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Coq Maurice: l'idéalisation de la campagne à l'épreuve, explique un chercheur

Un coq trop matinal, des canards et des cigales priés de baisser d'un ton... Les affaires de bruits de campagne qui alimentent la chronique médiatique révèlent-elles une difficile cohabitation entre ruraux et nouveaux venus ?

Ces querelles restent à la marge, estime le géographe Jean-Louis Yengué qui pilote le laboratoire Ruralités à l'université de Poitiers. Selon lui, ces affaires sont d'abord symptomatiques d'une évolution rapide des espaces ruraux qui peut s'accompagner d'"incompréhensions" voire de déceptions. "Le calme n'est pas le propre de la campagne", souligne l'enseignant-chercheur.

Q: Comment expliquer cette tension autour des bruits en zone rurale ?

R: Ces affaires sont à mettre en perspective avec l'évolution rapide et récente des espaces ruraux. Si la campagne reste encore fortement occupée dans l'espace par l'agriculture, elle n'y est plus seulement dédiée. D'autres usages se superposent dans un même lieu: une fonction environnementale, une fonction de loisirs, mais aussi une fonction résidentielle. Plus qu'ailleurs, il y a à la campagne, des groupes qui doivent composer ensemble.

De fait, de plus en plus de personnes vont dans les espaces ruraux, non pas pour y pratiquer l'agriculture, mais pour y vivre. Et cette diversité de fonctions va entraîner des intérêts différents, sur un même espace, voire des crispations. Ces tensions peuvent survenir entre ruraux et néo-ruraux, mais aussi entre nouveaux habitants entre eux.

Chacun essaie de défendre son territoire ! Ces intérêts divergents sont exacerbés en milieu rural en raison de son évolution rapide et récente.

Q: Ces crispations sont-elles aussi liées à une certaine idéalisation de la campagne ?

Si certains vont s'adapter à la vie rurale, d'autres recherchent le calme et les espaces verts, en tout cas, une projection de ce qu'ils n'ont pas en ville. Mais le calme et la naturalité ne sont pas le propre de la campagne !

L'espace rural est truffé de bruits, comme en ville. Pendant la période des moissons, il peut arriver que la moissonneuse-batteuse passe la nuit !

Q: Ces conflits sont-ils devenus fréquents ?

R: De temps en temps, il y a des crispations et des mésentente, de temps en temps, cela fait les choux gras des médias. Mais l'idée qu'il y aurait un clivage ancré entre ruraux et habitants, je ne le vois pas. Dans la plupart des cas, les urbains qui arrivent à la campagne sont les bienvenus, la cohabitation se passe dans de très bonnes conditions.

On assiste d'ailleurs plutôt à un rapprochement entre les mondes urbain et rural: d'un côté, la campagne n'est plus seulement agricole, et de l'autre, l'agriculture s'implante aussi en ville.

Ces affaires médiatiques relèvent avant tout de problèmes de voisinage, comme ceux que l'on retrouve en ville.

Le coq, les canards, les cigales, c'est la partie visible de ces conflits, mais ce n'est pas ceux-là que je vois le plus dans mes travaux.

L'un des conflits récurrents que l'on observe en zone rurale, c'est tout ce qui tourne autour de l'utilisation des pesticides.

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