Accueil Actu

Exsangue, le Venezuela assouplit les opérations de change

Plombé par une économie à bout de souffle, le gouvernement socialiste vénézuélien a assoupli jeudi le strict contrôle des changes qu'il exerçait depuis 2003, autorisant les transactions de devises dans les bureaux de change, afin d'attirer des capitaux étrangers.

Le texte adopté jeudi par l'Assemblée constituante permet de "déroger" à la loi qui prévoyait des amendes et des peines allant jusqu’à 15 ans de prison pour les auteurs d'opérations de change réalisées en marge de la Banque centrale.

Le gouvernement de Nicolas Maduro entend donc accorder aux Vénézuéliens comme aux étrangers "les plus amples garanties pour mieux participer au modèle de développement socio-économique et productif du pays", ajoute le décret.

Jusqu'à présent, le contrôle des changes permettait à l'Etat d'avoir le monopole sur les dollars, euros ou autres devises, qui étaient distribuées au compte-gouttes, et de fixer leur taux de change.

Conséquence : un marché noir parallèle où le billet vert s’échange pour un montant de bolivars 30 fois supérieur au taux officiel.

Selon les experts, cette différence importante a favorisé le développement de la corruption et la hausse de l'inflation, la plupart des importations privées étant réalisées avec des dollars issus du marché noir.

"Les acteurs économiques pourront se rendre dans les bureaux de change qui auront été autorisés par l’exécutif afin d'y réaliser tout type de transaction de change, de manière légale et sûre", a déclaré le vice-ministre de l'Economie Tareck El Aissami, en présentant un peu plus tôt le texte devant la Constituante.

Au Venezuela, tous les voyants économiques sont au rouge vif depuis des années. L'inflation pourrait atteindre 1.000.000% fin 2018, selon le Fonds monétaire international, alors que le PIB devait s'effondrer de 18%.

- Virage économique -

Le Venezuela tire 96% de ses revenus du brut. Or sa production de pétrole s'est écroulée d'au moins moitié en un an et demi, faute de liquidités pour moderniser les champs pétroliers. Selon l'OPEP, la production de brut a chuté de 3,2 millions de barils par jour (mbj) en 2008 à 1,5 millions en juin.

Aliments, médicaments ou biens de consommation courante : la pénurie est généralisée dans ce pays où les services publics, des soins à l'électricité, en passant par l'eau ou les transports, se sont fortement dégradés.

Une panne géante électrique a paralysé mardi pendant plus de trois heures les transports, le commerce ainsi que les communications téléphoniques et internet à Caracas.

Evoquant un acte de "sabotage", le gouvernement accuse ses adversaires d'être à l'origine de ces incidents pour faire monter la colère populaire, tandis que l'opposition met en avant les installations défaillantes, faute d'investissements suffisants.

A la surprise de tous le président Maduro a admis lundi l'"échec" du modèle productif mis en place par son gouvernement ces dernières années. "Les modèles productifs que nous avons testés jusqu'à présent ont été un échec et c'est notre responsabilité, la mienne, la tienne", a déclaré le chef de l'Etat lors du congrès de la formation au pouvoir, le Parti socialiste uni du Venezuela (PSUV).

"Les pleurnicheries, ça suffit! (...) On doit produire avec ou sans agression (présumée de l'extérieur, selon le gouvernement), avec ou sans blocages, faire du Venezuela une puissance économique. (...) Plus de couinement, ce que je veux c'est des solutions, camarades!", a-t-il lancé.

Récemment, des dirigeants du chavisme, le mouvement au pouvoir, ont haussé le ton pour réclamer un virage économique. "Voilà 19 ans que la révolution a eu lieu, nous sommes désormais responsables des bonnes et des mauvaises choses", a lâché Freddy Bernal, collaborateur influent du président Maduro.

On estime que 1,6 million de Vénézuéliens ont émigré depuis 2016 à cause de la débâcle économique, qui a fait basculer 87% de la population dans la pauvreté, selon une étude des principales université du pays.

À lire aussi

Sélectionné pour vous