque publique et accordé à l'entrepreneur 403 millions d'euros, dont 45 millions au seul titre de préjudice moral.

Cette sentence controversée a été annulée au civil pour "fraude" en 2015, Bernard Tapie étant définitivement condamné à rembourser les sommes perçues.

Le procès qui a repris lundi est celui du volet pénal, dans lequel le patron du groupe de médias La Provence est renvoyé pour escroquerie et détournement de fonds publics, soupçonné d'avoir œuvré à la mise en place d'un "simulacre" d'arbitrage pour obtenir ces millions.

- "Combine" -

La présidente Sophie Clément a renoué lundi le fil des débats en interrogeant l'un de ses coprévenus, Jean-François Rocchi, ancien dirigeant d'une entité chargée de gérer le passif du Crédit Lyonnais, le Consortium de réalisation (CDR), sur le compromis d'arbitrage.

Assis à quelques mètres derrière lui, Bernard Tapie a échangé régulièrement à voix basse avec ses avocats, réagissant à certaines questions en se frappant le front ou en lançant: "c'est n’importe quoi !"

Son ancien avocat Maurice Lantourne, lui aussi poursuivi, est ensuite longuement revenu à la barre sur la revente d'Adidas, à l'origine du conflit entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais. Une "opération machiavélique", selon le conseil.

Invité quelques minutes plus tard à s'exprimer, Bernard Tapie s'est lancé dans une métaphore médicale pour justifier le montant du préjudice moral qui lui a été accordé lors de l'arbitrage.

La présidente en a profité pour l'interroger sur des réunions qui ont eu lieu en 2007 avec l'équipe du candidat puis président Nicolas Sarkozy. L'ancien député est en effet soupçonné d'avoir manœuvré afin que l'arbitrage, une procédure de règlement privé, soit choisie par le gouvernement au lieu de l'instance judiciaire.

"Vous voulez savoir si Sarkozy et moi, on a tapé dans la main en disant: +on va faire un arbitrage ?+ Non !", s'est emporté M. Tapie, réfutant l'idée que l'Elysée ait "été de près ou de loin dans la +combine+ de la décision de l'arbitrage".

"J’ai rencontré Nicolas Sarkozy à l’Elysée une trentaine de fois et à titre personnel une dizaine", a-t-il aussi déclaré. "Quand je le voyais, ce n’était pas pour lui parler de ça. Je le voyais comme j’ai vu Chirac, comme j'ai vu tous les présidents et ce n'était pas pour parler de l'arbitrage".

Le procès doit se poursuivre mardi et s'achever le 14 juin au plus tard. La décision sera ensuite mise en délibéré à plusieurs semaines.

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