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Aux rencontres d'Aix, l'UE appelée à un sursaut face aux désordres mondiaux

Montée des nationalismes, tensions sur l'immigration et guerre commerciale: aux rencontres d'Aix-en-Provence, économistes et responsables politiques ont appelé dimanche l'Europe à un sursaut, jugeant nécessaire qu'elle surmonte ses divisions pour éviter un "engrenage dangereux".

"Depuis quelques mois, un air mauvais souffle sur le monde", qui a remis en cause "l'idée même que le multilatéralisme est le vecteur naturel de règlement de nos conflits", a constaté le Cercle des économistes dans sa déclaration finale, publiée à l'issue de trois jours de débats qu'il organisait dans la cité provençale.

Face à ce "mouvement irrépressible", "seules de nouvelles formes de dialogue, de nouveaux acteurs comme ce fut le cas pour la COP 21, permettront de se sortir de cet engrenage dangereux", a-t-il ajouté, dans un message à l'adresse des dirigeants français et étrangers.

Au cœur de l'attention: l'Union européenne, appelée à mettre un terme à ses divisions, notamment face à la guerre commerciale engagée par le président américain Donald Trump.

"La question n'est pas de savoir s'il y aura ou non une guerre commerciale. La guerre commerciale a déjà commencé", a estimé le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire, appelant les acteurs européens à la "lucidité".

"Dans cette mondialisation, il faut que les Etats européens fassent bloc, parce que ce que veulent nos partenaires ou nos adversaires, c'est nous diviser. Ce que veulent les Etats-Unis, c'est diviser la France et l'Allemagne", a-t-il insisté.

Les Etats-Unis ont imposé vendredi des droits de douane sur des marchandises chinoises d'une valeur estimée de 34 milliards d'euros, poussant Pékin à annoncer aussitôt des mesures de rétorsion, pour des montants équivalents.

Ce conflit commercial, qui fait suite à l'instauration de droits de douanes punitifs sur les importations d'acier et d'aluminium aux Etats-Unis, pourrait bientôt s'envenimer, M. Trump ayant menacé d'imposer des droits de douane de 20% sur les voitures importées aux Etats-Unis en provenance de l'UE.

"Si demain il devait y avoir une augmentation de tarif sur d'autres secteurs économiques, comme le secteur automobile, notre réaction devra être unie, forte, pour faire comprendre que l'Europe est aussi une puissance économique souveraine", a prévenu M. Le Maire.

- "Carte à jouer" -

Samedi, la directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde avait elle aussi estimé que l'Union européenne avait "une carte à jouer" dans la guerre commerciale opposant les Etats-Unis à la Chine, à condition d'être "unie".

"L'Europe doit surmonter ses propres divisions", a abondé dimanche Benoît Coeuré, membre du directoire de la Banque centrale européenne, estimant que l'Europe disposait de "deux atouts": un "grand marché, le premier du monde", et "une capacité à réguler qui est aussi la première du monde".

"L'ancre politique mondiale s'est détachée", a souligné de son côté Philipp Hildebrand, vice-président de BlackRock, plus gros gestionnaire d'actifs au monde. "Seule une réponse collective peut rétablir une forme de stabilité", a-t-il ajouté.

Qu'il s'agisse du Brexit, du nouveau gouvernement populiste en Italie ou des tensions sur la question migratoire, l'Union européenne est tiraillée de tous les côtés, victime d'une désaffection croissante de la part des citoyens de l'UE - ce qu fait craindre à certains une implosion.

"Les bénéfices de l'Union Européenne ne sont pas apparus suffisamment aux citoyens du fait du retard pris dans l'intégration fiscale", a reconnu l'ancien Premier ministre italien Mario Monti, jugeant nécessaire d'améliorer la "gouvernance" au sein de l'UE.

Plusieurs propositions, lors des Rencontres, ont été formulées en ce sens. Les économistes préconisent notamment de finaliser l'union bancaire, de faire monter en puissance le Mécanisme européen de solidarité (MES) et de renforcer la politique européenne en matière de concurrence.

Concernant la politique migratoire, ils proposent de "créer au sein d'un groupe de pays volontaires une procédure d'asile européen avec un droit d'asile commun, une agence commune et une protection commune des frontières".

"Nous devons, nous, Européens, reprendre la main" pour "être présents dans la réorganisation du monde, la réorganisation de la gouvernance mondiale", a insisté le président du Cercle des économistes, Jean-Hervé Lorenzi, en concluant ces 18e rencontres économiques.

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