Accueil Actu

Ghosn, sous la menace de nouvelles poursuites, convoque la presse

L'ancien PDG de Renault-Nissan Carlos Ghosn a annoncé mercredi, de façon impromptue, une conférence de presse via un compte Twitter créé à cette occasion, au moment où, selon les médias, il est menacé de nouvelles poursuites par le parquet.

"Je me tiens prêt à dire la vérité à propos de ce qui se passe. Conférence de presse jeudi 11 avril", a-t-il écrit dans un court message.

Une porte-parole a plus tard confirmé l'authenticité de ce compte certifié (@carlosghosn), qui a gagné en quelques heures plus de 23.000 abonnés. Elle a précisé qu'il était "administré par ses avocats japonais, ainsi que le prévoient les conditions de sa libération conditionnelle" lui interdisant tout accès à internet.

- "Bien préparer" -

"Nous ne faisons rien qui viole les conditions de sa libération", a assuré de son côté l'avocat de M. Ghosn, Me Junichiro Hironaka, interrogé dans la soirée par les journalistes à la sortie de son cabinet.

Il a ajouté qu'il ne savait pas qui exactement avait rédigé le tweet.

Depuis qu'il a été relâché le 6 mars, moyennant le paiement d'une caution, après plus de 100 jours de détention pour des malversations financières présumées, le Franco-Libanais-Brésilien de 65 ans ne s'est pas exprimé devant la presse, impatiente d'entendre sa version des faits.

La chute brutale de ce patron naguère tout-puissant a fasciné la planète et fait vaciller l'alliance automobile Renault-Nissan-Mitsubishi Motors qu'il a hissée en 20 ans au premier rang mondial, et les questions sont nombreuses.

Mardi encore, son défenseur n'avait pas donné de date. "Il va bien et réfléchit soigneusement à la déclaration qu'il veut faire, cela surviendra dans un futur proche", avait-il dit. "Parce que sa portée sera significative, il prend le temps de bien préparer" cette conférence.

Actuellement assigné à résidence dans la capitale japonaise, M. Ghosn nie toute malversation. Lors d'un entretien accordé fin janvier à l'AFP dans la prison où il était détenu, il avait dénoncé "un complot" ourdi par Nissan pour faire échec à son projet d'intégration plus poussée du groupe avec Renault.

L'ex-grand patron fait l'objet de trois inculpations, dont deux pour avoir omis de déclarer une grande partie de ses revenus, sur la période cumulée 2010-2018, dans des documents de Nissan remis aux autorités boursières.

Il est également poursuivi pour abus de confiance. Selon le parquet, il a tenté de faire couvrir par Nissan "des pertes sur des investissements personnels" au moment de la crise financière d'octobre 2008.

M. Ghosn prépare actuellement sa défense pour un procès dont la date reste à fixer, mais il pourrait être stoppé par un nouveau rebondissement dans cette affaire rocambolesque. D'après les médias japonais, le parquet de Tokyo va décider sous peu de le poursuivre ou non sur de nouvelles accusations.

- La piste Oman -

Les procureurs soupçonnent le magnat déchu de l'automobile d'avoir détourné à des fins personnelles, entre 2012 et 2018, de l'argent versé par le constructeur à un distributeur d'Oman, ont rapporté l'agence de presse Jiji et des journaux.

L'enquête interne de Nissan a mis au jour qu'une somme de 35 millions de dollars issue de la "réserve du PDG" - un fonds initialement destiné à parer à des imprévus - avait été versée à Suhail Bahwan Automobiles, qui vend les véhicules de Nissan dans ce pays du Golfe, a affirmé à l'AFP une personne proche du dossier.

D'après cette source, un employé de cette société a alors transféré l'argent à une compagnie libanaise, "Good faith investments" (GFI), gérée par des associés de M. Ghosn. Une partie de cet argent lui serait indirectement revenu pour acheter un yacht et investir dans une société dirigée par son fils aux Etats-Unis.

Si le parquet décide d'engager une nouvelle procédure, il s'agira du quatrième chef d'accusation visant l'homme d'affaires.

Le cas échéant, sera-t-il ré-arrêté pour être entendu par les procureurs?

"Le procureur pourrait retenir des charges supplémentaires contre M. Ghosn sans nécessairement demander une nouvelle mise en détention", a commenté un avocat du barreau de Tokyo, s'exprimant sous couvert d'anonymat.

"Même s'il y a de nouvelles poursuites, le jugement du tribunal, selon lequel il ne pose pas de risque de fuite ou de destruction de preuves, ne devrait pas être remis en cause", espère Me Hironaka.

A l'issue d'une enquête parallèle, Renault a signalé à la justice française des transactions suspectes similaires au sein du groupe français.

"Aucune somme versée par Renault aux distributeurs d'Oman n'a été détournée de ses objectifs commerciaux et en aucun cas tout ou partie de cette somme n'a profité à Carlos Ghosn ou à sa famille", a réagi un de ses représentants.

À lire aussi

Sélectionné pour vous