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Brésil : un tanker sous pavillon grec "principal suspect" de la marée noire

Un tanker battant pavillon grec est "le principal suspect" de la marée noire qui a souillé plus de 2.000 km de côtes du nord-est du Brésil, ont annoncé vendredi les autorités, levant enfin une partie du mystère sur cette catastrophe d'une magnitude "inédite".

Une perquisition a eu lieu au siège d'une compagnie maritime à Rio de Janeiro, a annoncé la police fédérale, sans préciser le nom de la société ayant affrêté le navire, d'une capacité de 80.000 tonnes.

Le parquet a évoqué pour sa part des dégâts "incommensurables" sur les côtes brésiliennes où de très nombreux volontaires ont enlevé ces dernières semaines plusieurs milliers de tonnes de galettes et de boulettes noires et visqueuses sur des plages jusqu'ici paradisiaques.

"Cette catastrophe environnementale a atteint des estuaires, des mangroves et des embouchures de rivières dans tout le nord-est du Brésil, provoquant des dommages à la pêche, l'aquaculture et le tourisme", a dit la police dans un communiqué.

Alors que l'origine de cette marée noire restait mystérieuse depuis des semaines, le ministère de la Défense, la Marine et la police ont expliqué dans un communiqué commun avoir identifié, grâce à des données satellitaires, un tanker sous pavillon grec "qui transportait du brut provenant du terminal pétrolier +José+ au Venezuela et faisait route vers l'Afrique du Sud".

Les autorités brésiliennes ont détecté le 29 juillet le déversement de pétrole, à plus de 700 km des côtes de l'Etat nordestin de Paraiba. C'est le 30 août que le pétrole a commencé à apparaître sur les côtes brésiliennes, progressant ensuite vers le sud, jusque dans l'Etat de Bahia.

S'il a toujours laissé activé son système AIS d'identification par satellite, le bateau sous pavillon grec désigné comme étant le "principal suspect (...) n'a jamais communiqué à l'Autorité maritime brésilienne sur ce déversement", selon le communiqué officiel.

- "Poisson intelligent" -

Mais selon la Marine, citée par police fédérale, le pétrolier avait été retenu - à une date non précisée - durant quatre jours aux Etats-Unis en raison "d'anomalies (...) dans le système de séparation de l'eau et du brut pour la décharge en mer", une référence aux vidanges que les pétroliers sont autorisés à faire en haute mer.

La route du pétrolier a été précisée par la police à Recife (nord-est) : après avoir chargé sa cargaison au Venezuela, il est allé à Singapour, puis en Afrique du Sud et au Nigéria. Il se trouve actuellement au large des côtes sud-africaines.

Les autorités ignorent toujours si l'origine de cette marée noire "à caractère inédit" est accidentelle ou criminelle.

"Les investigations se poursuivent pour déterminer les circonstances et les facteurs de ce déversement en mer (accidentel ou intentionnel), et pour mesurer le volume de brut répandu" en mer, dit le communiqué officiel.

Au total, 264 localités de neuf Etats brésiliens ont été touchées. De nombreux animaux marins sont morts, en particulier des tortues de mer. Les efforts de nettoyage redoublent à l'approche de la haute saison touristique.

"J'ai tout arrêté pour venir nettoyer", déclare à l'AFP Glaucia Dias de Lima, une vendeuse de jus de coco sur une plage près de Recife. "S'il y a des volontaires qui veulent venir nous aider, qu'ils viennent. Et que viennent aussi les touristes".

L'économie locale est déjà durement touchée. "Tout s'est arrêté, il n'y a plus un pêcheur qui sorte en mer, plus un poisson à vendre" et de toute façon "les gens ne veulent plus acheter (du poisson) qui est peut-être contaminé", se lamente Sandra Lima, présidente d'une association de 1.500 pêcheurs.

Le ton employé vendredi par le ministère de la Défense, la Marine, la police et le parquet sur cette catastrophe environnementale contraste avec la désinvolture affichée jusqu'ici par les responsables brésiliens.

Jeudi, le secrétaire à l'Aquaculture et la Pêche, Jorge Seif Junior, a déclaré, lors d'un live du président Jair Bolsonaro sur Facebook : "le poisson est une bête intelligente, quand il voit du pétrole, il fuit. Alors vous pouvez consommer ces petits poissons sans aucun problème. (...) Les langoustes, les crevettes, tout est parfaitement sain", a-t-il assuré au président.

Une enquête du journal O Globo a révélé que les autorités avaient attendu 41 jours pour mettre en place le plan national d'urgence prévu pour ce genre de catastrophe.

Mardi, l'ONU avait "regretté les dégâts incalculables pour les écosystèmes marins et terrestres, ainsi que dans la vie des populations locales".

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