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La BCE devrait débattre de mesures de soutien à l'économie avant d'agir en septembre

Déterminée à soutenir l'économie, la Banque centrale européenne devrait ouvrir la voie jeudi à une baisse des taux, probablement entérinée en septembre, et à une relance plus lointaine des rachats de dette, selon les analystes.

Rarement une réunion estivale aura été entourée d'un tel suspense, distillé par l'institution monétaire elle-même face à un tableau économique fait d'inflation languissante, de croissance poussive et de tensions commerciales persistantes.

Le président de la BCE, Mario Draghi, avait tenu en juin plusieurs discours volontaristes et mentionné une possible baisse des taux, parmi un lot de "mesures de relance supplémentaires" envisageables, à moins que de bonnes surprises n'éclairent le ciel conjoncturel.

Mais rien de tel n'est survenu et pour les investisseurs, la cause est entendue: le prochain mouvement de l'institut sera bien de baisser le coût du crédit, laissé depuis mars 2016 à son plancher historique, et non de le remonter comme attendu il y a quelques mois encore.

Seulement le conseil des gouverneurs de l'institut monétaire devrait mener jeudi "une discussion finale avant de se mettre en marche", pronostique Carsten Brzeski, économiste chez ING.

- Discuter puis décider -

Concrètement, la "voie la plus naturelle" serait pour la banque centrale d'indiquer qu'elle maintiendra ses taux "à leur niveau actuel ou à un niveau inférieur" pour une période prolongée: cette formule codée préparerait les esprits à une décision ultérieure, explique Frederik Ducrozet, stratégiste chez Pictet Wealth Management.

Les marchés anticipent que l'institut abaissera dès sa réunion du 12 septembre son taux de dépôt, qui sert aujourd'hui de référence sur le marché, à -0,50%, contre -0,40% aujourd'hui, précise à l'AFP Kornelius Purps, stratège en produits de taux chez Unicredit.

La BCE facturerait donc encore plus lourdement les liquidités que les banques placent "en sécurité" à ses guichets, pour les inciter à les prêter plutôt aux ménages et aux entreprises.

Par cette décision, l'institut monétaire démontrerait aussi sa capacité à agir, à l'image de la Réserve fédérale américaine (Fed) qui s'apprête à abaisser ses taux de 0,25 point de pourcentage lors de sa réunion du 31 juillet.

Mais à l'inverse de la Fed, qui a maintenu ses taux en territoire positif depuis la crise financière, la BCE a amené depuis 2016 son taux de refinancement à zéro et ses marges de manoeuvre sont nettement plus réduites, l'obligeant à se montrer créative.

Aussi l'institution pourrait relancer la réflexion amorcée au printemps sur un système de taux négatifs "par paliers" - des taux dégressifs, dont le plus faible ne toucherait qu'une fraction des dépôts - déjà mis en place en Suisse, en Suède ou au Japon, pour alléger la charge d'intérêt pesant pour près de 8 milliards par an sur les dépôts des banques.

- Agir dès maintenant ? -

Certains observateurs estiment que la BCE attendra son nouveau jeu de prévisions économiques en septembre pour tout dévoiler d'un coup: une baisse de taux et une reprise des rachats nets de dette, arrêtés fin 2018 après avoir amassé 2.600 milliards d'euros d'obligations privées et publiques depuis 2015.

La croissance de la zone euro devrait en effet avoir ralenti d'avril à juin et demeurer sur un faible rythme durant l'été, pénalisée en particulier par l'impact sur l'industrie du bras de fer sino-américain.

L'inflation en zone euro s'est, elle, inscrite à 1,3% en juin, contre 1,2% en mai, et devrait se tasser dans les mois à venir en raison de la baisse des prix du pétrole, toujours loin de l'objectif légèrement inférieur à 2% visé par la BCE.

Autre élément de nature à inquiéter, les banques ont resserré les normes de crédit pour les entreprises au deuxième trimestre de 2019, et ce pour la première fois depuis 2014, selon une étude trimestrielle de l'institution mardi.

Même si la réaction sur les marchés serait spectaculaire, il reste donc une "chance non négligeable" pour que Mario Draghi tranche dès jeudi sur les taux, car "rien ne justifie d'attendre un mois de plus", avertit donc M. Ducrozet.

L'homme fort de l'euro, qui passera la main fin octobre à la Française Christine Lagarde, pourrait ainsi une nouvelle fois montrer qu'il aime "devancer" le tempo conventionnel de la politique monétaire, conclut M. Brzeski.

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