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Discrimination: rappeler la loi aux agences immobilières a des "effets positifs"

Rappeler la loi aux agences immobilières permet de réduire les discriminations en matière d'accès au logement, selon une étude publiée mardi par le Défenseur des droits, qui constate les "effets positifs à court terme" de l'envoi d'un courrier aux professionnels.

L'institution, dirigée par l'ancien ministre Jacques Toubon, a réalisé entre 2017 et 2018 un test sur 343 agences immobilières "à risque discriminatoire", situées dans les 50 plus grandes aires urbaines de France.

Elle a envoyé à la moitié d'entre elles un "courrier d'alerte", rappelant le cadre légal, auquel elle a joint un guide pédagogique de bonnes pratiques intitulé "Louer sans discriminer". Puis elle a comparé pendant plusieurs mois l'accueil réservé par tous les professionnels à deux demandes fictives de visites d'appartement: l'une émanant d'un candidat "avec une origine française présumée, l'autre maghrébine".

Ce courrier est un "puissant +réducteur+ de discriminations" à court terme, conclut l'étude. D'après les résultats, "il n'y a plus de différence significative de traitement entre les deux candidats dans les agences ayant reçu le courrier, trois et neuf mois après la réception du courrier, alors que l'écart se maintient de façon constante dans les agences témoins".

Lors du test réalisé trois mois après l'envoi du courrier par exemple, le candidat présumé maghrébin reçoit ainsi 47,2% de réponses positives pour une visite de la part des agences sensibilisées, contre 52,1% de réponses positives pour le candidat d'origine française.

Tandis que dans les agences n'ayant rien reçu, les réponses positives chutent à 38,1% pour le candidat d'origine maghrébine, contre 46,3% pour celui d'origine française, "une différence de 8,2 points statistiquement significative", selon le Défenseur des droits.

En revanche, les "effets positifs" du courrier "s'estompent à 15 mois", observe l'étude. A cet horizon, l'écart du taux de réponses positives entre le candidat d'origine française et celui d'origine maghrébine est de 9,68 points dans les agences ayant reçu le courrier d'alerte, contre 11,2 dans celles ne l'ayant pas reçu.

Lors de la présentation des résultats de cette étude devant la presse, M. Toubon a salué une étude "inédite", qui tente "d'objectiver les moyens les mieux à même de faire évoluer les comportements discriminatoires", un domaine jusqu'ici "peu exploré".

Il a appelé les professionnels du secteur "à s'allier pour que ces discriminations qui sont particulièrement débilitantes et qui minent la cohésion de notre pays disparaissent".

En matière d'accès au logement, les discriminations "restent fréquentes", a-t-il rappelé, en citant les résultat du test Dalton publié en 2017 par le CNRS. Cette étude, qui portait sur 5.000 annonces immobilières de particuliers et de professionnels en France, avait révélé que le taux de réponses positives pour un premier rendez-vous d'un candidat présumé maghrébin était "presque 27%" inférieur à celui d'un candidat perçu comme français.

L'ancien ministre s'est également interrogé sur "l'équilibre" à adopter entre pédagogie et sanctions. En matière de logement, les sanctions pénales sont rares et "peuvent s'apparenter à des Everest", a-t-il estimé.

En février, deux agents immobiliers de Palaiseau (Essonne) ont été condamnés à quatre et deux mois de prison avec sursis pour avoir refusé de louer des biens à des personnes à cause de leur couleur de peau. Le patron de l'agence avait notamment été filmé en 2006 par une employée en train d'expliquer: "Je vous préviens tout de suite, je ne veux pas de locataires +blacks+, pas d'Arabes, pas de +japs+, tout ce qui n'est pas blanc, je n'en veux pas".

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