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La BCE voit s'essouffler la conjoncture en zone euro

Déjà peu pressée de resserrer sa politique monétaire, la Banque centrale européenne devrait discuter jeudi des récents signes de ralentissement économique en zone euro, couplés à une remontée toujours poussive de l'inflation.

Sauf immense surprise, les taux directeurs seront maintenus au plus bas et le vaste programme de rachats de dette publique et privée, le "QE", sera confirmé jusqu'en septembre à un rythme diminué de moitié depuis janvier, soit 30 milliards d'euros par mois.

L’institution présidée par Mario Draghi avait pris acte en mars dernier de la bonne santé économique pour réserver une petite surprise aux acteurs du marché, en déclarant qu'elle n'envisageait plus de relever le volume de son QE.

Or "la plupart des données économiques publiées en avril ont été faibles", fait remarquer la banque HSBC, pour qui "ce n'est pas le moment pour M. Draghi d'augmenter les attentes du marché en vue d'un resserrement plus tôt que prévu de la politique monétaire".

Dernière donnée en date, la croissance de l'activité privée en zone euro est restée inchangée en avril après le ralentissement enregistré en mars, selon la première estimation de l'indice PMI composite du cabinet Markit publiée lundi.

- Hausses de salaires -

De quoi alimenter le débat naissant à la BCE sur un possible coup de mou de l'économie en zone euro, susceptible de bouleverser les scénarios - pourtant guettés depuis des mois - de resserrement monétaire.

Le seul objectif explicitement fixé à l'institut de Francfort, l'inflation en zone euro, continue d'évoluer à un niveau trop bas par rapport à la dynamique économique: à 1,3% en mars, il s'agit certes d'une accélération sur un mois mais qui relève d'effets saisonniers, tandis que l'inflation calculée sans les matières premières et l'énergie demeure scotchée à 1%.

Élément clé pour permettre la remontée des prix, l'évolution des salaires restera surveillée de près, mais les nettes hausses négociées ces derniers mois en Allemagne, dans la métallurgie et récemment dans la fonction publique, mettront du temps à se diffuser.

Il sera donc trop tôt jeudi pour crier victoire sur l'inflation, même si la BCE devrait se dire "confiante" dans les chances de voir l'indice continuer à "se diriger vers son objectif", soit près de 2% sur le moyen terme, explique Frederik Ducrozet, économiste chez Pictet wealth management.

Comme en mars, l'avantage devrait rester jeudi aux "colombes" de l'institut, qui entendent garder un fort degré d'assouplissement monétaire, face aux "faucons" partisans d'un cours plus restrictif.

- Attendre juin -

D'autant que d'autres risques planent sur la conjoncture, au point de laisser redouter "un enchaînement négatif de menaces protectionnistes, d'évolutions défavorables des taux de change et de corrections brutales des marchés financiers", a martelé mercredi dernier François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France et membre du conseil de la BCE.

Une telle spirale entraînerait un durcissement des conditions financières ainsi qu’une détérioration des perspectives de croissance dans la zone euro, retardant la sortie des mesures exceptionnelles en cours par la BCE, a estimé le banquier central.

Dans ce contexte incertain, "la réunion de jeudi sera une répétition générale que la BCE préfèrerait probablement effectuer à huis clos", résume Carsten Brzeski, de la banque ING Diba.

Si la situation le permet, les annonces concrètes devraient plutôt intervenir lors de la prochaine réunion de mi-juin, voire celle du 26 juillet: la BCE doit non seulement programmer la sortie graduelle du QE, mais aussi préciser à quel moment elle relèvera ses taux ensuite. Elle s'est jusqu'ici bornée à dire que ce serait "bien après" l'arrêt des rachats de dette, une échéance interprétée par les économistes comme renvoyant à mi-2019 au plus tôt.

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