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Casse du siècle: Cassandri se peint désormais en romancier

Il a ravalé sa fierté. Trahi par sa propre plume dans un livre où il s'attribuait le rôle de "cerveau" du "casse du siècle", Jacques Cassandri a tenté mercredi de convaincre le tribunal correctionnel de Marseille qu'il n'avait écrit qu'un roman.

L'ouvrage, paru en 2010, promettait la vérité sur le casse légendaire de la Société générale de Nice en 1976 : exit Albert Spaggiari, connu jusqu'à présent comme le "cerveau" de l'opération et condamné à perpétuité par contumace. Cassandri, un septuagénaire toujours fiché au grand banditisme, s'en attribuait la paternité.

Mal lui en prend : plus de quatre décennies après le vol record, cette confession circonstanciée lui doit de comparaître depuis lundi, aux côtés de ses enfants, pour le blanchiment du magot.

Lors de son interrogatoire mercredi, cette figure du banditisme marseillais, propriétaire avec sa famille de nombreux restaurants et boîtes de nuits, a tenté un virage à 180 degrés. "Je sais que je vais passer pour un comique, mais aujourd'hui les choses sont ce qu'elles sont (...) C'est uniquement un roman".

"Je n'ai pas du tout participé" au casse de la Société générale de Nice le 18 juillet 1976, martèle-t-il. Une opération rocambolesque, avec percement d'un tunnel depuis les égouts et un butin record de 46 millions de francs, l'équivalent de 27 millions d'euros aujourd'hui.

"J'aime écrire, j'ai déjà écrit, et là ça m'a paru intéressant de coucher les détails que je connaissais sur cette affaire", qui a déjà fait l'objet de nombreux livres et films, a-t-il justifié. Dans une écoute, M. Cassandri discute même d'une éventuelle adaptation sur grand écran...

Nombre de ses proches ont pourtant raconté que Cassandri, déjà condamné pour trafic de drogue après le démantèlement de la French Connection ou pour proxénétisme, se vantait régulièrement.

Des "bouches", certainement, comme Cassandri appellent ces Marseillais qui "parlent trop". Et qui seraient, à l'entendre, à l'origine de ses soucis.

-"très mal à l'aise"-

Confronté à ses déclarations lors de l'instruction, dans lesquelles il reconnaissait sa participation au casse, M. Cassandri s'est dit "très mal à l'aise" : "j'ai usurpé un rôle qui n'était pas le mien".

Pourquoi avoir continué de dire être l'instigateur du "casse du siècle" pendant l'enquête ?

"Si je dis toute la vérité à ce moment-là, je perds toute perspective d'avoir du succès avec mon livre", a-t-il avancé. "Comme j'avais dit à mon éditeur que j'étais le principal responsable, je ne voulais pas qu'il pense de moi que j'avais raconté des craques".

"C'est un acte de faiblesse, de la fanfaronnerie mal placée", a-t-il plaidé. A l'époque, après avoir d'abord fait publier le livre sous pseudo, il avait ensuite donné plusieurs interviews où il détaillait son rôle.

"Très habilement, les policiers m'ont dit que les faits étaient prescrits et que je ferais pas l'objet de poursuites, je me suis engouffré", a-t-il raconté à la barre.

Si le vol en lui-même était prescrit, le blanchiment ne l'est pas, même quatre décennies après le casse, ce qui vaut à M. Cassandri d'être poursuivi pour les investissements qu'il a pu faire par la suite.

L'homme n'a jamais vraiment travaillé et a pu acheter, ainsi qu'à ses proches une maison en Savoie, une boîte de nuit à Marseille, de terrains en Corse, des dizaines de milliers d'euros de vison...

Contraire à de nombreuses écoutes et déclarations de ses proches lors de l'enquête, la nouvelle position de M. Cassandri, 73 ans, n'a pas semblé convaincre le tribunal.

"Je trouve ça complètement stupide, ahurissant", a commenté la présidente Christine Mée, avant de passer à la multitude d'autres infractions reprochées à Cassandri lors de ce procès : abus de biens sociaux ou encore escroquerie en Corse, impliquant un élu et notable local, François Mosconi.

L'interrogatoire des enfants Cassandri et les réquisitions sont attendus jeudi.

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