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Déjà fragilisé, le DG de Nissan avoue avoir été trop payé

Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, a reconnu avoir reçu une rémunération excédant ce à quoi il avait droit, selon des propos rapportés jeudi par plusieurs médias japonais, une affaire qui fragilise encore un peu plus sa légitimité.

"J'ai reçu une rétribution sous une forme qui ne correspond pas aux règles en vigueur. Je pensais que cela résultait de procédures correctes", a-t-il déclaré brièvement à des journalistes, selon des propos rapportés par l'agence de presse Jiji.

M. Saikawa, qui a pris la direction exécutive du constructeur automobile en 2017, succédant alors à Carlos Ghosn (resté ensuite président de Nissan jusqu'à son éviction en novembre dernier), a présenté ses excuses "pour le trouble causé", affirmant qu'il avait l'intention de restituer les émoluments indûment perçus.

Leur montant s'élèverait à 47 millions de yens (environ 400.000 euros), mais Nissan estimerait que l'opération n'a rien d'illégal, ont rapporté les médias.

Cet aveu intervient après que des articles de presse ont fait état de résultats d'investigations internes à Nissan sur ces possibles rétributions excédentaires, effectuées dans le cadre d'un mécanisme connu sous le nom "stock appreciation rights" (SAR), en vertu duquel les dirigeants peuvent recevoir en numéraire une prime correspondant à la plus-value liée à l'augmentation de la valeur de l'action de leur entreprise au cours d'une période définie.

"Les conclusions de l'enquête interne de Nissan seront présentées au conseil d'administration le 9 septembre", a déclaré jeudi à l'AFP une porte-parole du groupe, sans commenter les déclarations de M. Saikawa.

Selon d'autres de ses propos, rapportés par la chaîne TBS, M. Saikawa a mis ces mauvaises pratiques sur le compte "du système mis en place sous Ghosn". La gestion de cette partie de sa rémunération était confiée au secrétariat dirigé par Greg Kelly, l'ancien bras droit de M. Ghosn, a-t-il affirmé.

- "Encore plus fragile qu'avant"

M. Saikawa était déjà fragilisé par d'autres accusations formulées en juin par M. Kelly, arrêté en même temps que Carlos Ghosn et également inculpé sur un des volets de l'affaire.

Dans la presse nippone, M. Kelly avait notamment souligné que M. Saikawa avait lui-même apposé sa signature sur un document avalisant une minoration de revenus de M. Ghosn, et qu'il avait aussi enfreint les règles de la compagnie pour s'offrir une propriété à Tokyo.

La position de M. Saikawa à la tête de Nissan "est à présent encore plus fragile qu'avant", parce que "l'intégrité est requise" pour un dirigeant, tout autant que les performances de son groupe, a estimé Tatsuo Yoshida, analyste automobile chez Bloomberg Intelligence interrogé par l'AFP.

Désormais M. Saikawa est en difficulté "sur les deux tableaux à la fois", a ajouté l'analyste, en faisant allusion à l'actuelle dégringolade des bénéfices et des ventes de Nissan, qui a entamé une profonde restructuration de ses activités de production dans le monde.

Fin juillet déjà, le responsable du comité de nominations de Nissan, Masakazu Toyoda, avait publiquement déclaré que le groupe voulait préparer "au plus vite" la succession de M. Saikawa.

Nissan est en pleine refonte de son système de gouvernance dont les défaillances ont été mises au grand jour après l'arrestation de Carlos Ghosn, inculpé au Japon pour malversations financières que les procédures de contrôle internes n'ont pas empêchées.

Libéré sous caution, l'ancien patron de l'alliance Renault-Nissan prépare actuellement son procès, qui n'aura pas lieu avant l'an prochain.

En juin, les actionnaires de Nissan ont voté en faveur de diverses mesures, notamment la création de trois nouveaux comités de surveillance chargés de la nomination des dirigeants, des questions de rémunération et de l'audit. M. Saikawa avait alors été reconduit dans ses fonctions, malgré le désaveu de certains actionnaires.

A la suite des déclarations de M. Saikawa dans la presse, Nissan a reporté sine die une importante émission obligataire de 250 milliards de yens (2,12 milliards d'euros) initialement prévue jeudi.

Cependant le scandale ne portait pas préjudice à l'action Nissan, qui grimpait de près de 2% à 657,6 yens vers 12H46 (03H46 GMT) à la Bourse de Tokyo, alors que l'indice vedette Nikkei était lui-même en fort rebond de 2,34%.

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