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Crash du Rio-Paris: des familles craignent que l'expertise finale ne dédouane Airbus

Neuf ans après l'accident du vol d'Air France Rio-Paris, le rapport définitif de contre-expertise judiciaire tend à dédouaner un peu plus Airbus et met à nouveau l'accent sur la responsabilité des pilotes, suscitant l'indignation de familles des victimes qui craignent de voir le constructeur échapper à un procès.

Les conclusions de ce rapport du 24 septembre, dont l'AFP a eu connaissance, ont été remises aux juges d'instructions du pôle accident collectif à Paris, qui ont repris en main cette instruction dans laquelle Air France et Airbus ont été mis en examen en 2011 pour "homicides involontaires".

Le rapport définitif reprend en grande partie la version provisoire remise en décembre 2017, qui avait déjà suscité l'incompréhension chez les proches des victimes. Mais "Airbus a disparu des écrans radars", a dénoncé Danièle Lamy, présidente de l'association Entraide et Solidarité AF447 qui regroupe quelque 360 proches des victimes.

Le 1er juin 2009, le vol AF447 s'était abîmé dans l'océan Atlantique. Les 228 personnes à bord avaient péri. Point de départ de la catastrophe : le givrage en vol de sondes Pitot, qui a conduit à un dérèglement des mesures de vitesse de l'Airbus A330 et désorienté les pilotes.

Le rapport final réaffirme que la "cause directe" de l'accident "résulte des actions inadaptées en pilotage manuel" de l'équipage.

"Le pilotage manuel a été imposé par la déconnexion du pilote automatique consécutive au givrage momentané des sondes", écrivent les trois experts, reprenant leur formulation initiale en y ajoutant le terme "momentané".

Ces sondes, qu'Airbus avait modifiées après l'accident, sont pourtant un élément-clé de la bataille judiciaire que se livrent la compagnie aérienne et le constructeur.

- "Monde confiné de l'aéronautique" -

Parmi les causes indirectes, les experts avaient aussi relevé "l'ambiguïté du classement de la procédure Stall", l'alarme de décrochage mal interprétée par les pilotes, dans la documentation d'Airbus et d'Air France. Ils soulignent désormais que "ce classement était cependant validé par la DGAC" (Direction générale de l'aviation civile), exonérant ainsi en partie les deux sociétés.

"Les actions des pilotes étaient conformes à la situation présentée par des écrans confus et des alarmes erratiques", estime pour sa part l'association, qui réclame un procès pour que soient déterminées "les responsabilités d'Airbus et d'Air France".

Rendue en 2012, une première expertise avait mis en exergue à la fois des défaillances de l'équipage et des problèmes techniques ainsi qu'un déficit d'information des pilotes en cas de givrage de ces sondes malgré une recrudescence d'incidents antérieurs signalés à Airbus.

Ce premier rapport est toujours au dossier, s'était félicité en janvier Me Alain Jakubowicz, un des avocats de l'association. Il avait pointé du doigt la difficulté à choisir des experts indépendants dans le "monde confiné" de l'aéronautique.

"Air France ne peut pas souscrire aux conclusions de ce nouveau rapport qui conduisent notamment à la mise en cause sévère de l'équipage disparu", a de son côté fait valoir la compagnie.

L'enquête, close en 2014, avait dû être relancée après l'annulation, un an plus tard, de la première contre-expertise. Des proches des victimes et Air France l'avaient attaquée devant la cour d'appel, la jugeant biaisée en faveur du constructeur.

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