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Italie: la reprise d'Alitalia dans l'impasse, le gouvernement indécis

La reprise de la compagnie aérienne italienne en difficultés Alitalia est dans l'impasse après des mois de négociations infructueuses avec d'éventuels repreneurs, provoquant une vive inquiétude des syndicats tandis que le gouvernement italien reste indécis sur la solution à adopter.

"Pour le moment, il n'y a pas une solution de marché", a souligné à plusieurs reprises cette semaine le ministre du Développement économique Stefano Patuanelli.

"Nous devons comprendre comment créer une solution de marché (un ou plusieurs repreneurs privés) ou comment agir pour trouver une possibilité, compatible avec les moyens financiers" dont dispose actuellement Alitalia "pour trouver une solution différente", a-t-il ajouté, en ouvrant la voie à une implication directe de l'Etat italien dans le sauvetage.

"Nous sommes en train de réfléchir aux prochains pas que nous pouvons entreprendre. A l'heure actuelle, nous avons pris acte (...) qu'il n'y a plus de consortium qui puisse faire une offre définitive de rachat", a-t-il ajouté.

Après des mois de négociations et l'expiration d'un énième délai fixé par le gouvernement italien, le groupe autoroutier et aéroportuaire Atlantia, contrôlé par la famille de Luciano Benetton, a indiqué la semaine dernière que les conditions n'étaient pas réunies pour qu'il puisse rejoindre un consortium qui sauverait Alitalia.

Atlantia devait participer au plan de sauvetage aux côtés du groupe public des chemins de fer italiens Ferrovie dello Stato (FS), de la compagnie aérienne américaine Delta et du ministère italien de l'Economie et des Finances.

Delta avait indiqué le 12 novembre qu'elle était prête à investir jusqu'à 100 millions d'euros pour participer au sauvetage de son homologue italienne, et à prendre une participation de 10%, mais le projet du consortium n'est désormais plus d'actualité.

Prise en étau entre les low cost et les compagnies du Golfe offrant des services haut de gamme, Alitalia, dont la présence sur le long courrier est réduite, accumule les pertes depuis des années.

Elle a dû être placée sous tutelle en 2017, après le rejet par les salariés d'un plan de restructuration prévoyant 1.700 suppressions d'emplois sur un total de 11.000 salariés.

Les syndicats ont d'ores et déjà annoncé une grève pour le 13 décembre, même si le gouvernement tente de les rassurer.

"Une solution sera trouvée", a assuré M. Patuanelli jeudi matin, en glissant qu'"une nationalisation n'est pas obligatoirement une chose négative".

- Pertes faramineuses -

Selon des calculs de l'agence AGI, la "meilleure" année d'Alitalia sur la dernière décennie a été 2011 avec une perte de "seulement" 69 millions d'euros, un chiffre qui grimpait à 280 millions l'année suivante pour atteindre 580 millions en 2014.

"L'anomalie d'Alitalia c'est qu'elle perd de l'argent quand elle vole", résume l'association de consommateurs ADUC.

Il est difficile de chiffrer le montant exact que les contribuables italiens ont payé au fil des années pour maintenir à flot la compagnie.

"Avec l'argent gaspillé dans Alitalia, l'Etat italien aurait pu acheter six compagnies aériennes, à savoir Air France, KLM, Turkish Airlines, Fly Norvegian, Finnair et SAS", assure ADUC.

"Sur Alitalia, le gouvernement navigue à vue. L'exécutif ne sait pas quoi faire, même si une semaine s'est écoulée déjà depuis l'expiration du dernier délai sans qu'une offre n'ait été présentée", écrit jeudi Il Sole 24 Ore, le principal quotidien économique italien.

Il semble disposé à explorer "une autre voie, peut-être une restructuration et la création d'une nouvelle compagnie publique", estime le journal qui se demande comment être "surpris qu'il n'y ait pas d'acheteurs pour une compagnie qui avant perdait 500 millions d'euros par an et maintenant en perd davantage".

Restructuration, avec licenciement de milliers d'employés, vente par appartements -- dessertes aériennes, maintenance -- ou bien liquidation… l'avenir semble sombre, tout du moins hautement incertain pour la compagnie nationale.

Dans tous les cas, l'enjeu est élevé pour le gouvernement formé du Mouvement 5 étoiles (antisystème) et du Parti démocrate (centre gauche), alors que les dossiers économiques compliqués s'accumulent, de la probable fermeture de l'usine Whirpool à Naples aux inquiétudes entourant Ilva, qu'ArcelorMittal a annoncé vouloir renoncer à acheter. Et ce dans un pays affichant un taux de chômage de près de 10%.

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