Accueil Actu

Crash EgyptAir: la maintenance de l'Airbus au coeur des interrogations

Près de trois ans après le crash de l'Airbus A320 d'EgyptAir, les causes du drame restent à éclaircir mais une première expertise ordonnée par les juges français conclut que l'appareil n'aurait pas dû décoller du fait de "défauts récurrents".

Le vol MS804, reliant Paris au Caire, s'était abîmé en mer Méditerranée le 19 mai 2016 entre la Crète et la côte nord de l'Égypte, après avoir soudainement disparu des écrans radars. Les 66 personnes à bord, dont 40 Égyptiens et 15 Français, avaient péri.

Alors que Le Caire a très vite mis en avant la piste d'un attentat, Paris privilégie depuis le départ la thèse d'un incident technique.

Les trois juges d'instruction saisis du dossier à Paris ont ordonné deux expertises pour reconstituer le scenario de la catastrophe. La première, concernant la maintenance, a été remise aux magistrats en juin.

Dans ce document de 76 pages, révélé par Le Parisien et dont l'AFP a eu connaissance, les deux experts constatent "le grand manque de rigueur des équipages et des services techniques d'EgyptAir" dans le traitement des documents techniques de l'appareil.

Ils relèvent ainsi divers incidents au cours des rotations de l'aéronef, qui n'ont pas été signalés par les différents pilotes et n'ont donc pas été suivis d'opérations de maintenance.

Ils estiment que lesdits défauts "ne sont signalés que lorsque l'aéronef est en base principale (Le Caire) afin, de toute évidence, d'éviter une immobilisation (...) en escale pour dépannage".

"Quand des alertes sont éludées de manière récurrente, cela aboutit à un crash et il devient impossible de soutenir que c'est le fruit du hasard. Il va falloir grâce à ce rapport et aux investigations tirer toutes les conséquences sur les responsabilités des différents intervenants", a commenté auprès de l'AFP Me Antoine Lachenaud, avocat de la famille de Clément Daeschner-Cormary, mort à 26 ans dans le crash.

- L'avion n'aurait pas dû redécoller -

"L'expertise a mis en évidence que cet appareil aurait dû faire l'objet de vérifications lors des 4 précédents vols, et n'aurait pas dû quitter Le Caire après l'enchaînement de défauts récurrents, mais non signalés par les équipages successifs", résument les experts.

Au départ de l'avion à Roissy Charles-de-Gaulle, sans connaissance de ses précédentes défaillances, le technicien n'a donc pas été en mesure de l'interdire de vol, ajoutent-ils.

Les experts, un technicien et un inspecteur aéronautiques, ont également mis en exergue d'éventuels manques dans les compétences et accréditation du technicien chargé de la remise en oeuvre de l'avion à Paris.

Pour autant, ils se gardent de toute conclusion, soulignant que "l'étude des éléments" mis à leur disposition "ne permet pas de déterminer si l'accident (...) découle des différents défauts techniques".

Sans pouvoir l'attester, ils soupçonnent toutefois l'un de ces défauts d'être "le signe précurseur d'une défaillance électrique majeure".

Ils s'interrogent également sur le remplacement, trois jours avant le crash, du boîtier contenant le masque à oxygène du copilote, pour des raisons inconnues. Or, rappellent-ils, "le remplacement de cet équipement requiert une vérification très soigneuse (...), les fuites d'oxygène étant particulièrement dangereuses".

Dans un rapport publié à l'été 2018, le Bureau d'enquêtes français pour la sécurité de l'aviation civile (BEA) avait affirmé que son "hypothèse privilégiée" était "qu'un incendie s'est déclaré dans le poste de pilotage (...), incendie qui s'est développé rapidement et a entraîné la perte de contrôle de l'avion".

Une seconde expertise demandée par les magistrats doit déterminer si des smartphones et tablettes posés dans le cockpit ont pu être l'objet d'un emballement thermique causant un départ de feu.

Selon une source proche du dossier, les enquêteurs ont commencé à analyser la copie des enregistrements sonores du cockpit issus d’une des boîtes noires. La justice qui attendait de longue date ces données les ont finalement récupérées à l’automne dernier lors d’une perquisition au BEA.

Côté égyptien, les autorités ont mis un terme fin 2016 à leur enquête de sécurité et transmis le dossier à la justice égyptienne, sans nouvelles jusqu'ici.

Le Caire avait affirmé en décembre 2016 avoir découvert des traces d'explosifs sur des restes de victimes, suscitant le scepticisme côté français d'autant qu'aucune organisation n'avait revendiqué un attentat.

À lire aussi

Sélectionné pour vous