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L'affaire de "chemise arrachée" revient devant la justice, dans un climat social plus apaisé

L'affaire de la "chemise arrachée" du DRH d'Air France revient lundi devant la justice, mais le contexte a changé avec une compagnie de nouveau profitable et soucieuse de "tourner la page" des violences ayant émaillé la manifestation du 5 octobre 2015.

Lundi s'ouvrira à Paris le procès en appel de douze salariés et ex-salariés d'Air France, soutenus par la CGT dont la plupart sont membres. Ils doivent répondre de violences et de dégradations commises ce jour-là, lorsqu'une manifestation initialement cantonnée devant le siège de la compagnie à Roissy avait dégénéré avec l'envahissement par la foule de la salle où se tenait un Comité central d'entreprise (CCE).

Quatre anciens salariés, qui tous ont été licenciés, seront jugés pour violences. Trois d'entre eux avaient été condamnés à trois et quatre mois de prison avec sursis à Bobigny. Le quatrième avait été relaxé en première instance mais le parquet a fait appel. Les huit autres prévenus, qui avaient été condamnés en première instance à 500 euros d'amende, seront rejugés pour des dégradations commises sur le portail d'accès au siège.

Violemment pris à partie alors qu'ils exposaient en CCE un plan d'économies susceptible d'aboutir à des milliers de suppressions d'emplois, Xavier Broseta, le DRH, et Pierre Plissonnier, le responsable du long-courrier, avaient dû fuir sous les huées, torse nu pour le premier, la chemise en lambeaux pour le second.

Les images des deux cadres escaladant un grillage pour échapper à la colère des manifestants avaient fait le tour du monde et contribué à ternir la réputation française en matière de dialogue social.

Mais, depuis, Xavier Broseta a quitté la compagnie, Pierre Plissionier est parti à la retraite, Air France a un nouveau directeur général et, surtout, la compagnie a renoué avec les bénéfices.

Résultat, les syndicats n'en sont plus à mobiliser contre un éventuel plan social mais à exiger une augmentation générale de 6 % en récompense des efforts fournis par les salariés lors des précédents plans de compétitivité.

Et après le "succès" du 22 février où près d'un quart du personnel a fait grève pour réclamer sa "part du gâteau", une large intersyndicale appelle à une nouvelle mobilisation pour les salaires le 23 mars.

- 'Tourner la page' -

"Air France regrette que ce procès se poursuive, imposant à toutes les victimes de se replonger dans ces évènements, qui ont été choquants pour tous", a réagi la compagnie aérienne dans un communiqué transmis à l'AFP.

"Le jugement du tribunal de Bobigny, qui a condamné sans ambiguïté les violences, était un jugement mesuré. Il aurait dû permettre de tourner la page du triste épisode des violences intervenues lors du CCE du 5 octobre 2015", a-t-elle ajouté.

Défendant un vigile blessé alors qu'il tentait de protéger M. Broseta, Me Axel Ursulet n'a qu'un seul souhait : "que cesse ce calvaire qui transforme un ouvrier de la sécurité en coupable de je ne sais quel crime, alors que s'il n'avait pas été là, il est évident que ça aurait dégénéré encore plus".

Comme elle l'avait fait lors du procès à Bobigny, fin novembre 2016, Me Lilia Mhissen, qui défend dix des prévenus, entend dénoncer un "dossier monté totalement à charge à partir de vidéos qui ont fait l'objet de montages et de ralentissements", tandis que d'autres, susceptibles de disculper ses clients, ont été écartées de la procédure.

Elle soutiendra également qu'Air France, pour avoir verrouillé l'accès à son siège et recruté des agents de sécurité, porte une part de responsabilité dans les violences qui sont survenues, dans le sens où cette décision, qui constitue selon elle une atteinte au droit de grève, a pu exciter la colère des manifestants.

Depuis l'envahissement du CCE, la direction a pris plusieurs fois la précaution de "délocaliser" à Paris des séances de négociation avec les syndicats, par crainte de nouveaux débordements. Une situation que la CGT a l'intention de dénoncer lors d'un rassemblement qui se tiendra à midi, avant l'ouverture des audiences.

Le procès, qui doit s'achever mardi 20 mars, se déroulera sur cinq après-midi.

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