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En Chine, JCDecaux déploie une stratégie à double détente

Encore anecdotique il y a 20 ans pour JCDecaux, la Chine est devenue le moteur de croissance du géant français, fruit d'une stratégie particulière reposant sur la publicité dans les métros et la multiplication d'alliances.

Sur ce marché, largement éclaté, avec une demi-douzaine d'acteurs d'envergure nationale et plusieurs acteurs locaux, dont souvent la presse officielle, le groupe a choisi de laisser de côté le mobilier urbain, son métier originel, pour se concentrer sur les transports.

"Le groupe est très présent dans le segment de la publicité dans les transports, métros, tramways, aéroports, et nous pensons que leur stratégie est de continuer de profiter de ce marché en croissance", décrit Solène Van Eetvelde, analyste crédit chez S&P Global Ratings.

L'entrée sur le marché chinois est pratiquement le fruit du hasard puisqu'en rachetant en 1999 le pôle publicité extérieur de Havas, Avenir, JCDecaux s'est retrouvé avec une implantation à Singapour et Hong Kong.

"Cette acquisition nous a apporté les billboards (les panneaux d'affichage de très grande taille, NDLR), les aéroports ainsi que les métros de Hong Kong et Singapour", explique Emmanuel Bastide, le directeur général de JCDecaux en Asie.

"Aéroports et transports étaient les deux axes sur lesquels le groupe voulait se développer et la raison de ce rachat", ajoute-t-il.

Mais ce n'est qu'en 2005 que l'accès au marché chinois s'est concrétisé, avec le rachat de deux entreprises chinoises concurrentes, MNI et MPI, toutes deux cotées à la Bourse de Hong Kong et présentes dans les métros de Pékin et Shanghaï.

Désormais, le groupe est actif dans une vingtaine des plus grosses villes du pays, où il gère la publicité dans les métros, en partie ou totalement, et les aéroports, majoritairement, ainsi que les tramways et abribus à Hong Kong.

"Aujourd'hui, Hong Kong est notre vitrine, sans cette ville nous n'aurions pas la Chine", insiste Emmanuel Bastide.

- S'allier avec des locaux -

Plutôt que de s'allier avec un concurrent national dans une co-entreprise, comme cela peut se faire dans d'autres secteurs, JCDecaux a pris le parti de les multiplier et de les créer avec les délégataires, qu'il s'agisse des gestionnaires d'aéroports ou de transports, le temps du contrat de concession.

"Nous sommes sur des marchés très locaux, il est donc préférable d'avoir des partenaires très locaux, qui connaissent bien les autorités municipales ou de la province", explique M. Bastide.

Autre avantage, "le délégataire est également intéressé à la réussite économique de la concession, les choses se passent donc très bien".

JCDecaux ne divulgue pas son chiffre d'affaires dans l'ex-Empire du Milieu mais admet à demi-mot que le pays représente entre 18 et 20% de son chiffre d'affaires global, soit entre 650 millions et 700 millions d'euros.

"Même si la Chine est en net ralentissement, les perspectives restent plus intéressantes qu'aux Etats-Unis ou en Europe, notamment du fait d'une urbanisation qui est toujours en phase d'accélération", rappelle Christopher Dembik, responsable recherche macroéconomique chez Saxo Bank.

Reste que le marché chinois peut se montrer aléatoire par moment. Très lié à la consommation, il subit directement les changements de réglementation ou les périodes d'incertitude.

En 2008 par exemple, la gouvernement local de Pékin décide d'interdire le mobilier urbain à l'approche des Jeux Olympiques, exception faite des abribus, et le démonte dans la nuit, une perte sèche pour JCDecaux, alors concessionnaire.

"Le marché publicitaire a ralenti ces trois dernières années, sous l'effet combiné de la mise en place des lois anticorruption et du ralentissement économique, qui ont touché le secteur du luxe, et du ralentissement des dépenses publicitaires des acteurs du web", rappelle ainsi Mme Van Eetvelde.

"Tous les matins je me pose la question d'un changement de réglementation ou sur la volonté des autorités de pousser un acteur local", admet Emmanuel Bastide, "mais je pense que nous ne sommes pas considérés comme une industrie stratégique".

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