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Damien Lacombe: "Une Coop est accrochée à ses adhérents"

Le président de Coop de France Métiers du Lait, Damien Lacombe, également président de Sodiaal, défend les coopératives agricoles, selon lui toujours fidèles à l'idéal coopératif même quand elles atteignent des tailles dignes de géants de l'agroalimentaire.

Q: Est-ce qu'à partir d'une certaine taille, l'esprit coopératif est en danger dans une coopérative ?

R: "Ce qui m'agace le plus, c'est qu'on compare nos coopératives à des multinationales. Une Coop est ancrée sur son territoire, ce qui fait sa force est d'être accrochée à ses adhérents. Les usines des coopératives, les outils de transformation, font partie de mon patrimoine en tant qu'éleveur. Ce sont des outils collectifs.

Même si les coopératives ont une taille importante, elles restent attachées aux exploitations. Plus la taille est grande, plus il faut mettre en oeuvre des moyens pour que le sentiment d'appartenance, de proximité, reste fort.

Il y a parfois quelques incompréhensions sur le terrain. Quand on a 3.000, 5.000 ou 20.000 adhérents, il faut avoir des règles adaptées dans la prise de décision qui respectent les règles coopératives. La notion d'organisation, de gouvernance prend de l'importance. Il faut de la pédagogie, mais aussi des remontées d'information, un échange permanent.

On n'est pas des sociétés du CAC 40. Le résultat de l'année est très important pour les associés collaborateurs, mais si on ne tient compte que de ça, on n'est pas à la hauteur des enjeux coopératifs. Si on ne pense pas aux années, aux générations à venir, on ne remplit pas notre rôle d'élu.

Par exemple, dans certains zones isolées, la production laitière subsiste car la coopérative continue à collecter le lait, ce qui pèse forcément sur sa rentabilité."

Q: Que répondez-vous à ceux qui s'inquiètent de voir se multiplier les filiales, ou enfler la technostructure ?

R: "Il faut expliquer notre organigramme par un souci de simplification maximale. Si on mélange le lait de consommation et le fromage dans une même entité juridique, rapidement ce sera le brouillard. Il faut voir quelle organisation avoir pour une meilleure efficacité. Pour expliquer les montages qu'on a dans nos coopératives, on prend l'exemple des exploitations de nos adhérents. Certains agriculteurs-adhérents ont aujourd'hui une société séparée pour gérer leur activité photovoltaïque par exemple. Les gens comprennent très bien.

Lors des réunions de terrain de Sodiaal, les adhérents comprennent aussi qu'il faut aller chercher les meilleurs managers pour réaliser ce qu'on a à faire (...) quelle que soit la taille de la coopérative"

Q: Faire entrer des partenaires privés dans les filiales d'une coopérative ne pose-t-il pas de question ?

R: Dans toutes les sociétés partagées avec d'autres acteurs, il y a un pacte d'actionnaire: on y inscrit les droits des différents associés et cela protège les intérêts des différentes parties.

Après, on a des intérêts communs: que l'activité de transformation dégage un bénéfice, qui remonte jusqu'à nos adhérents.

En général, les coopératives veillent à ce que les producteurs soient représentés jusque dans ces sociétés. Dans le conseil d'administration de Yoplait (détenu à 51% par le groupe américain General Mills, NDLR), il y a quatre représentants de Sodiaal, deux managers et deux éleveurs, pour vérifier que la filiale remplit son rôle de générer de la valeur ajoutée.

Ca passe beaucoup par les hommes, d'où la nécessité d'une confiance forte entre producteurs et élus. Mais la confiance ça se construit.

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