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Défenseur du port d'arme, un shérif américain défie les autorités de Virginie

Le shérif Scott Jenkins a juré de protéger la Constitution américaine et son deuxième amendement qui garantit le droit pour chacun de détenir des armes, face aux autorités de Virginie qui veulent selon lui priver les citoyens de ce droit inaliénable.

"La Constitution est très claire, le deuxième amendement garantit à chaque citoyen le droit de porter une arme, spécialement face à un gouvernement tyrannique", affirme à l'AFP le policier du comté de Culpeper, une région rurale à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Washington.

Depuis décembre, il est devenu l'une des figures d'un mouvement de contestation qui organise lundi une manifestation à Richmond, la capitale de cet Etat de l'est du pays. Au moins 10.000 défenseurs du deuxième amendement sont attendus, selon les médias.

Si celui-ci garantit le "droit du peuple de détenir et de porter des armes", il fait l'objet d'interprétations divergentes. La Cour suprême a ainsi limité ce droit au domicile, laissant les villes et les Etats réguler leur transport.

- "Corde sensible" -

La Virginie, aux traditions ancrées dans le conservatisme, est passée en novembre dans l'escarcelle des démocrates. Ils ont promis de s'attaquer au laxisme qui entoure, selon eux, le port d'arme notamment après le choc provoqué par la tuerie de Virginia Beach (12 morts) en mai.

Les textes à l'étude interdisent les chargeurs de plus de dix cartouches, l'achat de plus d'une arme par mois et permettent à un juge de saisir les armes d'individus considérés comme dangereux. Le projet d'interdiction à la vente des fusils semi-automatiques a en revanche été abandonné.

"Nous avons déjà des lois qui fonctionnent, nous n'avons pas besoin de nouvelles restrictions", affirme l'imposant shérif, qui prône le droit à l'autodéfense de ses citoyens.

"Si l'on limite le droit des citoyens à détenir des armes, on encourage les criminels à faire encore plus de mal", ajoute-t-il.

Dans tous l'Etat, plus de cent comtés et localités - dont Culpeper - se sont proclamés "sanctuaires", menaçant de ne pas appliquer la loi.

M. Jenkins, qui préfère le terme de "comté constitutionnel", a promis que si ces textes étaient adoptés, il nommerait adjoint ou auxiliaire tous ceux qui le souhaiteraient, et qui rempliraient les conditions, leur permettant de conserver légalement leurs armes. Plusieurs milliers de candidats se sont déjà déclarés dans tout l'Etat, selon lui.

"Je ne dis pas que je n'appliquerai pas la loi, mais je ne dis pas non plus que je l'appliquerai", explique-t-il.

"Libertarien plus que républicain", il est partisan d'un rôle minimum du gouvernement dont il dénonce l'"ingérence" dans la vie des Américains.

Pour le shérif, la controverse illustre le fossé entre les "zones urbaines (qui) tendent vers la gauche avec une idéologie progressiste" et les zones rurales, comme Culpeper, où "la chasse et le tir de loisir font partie de la culture et où "les gens ont grandi au milieu des armes."

"La plupart d'entre eux n'ont jamais voté, ne sont même pas inscrits sur les listes électorales", dit-il, mais le gouverneur démocrate Ralph Northam "a touché une corde si sensible, si profonde que cela a réveillé les gens".

- "Hors-la-loi" -

A Warrenton, à une trentaine de kilomètres de Culpeper, les propriétaire de l'armurerie familiale Clark Brothers applaudissent la décision du shérif Jenkins.

"Il a juré de défendre la Constitution et c'est ce qu'il fait, je serai certainement son adjointe s'il me le demandait", explique Allison Clark, derrière le comptoir où pistolets, revolvers et fusils de tous calibres sont exposés.

A Culpeper, tous ne soutiennent pas le shérif. "Le bon sens et la régulation des armes ne vont pas à l'encontre du deuxième amendement", affirme Phoebe Muenger, une retraitée.

"Les citoyens ont le droit d'être en sécurité, les enfants ont le droit d'aller à l'école sans avoir peur", dit-elle en référence aux fusillades en milieu scolaire qui endeuillent régulièrement le pays.

Pour Richard Schragger, professeur de droit à l'Université de Virginie, il faut puiser dans l'histoire de cet Etat, berceau de l'esclavagisme en Amérique, capitale des Confédérés lors de la guerre de Sécession et qui s'est opposé violemment à la déségrégation dans les années 1960, pour expliquer cette propension à se proclamer "hors-la-loi".

En refusant une législation adoptée par une assemblée élue, l'universitaire craint que les opposants, minoritaires, veuillent "choisir les lois auxquelles ils obéiront".

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