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Chine: le FMI s'inquiète des firmes zombies et juge les banques sous-capitalisées

Entre les "sociétés zombies" ne survivant qu'à crédit et l'explosion de produits d'investissement mal régulés, les banques chinoises sont mal armées pour faire face à des risques financiers persistants, a averti jeudi le Fonds monétaire international (FMI).

Alors que la deuxième économie mondiale voit s'envoler sa dette, Pékin durcit son arsenal réglementaire, mais des "tensions" persistantes menacent la stabilité financière du pays, souligne le FMI dans un rapport sur le sujet.

Selon l'organisation de Washington, les établissements bancaires du géant asiatique sont mal équipés pour affronter une grave détérioration de la conjoncture, alors que s'intensifient les facteurs de tempête.

La taille du secteur financier chinois (actifs des banques, autres institutions et sociétés de gestion) approchait 470% du PIB l'an dernier... contre 263% cinq ans auparavant.

Première source d'inquiétude, l'envolée du crédit, à la faveur d'une politique monétaire accommodante, qui permet de maintenir à flot des "entreprises zombies" ayant depuis longtemps cessé d'être rentables et ne survivant qu'en s'endettant.

"Plutôt que de les laisser faire faillite, les pressions pour garder en vie ces entreprises non viables sont fortes", surtout pour des autorités locales soucieuses de préserver l'emploi et l'activité, note le rapport.

Ce soutien forcené au PIB se fait au prix d'un gonflement de l'endettement.

De même, la garantie "implicite" dont se réclament les groupes étatiques, c'est-à-dire l'idée que l'Etat ne les laissera pas sombrer et se porte garant de leur dette, accentue encore la prise de risques par les établissements financiers.

Sont notamment concernés la sidérurgie ou le charbon, des secteurs dominés par des groupes étatiques aux colossales surcapacités.

- 'Matelas' -

Dans ces conditions, "nous recommandons de moins mettre l'accent sur le PIB" pour alléger la pression sur les autorités locales, a insisté Ratna Sahay, directrice adjointe du bureau des marchés monétaires au FMI, lors d'une présentation diffusée en ligne.

Mais aussi d'abolir "graduellement" cette garantie implicite dont bénéficient les firmes publiques, tout en renforçant les ressources des banques pour digérer d'éventuelles perturbations, ajoute-t-elle.

De fait, dans un scénario extrême de fort ralentissement économique testé par le FMI, 27 des 33 banques examinées seraient insuffisamment capitalisées pour affronter la tempête.

Selon ces "tests de résistance", les capitaux qui leur feraient alors défaut équivaudraient à 2,5% du PIB chinois --soit, pour 2016, quelque 237 milliards d'euros-- et leur taux de créances douteuses bondirait.

La banque centrale chinoise (PBOC) a cependant contesté jeudi cette interprétation, jugeant qu'elle "ne reflétait pas complètement les conclusions des tests" et vantant la "force de résistance" de ses banques.

Certes, le système bancaire chinois satisfait déjà aux critères internationaux de solvabilité "Bâle 3", mais il n'est pas paré pour une crise exceptionnelle et "les circonstances justifient une augmentation supplémentaire de capital", argumente le FMI.

"Cela créerait un matelas permettant d'absorber les pertes potentielles durant la période de transition, avec le resserrement du crédit et la disparition des +garanties implicites+ (de l'Etat)", observe le rapport.

Et de pointer, autre péril potentiel, "une sous-estimation possible des risques liés aux transactions complexes et opaques" sur fond de "prolifération" des produits d'investissement mal régulés en-dehors du secteur bancaire.

- Régulateurs débordés? -

La créativité des acteurs financiers chinois et l'émergence de nouveaux produits d'investissement et de gestion d'actifs, populaires en raison des forts rendements promis, compliquent la tâche des régulateurs, abonde James Walsh, un autre responsable du Fonds.

Enfin, "les prêts à risque ont migré des banques vers des pans beaucoup moins régulés du système financier", notamment les plateformes de micro-crédit en ligne, selon le FMI.

Certes, lors du récent congrès quinquennal du Parti communiste au pouvoir, Pékin a assuré privilégier désormais une croissance "qualitative" basée sur l'innovation, la protection de l'environnement et... la réduction des risques financiers, sans se fixer de nouvel objectif de PIB.

Le régime s'efforce par ailleurs activement d'endiguer la "finance de l'ombre", et a notamment dévoilé vendredi de nouvelles restrictions encadrant drastiquement les micro-prêts en ligne.

Des mesures "bienvenues" pour le FMI. Mais celui-ci juge "insuffisants" les moyens des autorités chinoises de régulation pour superviser un système financier "vaste et complexe".

Selon le Fonds, les effectifs de la banque centrale et des différents régulateurs (banques, marchés, assureurs) n'ont pas augmenté depuis dix ans alors que le secteur financier, lui, doublait en taille.

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