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Difficile débat autour du projet aurifère Montagne d'or en Guyane

Le projet d'exploitation aurifère controversé de la Montagne d'or, dans l'ouest de la Guyane, suscite une forte opposition sur le territoire, où le débat public, entamé en avril, se tient dans un climat très tendu.

Ce projet d'exploitation minière à ciel ouvert, porté par un consortium russo-canadien, Nordgold-Columbus Gold, prévoit l'exploitation d'une mine, à partir de 2022, au sud de la ville de Saint-Laurent du Maroni, en forêt tropicale, et permettrait la création de 750 emplois directs, dont au moins 90% d'emploi local, et 3.000 emplois indirects, selon ses promoteurs.

Le plus grand projet d'extraction d'or primaire jamais proposé en France, d'une superficie de 8 km2, prévoit notamment une fosse de 100 hectares, pour une exploitation sur 12 ans de 6,7 tonnes d'or par an. Il utiliserait un procédé de récupération de l'or par cyanuration en circuit fermé.

Il fait l'objet d'un débat public jusqu'au 7 juillet en Guyane, mené par la Commission particulière du débat public, autorité administrative indépendante, mais les premières réunions publiques et ateliers thématiques se sont tenus début avril sous haute tension à Saint-Laurent du Maroni et Cayenne, avec la forte présence d'un collectif d'opposants, "Or de question", rassemblant ONG environnementales, organisations autochtones et mouvements politiques, a constaté l'AFP.

D'autres réunions et ateliers sont programmés fin avril et courant mai.

Pour Pierre Paris, président de la Compagnie Montagne d'Or (CMO), maître d'ouvrage,"aujourd'hui, le débat ne peut pas avoir lieu, il y a des menaces". "La parole est monopolisée par les opposants", qui ne sont pourtant qu'"une minorité" selon lui.

"Qu'ils mangent leur or, moi je veux boire de l'eau!", pouvait-on entendre lors de la réunion publique de Cayenne, où les opposants, majoritaires dans la salle, n'ont cessé de dénoncer "mensonges" et "omissions" de la compagnie minière.

Des membres de la Jeunesse autochtone de Guyane, des 500 Frères et de Tròp violans, deux collectifs citoyens, ont aussi défilé, comme à Saint-Laurent du Maroni, pour manifester leur opposition.

- Réserves biologiques -

Ils dénoncent la déforestation, la proximité du site avec deux réserves biologiques et s'inquiètent des millions de tonnes de déchets qui seront enfouis, des boues issues du processus pour détacher l'or de la roche avec du cyanure.

Le Fonds mondial pour la nature (WWF) pointe aussi "une aberration en termes de rendement de l'argent public investi".

Dans une tribune sur le site Outremers360, Patrick Lecante, président du Comité de l'eau et de la biodiversité de Guyane, parle d'un "procédé industriel très risqué" et souligne que si "ce projet possède sans doute des vertus économiques", il "divise notre société" et "nous donne de faux espoirs d’embellie économique".

Pierre Paris affirme au contraire que son projet "minimise les impacts", avec un site sur une zone en partie déjà exploitée, "des choix techniques" pour "maximiser la récupération de l'or et produire moins de résidus". Il souligne également que le site fera l'objet d'une remise en état après la fermeture.

Il note que le mouvement social de mars-avril 2017 a suscité des revendications pour "plus d'indépendance et plus de retombées pour le territoire". S'il se dit prêt à envisager l'ouverture de l'actionnariat aux collectivités locales, il accuse les opposants d'être "plutôt dans l'idée de refuser tout projet de développement".

Le projet est soutenu par le Medef, la Chambre de commerce et d'industrie, la quasi-totalité des élus du littoral et le président de la Collectivité territoriale de Guyane, Rodolphe Alexandre (DVG). Ce dernier, mais aussi le maire de Saint-Laurent du Maroni Léon Bertrand (LR), ont été hués par les opposants lors des réunions publiques.

Rodolphe Alexandre a critiqué des débats "tronqués, falsifiés". "Or de question" répond qu'il s'agit d'un débat "démocratique" et déplore "la diabolisation des opposants".

Lors de sa visite en Guyane fin octobre, Emmanuel Macron avait appelé les Guyanais à participer au débat public. Lorsqu'il était ministre de l'Économie, il avait soutenu ce projet. Son ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot, lui, le rejette.

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